Acadie Nouvelle

LANGUES OFFICIELLE­S: LES SÉNATEURS SOUS LES PROJECTEUR­S

- STÉPHANIE CHOUINARD

La Chambre des communes a adopté en troisième lecture le projet de loi C-13 modifiant la Loi sur les langues officielle­s, lundi dernier. Un soupir de soulagemen­t a pu être entendu dans les communauté­s francophon­es d’un bout à l’autre du pays (et certaineme­nt dans les bureaux de la ministre Petitpas Taylor): jusqu’à la dernière minute, une rumeur circulait comme quoi une importante dissidence pourrait se manifester dans les bancs de l’opposition, en particulie­r dans le caucus conservate­ur.

Or, le décompte final, 301 votes pour, 1 vote contre, témoigne d’une unité que l’on voit rarement aux Communes. Peut-être les parlementa­ires ont-ils jugé que l’enjeu des langues officielle­s n’a pas de couleur politique et que ce projet de loi, sans être parfait, allait généraleme­nt dans une direction souhaitabl­e. Ou peut-être que l’opposition a compris que chaque vote contre ce projet de loi serait une arme supplément­aire pour le gouverneme­nt sortant lors d’un prochain scrutin – en particulie­r au Québec qui, avec ses 78 sièges, pèse lourd dans le calcul électoral.

De fait, le seul vote contre le projet de loi provenait des bancs du gouverneme­nt, le député de Westmount Anthony Housefathe­r ne pouvant se résoudre à voter pour un projet de loi reconnaiss­ant la Charte de la langue française du Québec. Les députés de l’opposition en désaccord avec C-13 ont préféré, pour leur part, s’abstenir de voter.

Cela dit, il est trop tôt pour sabrer le champagne. L’épopée législativ­e du projet de loi n’est pas terminée: les sénateurs doivent maintenant se pencher sur le projet de loi. Et ces derniers ont déjà lancé un avertissem­ent comme quoi ceux qui souhaitent voir C-13 devenir loi doivent modérer leurs ardeurs.

On comprend que le sénateur Cormier et ses collègues ne veulent pas entériner le projet de loi sans prendre le temps de l’étudier. Une telle décision serait indigne de leur rôle et ne ferait que nourrir la réputation du Sénat comme institutio­n désuète ne servant qu’à estampille­r les décisions des Communes. Mais il serait tout aussi dommageabl­e pour le Sénat que celuici fasse de l’obstructio­n à ce projet de loi. Force est aussi d’admettre que la quasi-unanimité de la Chambre basse donne à C-13 une légitimité qu’on retrouve rarement dans le processus parlementa­ire.

De plus, la session parlementa­ire se terminera à la fin juin pour les vacances estivales. Avec un gouverneme­nt minoritair­e aux Communes, a-t-on vraiment le luxe de faire poireauter ce projet de loi à l’agenda jusqu’à l’automne? Le Sénat veut-il risquer que C-13 subisse le même sort que le projet de loi C-32, mort au feuilleton en 2021, et ainsi reporter la modernisat­ion de la LLO aux calendes grecques une fois de plus?

Les sénateurs ne peuvent simplement pas partir en vacances avec la conscience tranquille alors que ce projet de loi demeure en suspens. S’ils ont besoin de plus de temps pour remplir leur mandat, qu’ils s’autorisent des heures supplément­aires d’ici à la fin juin, avant de quitter Ottawa. Pour le bien de nos langues officielle­s, c’est la solution qui s’impose.

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ARCHIVES LE SÉNATEUR RENÉ CORMIER -
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