ÇA NE PEUT PAS CONTINUER AINSI
Le taux de satisfaction du gouvernement progressiste-conservateur atteint des niveaux record. Avec un premier ministre qui érige ses préjugés au rang de politique publique, il ne pouvait en être autrement. Le plus récent sondage de Narrative Research, dont les résultats ont été rendus publics la semaine dernière, est riche en renseignements. Il nous révèle que le taux d’insatisfaction du gouvernement atteint 65%. Il s’agit d’une spectaculaire hausse de 9 points de pourcentage par rapport à février. À 31%, le taux de satisfaction est le plus faible affiché par un gouvernement en plus de 20 ans.
Ces données démontrent que le mécontentement des électeurs ne se limitait pas au fait que le gouvernement voulait supprimer l’immersion française. Une cassure s’est produite au sein du Nouveau-Brunswick anglophone pendant la bataille pour la sauvegarde du programme. L’insatisfaction persiste et grandit même si la décision a été annulée à la mi-mars. Elle ne se limite plus aux régions à forte majorité acadienne. Une majorité de répondants critiquent l’action (ou l’inaction) du gouvernement à travers la province.
Un autre signe ne ment pas. La chef libérale, Susan Holt, est perçue par les répondants au sondage comme étant la meilleure première ministre potentielle, devant Blaine Higgs. C’est un exploit, compte tenu du fait que Mme Holt vient à peine de se faire élire à l’Assemblée législative et qu’elle n’a pas été particulièrement visible dans les mois précédant sa victoire dans la circonscription de Bathurst-Est-Népisiguit-Saint-Isidore. Le Parti progressiste-conservateur et le Parti libéral restent toutefois nez à nez dans les intentions de vote. Les appuis des libéraux sont plus concentrés dans le Nord. Si des élections avaient lieu aujourd’hui, le gouvernement serait reporté au pouvoir, sans doute à la tête d’une majorité.
Le premier ministre Higgs est toutefois conscient qu’à long terme, il ne peut espérer survivre à une autre campagne électorale avec un mécontentement populaire aussi élevé. L’insatisfaction des électeurs viendra à se refléter dans les intentions de vote.
Le fait d’avoir comme adversaire une chef libérale réputée plus progressiste n’est pas étranger à la volonté de M. Higgs de faire du traitement des élèves LGBTQ+ un enjeu et surtout une source de division au sein de l’opinion publique.
Il fait ainsi oublier temporairement le bilan de son administration sur des dossiers comme la hausse du coût des loyers et l’inflation, la crise de la main d’oeuvre dans les hôpitaux, la révision de la Loi sur les langues officielles et bien sûr la tentative ratée d’éliminer le programme d’immersion française.
La lettre ouverte publique de M. Higgs portant sur la Politique 713, d’abord diffusée en anglais, nous montre l’état d’esprit d’un politicien qui essaie de peindre de façon simpliste un débat pourtant éminemment complexe.
À ses yeux, tout se résume au droit des parents de savoir ce qui se passe avec leur enfant à l’école. La lettre est saupoudrée de phrases où M. Higgs, un conservateur social, présente la famille comme étant le fondement de la société.
Il insiste longuement sur le fait que des décisions sont prises «sans en informer les parents», «sans obtenir leur consentement», «à l’insu» et que «l’école doit cacher». Il décrit la Politique 713, qui a pourtant fait ses preuves sans la moindre controverse depuis trois ans, avec des termes comme «confusion» (à deux reprises), confus, nébuleux, etc.
Blaine Higgs ne critique nulle part dans sa lettre les homophobes et les transphobes qui sont sortis de l’ombre. Il met plutôt dans un même panier les gens qui critiquent l’action du gouvernement et ceux qui dénoncent tout accommodement accordé aux élèves LGBTQ+.
M. Higgs tente de regagner la faveur d’une partie de l’électorat en présentant comme un problème une politique censée protéger les élèves LGBTQ+. Il est tombé bien bas.
Une bonne partie de son caucus en est conscient, ce qui explique pourquoi des députés et ministres tentent depuis quelques semaines de se distancer de lui.
Les efforts de division du premier ministre aux dépens des minorités francophone, autochtones et maintenant LGBTQ+ ne suffiront pas à dissimuler sa démagogie ni son piètre bilan. Le gouvernement ne pourra poursuivre éternellement dans cette voie. Il devra plus tôt que tard se résoudre à travailler pour la population ou subir son jugement aux prochaines élections.