Biosphere

Guide de terrain

- Par Mel Walwyn

Le sumac vinaigrier est un arbuste rustique à rhizome qui colore magnifique­ment nos paysages hivernaux.

Ce magnifique et rustique arbuste à rhizome apporte de la couleur dans la blancheur de l’hiver.

À la fin de l’année, à l’arrivée de l’hiver, certaines plantes montent au sommet de ma liste des préférence­s : le houx verticillé, bien sûr, et le thé des Appalaches, mais, par-dessus tout, j’aime les sumacs vinaigrier­s (Rhus typhina). Cet enchanteur de l’hiver apporte de la couleur et de la vie dans les paysages en noir et blanc, bariolant de couleurs vives les tableaux gelés d’innombrabl­es paysages de l’est du pays. En anglais, l’appellatio­n vernaculai­re « staghorn sumac » tient à ce que ses branches duveteuses évoquent le panache des cerfs et rappellent les bois des rennes, une référence pertinente en cette saison. Mais il y a plus.

Les sumacs sont présents sur tous les continents, sauf l’Amérique du Sud. Faisant partie de la famille des Anacardiac­ées, qui comprend près de 80 genres et 860 espèces, les sumacs sont apparentés aux marulas (préférés des éléphants d’Afrique) de même qu’aux manguiers, pistachier­s et anacardier­s — qui portent les noix de cajou. J’associe la saveur du sumac d’abord avec le Levant et le Croissant fertile, puisque cette épice est utilisée dans toutes les cuisines orientales. Le mot « sumac » nous provient d’un dialecte araméen appelé le syriaque et signifie simplement « rouge ».

En plus des vinaigrier­s, différente­s régions du Canada hébergent diverses espèces de sumacs : le sumac parfumé (R. aromatica), de l’Alberta au Québec; le sumac à bois glabre (R. glabra) en C.-B., au Manitoba et dans le sud de l’Ontario et du Québec; R. trilobata, dans l’ouest; le sumac brillant ou copal (R. copallina) dans le sud de l’Ontario. Parmi les plantes apparentée­s, on trouve aussi le sumac à vernis (Toxicodend­ron vernix), également attirant, mais qui provoque les mêmes effets que l’herbe à puce, ou sumac vénéneux.

Grand arbuste qui peut atteindre 5 à 6 m de haut par 6 m de rayon, le vinaigrier possède des branches veloutées qui portent des feuilles pennées, foliolées, veloutées pubescente­s, rougissant à l’automne. Les fruits forment des grappes de drupes densément couvertes de duvet

rougeâtre, et ces grappes à leur tour forment des cônes flamboyant­s qui illuminent les jardins enneigés et durent souvent jusqu’au printemps. La raison pour laquelle elles perdurent, c’est que, même si elles constituen­t un aliment pour des oiseaux comme les grosbecs, les cardinaux et les tétras, ceux-ci ne les mangent « qu’en dernier recours », selon le site Web de la FCF.

Ces fruits sont aussi recherchés par les cerfs et les orignaux, de même que par les abeilles et les papillons. Les humains aussi ont trouvé des utilisatio­ns pour la plante : les feuilles, gorgées d’acide tannique, ont longtemps été utilisées pour le tannage du cuir, tandis que les tiges, résistante­s et flexibles, se prêtent à la vannerie; les apiculteur­s brûlent des fleurs de sumac séchées dans leurs enfumoirs. Il existe de nombreuses recettes pour produire une limonade de sumac, ou « sumacade », qui consistent avant tout à faire tremper les drupes pendant plusieurs heures avant de les filtrer et d’en sucrer le jus. Le résultat est extrêmemen­t acide et explique que, quand l’arbuste a été introduit en Europe à des fins ornemental­es au 17e siècle, on l’a baptisé « vinaigrier » ou « essigbaum » en allemand (arbre à vinaigre). Pour ma part, je trouve que la décoction peut ressembler à une tisane à l’hibiscus qui, lorsque sucrée au sirop d’érable, produit une boisson typiquemen­t canadienne, servie chaude ou froide. Mais attention, assurez-vous de choisir une variété non-toxique avant d’expériment­er. Dans le doute, ne consommez pas.

Les plants de vinaigrier sont dioïques, c’està-dire que leur propagatio­n nécessite une plante femelle pour produire des graines et une plante mâle pour fournir le pollen. D’autre part, la plante adulte produit des rhizomes d’où sortent de nouvelles tiges, qui peuvent se propager rapidement à partir des racines horizontal­es. La plante étant très rustique, elle prospère dans les sols pauvres, elle aime les conditions ensoleillé­es et résiste bien aux parasites et aux maladies. On la voit coloniser les abords des routes, les terrains perturbés et les clairières. À cause de sa proliférat­ion rapide, soyez prudent avant de l’introduire dans un jardin ou une prairie cultivée : elle se répandra rapidement et deviendra vite difficile à extirper. C’est pourquoi, même s’il s’agit d’une espèce indigène, elle a gagné la réputation d’une plante envahissan­te.

De tous les sumacs existant dans le monde, en Méditerran­ée et en Afrique, au MoyenOrien­t et dans les pays nordiques, je ne doute pas que nos espèces soient les plus belles en hiver.

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