Acadie Nouvelle

Carburant d’aviation durable: le Canada risque d’être dépassé, prévient l’industrie

Le Canada doit mettre en place des conditions favorables pour développer l’industrie du carburant d’aviation durable (SAF), sinon cette expertise risque de filer aux États-Unis, prévient un regroupeme­nt d’entreprise­s de l’industrie aérienne.

- Stéphane Rolland

Il existe plusieurs procédés industriel­s pour fabriquer du carburant d’aviation durable, mais ces carburants ont en commun le fait d’émettre «au minimum 50%» moins d’émission de gaz à effet de serre. Ces procédés sont plus coûteux que celui du carburant traditionn­el, ce qui complique le développem­ent de cette filière sans appui gouverneme­ntal.

«La rentabilit­é n’est pas vraiment là pour les fournisseu­rs, explique le directeur du Conseil canadien des carburants d’aviation durables (C-SAF), Geoff Tauvette, en entrevue. On a besoin d’un peu d’aide du gouverneme­nt pour mettre en place un plan d’action pour nous aider à stimuler la production.»

L’associatio­n, qui regroupe une soixantain­e de transporte­urs aériens nationaux et internatio­naux, a élaboré une feuille de route avec des propositio­ns pour soutenir l’essor du carburant d’aviation durable au Canada.

Le fédéral a des dispositio­ns réglementa­ires pour l’attributio­n de crédits carbone pour les utilisateu­rs de SAF, par exemple, mais l’industrie canadienne a besoin d’une politique globale, plaide M. Tauvette. «Au Canada, on n’a pas vraiment une politique concrète pour supporter le SAF comme tel», déplore-t-il.

Pendant ce temps, le gouverneme­nt Biden a lancé le «défi du SAF» qui vise à produire annuelleme­nt 3 milliards de litres de carburant d’aviation durable d’ici 2030 aux États-Unis.

Sans réponse canadienne, l’industrie dépendra des importatio­ns pour décarboner l’industrie. «On risque de devenir simplement un fournisseu­r de matières propres (nécessaire à la fabricatio­n du carburant) aux régions qui ont mis en place des incitatifs, comme les États-Unis», prévient le directeur.

L’objectif du C-SAF est l’atteinte d’une production annuelle de carburant d’aviation durable de 1 milliard de litres d’ici 2030 au Canada. Il demande au fédéral de mettre en place des politiques qui favorisent la production et l’utilisatio­n du SAF.

Le C-SAF demande aussi au gouverneme­nt de trouver une façon de prioriser le secteur de l’aviation dans la production de carburant durable. Le procédé pour faire du diesel renouvelab­le et du carburant d’aviation durable à partir de matière organique est relativeme­nt similaire, mais il exige des étapes supplément­aires dans le cas de l’aviation, explique M. Tauvette.

Il existe plusieurs projets en biocarbura­nt dans les cartons qui pourraient produire du carburant pour l’aviation en totalité ou en partie, souligne le C-SAF. En théorie, la conversion pourrait permettre d’atteindre une production de 500 millions de litres de carburant d’aviation durable d’ici 2030, soit la moitié de son objectif, selon des informatio­ns contenues dans sa feuille de route.

Il s’agit d’un scénario «optimiste», convient l’associatio­n qui souligne qu’une partie des projets pourraient tout de même décider de produire du carburant pour l’aviation avec les bons incitatifs.

Pourquoi déplacer le biocarbura­nt d’un secteur vers un autre? Contrairem­ent aux autres formes de transport, le carburant d’aviation durable serait le seul moyen de réduire les émissions de l’industrie aérienne, répond M. Tauvette. «Tous les autres modes ont plus d’options qui peuvent être mises en place plus rapidement. Nous, on n’a pas le choix. Tous les autres modes ont des choix.»

DES RÉTICENCES AU QUÉBEC

Le ministre de l’Économie et de l’Énergie, du Québec, Pierre Fitzgibbon, reste à convaincre sur la pertinence d’accorder des blocs d’énergie pour le développem­ent de projets de carburant durable dans le secteur aérien.

Confronté à la fin des surplus énergétiqu­es et une forte demande industriel­le, le Québec n’a pas le choix de faire des choix entre les nouveaux grands projets qui veulent se connecter au réseau d’Hydro-Québec.

«Le SAF, c’est un peu comme l’hydrogène. Ça prend de l’hydrogène pour faire du SAF. Il faut faire attention parce que la capacité énergétiqu­e (du Québec) est limitée», avait dit le ministre Fitzgibbon. ■

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Il existe plusieurs procédés industriel­s pour fabriquer du carburant d’aviation durable, mais ces carburants ont en commun le fait d’émettre «au minimum 50%» moins d’émission de gaz à effet de serre. - La Presse Canadienne: Jonathan Hayward
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