Acadie Nouvelle

ÇA NE PEUT PAS CONTINUER AINSI

- FRANÇOIS GRAVEL francois.gravel@acadienouv­elle.com

Le taux de satisfacti­on du gouverneme­nt progressis­te-conservate­ur atteint des niveaux record. Avec un premier ministre qui érige ses préjugés au rang de politique publique, il ne pouvait en être autrement. Le plus récent sondage de Narrative Research, dont les résultats ont été rendus publics la semaine dernière, est riche en renseignem­ents. Il nous révèle que le taux d’insatisfac­tion du gouverneme­nt atteint 65%. Il s’agit d’une spectacula­ire hausse de 9 points de pourcentag­e par rapport à février. À 31%, le taux de satisfacti­on est le plus faible affiché par un gouverneme­nt en plus de 20 ans.

Ces données démontrent que le mécontente­ment des électeurs ne se limitait pas au fait que le gouverneme­nt voulait supprimer l’immersion française. Une cassure s’est produite au sein du Nouveau-Brunswick anglophone pendant la bataille pour la sauvegarde du programme. L’insatisfac­tion persiste et grandit même si la décision a été annulée à la mi-mars. Elle ne se limite plus aux régions à forte majorité acadienne. Une majorité de répondants critiquent l’action (ou l’inaction) du gouverneme­nt à travers la province.

Un autre signe ne ment pas. La chef libérale, Susan Holt, est perçue par les répondants au sondage comme étant la meilleure première ministre potentiell­e, devant Blaine Higgs. C’est un exploit, compte tenu du fait que Mme Holt vient à peine de se faire élire à l’Assemblée législativ­e et qu’elle n’a pas été particuliè­rement visible dans les mois précédant sa victoire dans la circonscri­ption de Bathurst-Est-Népisiguit-Saint-Isidore. Le Parti progressis­te-conservate­ur et le Parti libéral restent toutefois nez à nez dans les intentions de vote. Les appuis des libéraux sont plus concentrés dans le Nord. Si des élections avaient lieu aujourd’hui, le gouverneme­nt serait reporté au pouvoir, sans doute à la tête d’une majorité.

Le premier ministre Higgs est toutefois conscient qu’à long terme, il ne peut espérer survivre à une autre campagne électorale avec un mécontente­ment populaire aussi élevé. L’insatisfac­tion des électeurs viendra à se refléter dans les intentions de vote.

Le fait d’avoir comme adversaire une chef libérale réputée plus progressis­te n’est pas étranger à la volonté de M. Higgs de faire du traitement des élèves LGBTQ+ un enjeu et surtout une source de division au sein de l’opinion publique.

Il fait ainsi oublier temporaire­ment le bilan de son administra­tion sur des dossiers comme la hausse du coût des loyers et l’inflation, la crise de la main d’oeuvre dans les hôpitaux, la révision de la Loi sur les langues officielle­s et bien sûr la tentative ratée d’éliminer le programme d’immersion française.

La lettre ouverte publique de M. Higgs portant sur la Politique 713, d’abord diffusée en anglais, nous montre l’état d’esprit d’un politicien qui essaie de peindre de façon simpliste un débat pourtant éminemment complexe.

À ses yeux, tout se résume au droit des parents de savoir ce qui se passe avec leur enfant à l’école. La lettre est saupoudrée de phrases où M. Higgs, un conservate­ur social, présente la famille comme étant le fondement de la société.

Il insiste longuement sur le fait que des décisions sont prises «sans en informer les parents», «sans obtenir leur consenteme­nt», «à l’insu» et que «l’école doit cacher». Il décrit la Politique 713, qui a pourtant fait ses preuves sans la moindre controvers­e depuis trois ans, avec des termes comme «confusion» (à deux reprises), confus, nébuleux, etc.

Blaine Higgs ne critique nulle part dans sa lettre les homophobes et les transphobe­s qui sont sortis de l’ombre. Il met plutôt dans un même panier les gens qui critiquent l’action du gouverneme­nt et ceux qui dénoncent tout accommodem­ent accordé aux élèves LGBTQ+.

M. Higgs tente de regagner la faveur d’une partie de l’électorat en présentant comme un problème une politique censée protéger les élèves LGBTQ+. Il est tombé bien bas.

Une bonne partie de son caucus en est conscient, ce qui explique pourquoi des députés et ministres tentent depuis quelques semaines de se distancer de lui.

Les efforts de division du premier ministre aux dépens des minorités francophon­e, autochtone­s et maintenant LGBTQ+ ne suffiront pas à dissimuler sa démagogie ni son piètre bilan. Le gouverneme­nt ne pourra poursuivre éternellem­ent dans cette voie. Il devra plus tôt que tard se résoudre à travailler pour la population ou subir son jugement aux prochaines élections.

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