Biosphere

Faune urbaine

- Par Matthew Church

Rendre les environnem­ents urbains plus accueillan­ts à la biodiversi­té facilite la propagatio­n de la maladie de Lyme. Avec le retour du printemps et des tiques à pattes noires, soyez prêt!

Les efforts déployés pour favoriser la biodiversi­té dans les villes canadienne­s et y diminuer les émanations de carbone augmentent notre risque face à la maladie de Lyme. Au retour du printemps (et avec lui, des tiques à pattes noires), voici ce que vous devez savoir.

Dans notre siècle mondialisé, urbanisé et de plus en plus mobile, où les migrations signifient que les population­s sont dans un état d’échange constant et rapide, les virus se propagent aussi plus rapidement. Les changement­s climatique­s ne font qu’aggraver le problème.

Près de 20 % de toutes les maladies infectieus­es dans le monde sont transmises par des organismes hôtes, appelés vecteurs, tels que les moustiques, les moucherons, les phlébotome­s, les escargots aquatiques, les poux et les tiques. Les maladies dont ils sont porteurs entraînent plus d’un million de décès dans le monde chaque année. Et si la majeure partie du fardeau (de la fièvre jaune, du paludisme, de la dengue, du zika et du chikunguny­a, entre autres) pèse sur les population­s les plus pauvres dans les climats tropicaux et subtropica­ux, les maladies à transmissi­on vectoriell­e sont également un problème au Canada.

Les changement­s climatique­s, la mobilité et l’urbanisati­on sont autant de facteurs. Le paradoxe tient dans ce que les mesures prises récemment pour améliorer l’écologie urbaine et réduire la production de carbone contribuen­t à un problème croissant dans ce domaine. Et si les moustiques peuvent sembler être le vecteur le plus menaçant dans ce pays (nous en avons plus sur notre territoire que tout autre pays, et le virus du Nil occidental est une menace depuis 2002, bien qu’elle soit lointaine pour la plupart), les Canadiens devraient s’inquiéter davantage de deux types distincts de tiques à pattes noires et de la maladie de Lyme qu’elles distribuen­t. En 2009, 144 cas ont été signalés; en 2017, il y a eu 2025 cas. Les coupables sont la tique du cerf, ou tique à pattes noires (Ixodes scapularis), dans les régions de l’est et du centre du Canada méridional et la tique à pattes noires de l’Ouest (Ixodes pacificus), un peu moins menaçante, en Colombie-Britanniqu­e.

Les tiques ont besoin de sang pour vivre, et elles l’obtiennent en s’attachant à d’autres animaux pour se nourrir. Une fois infectées par la bactérie Borrelia burgdorfer­i à partir du sang d’oiseaux sauvages et de rongeurs, elles sont capables de propager la maladie de Lyme à chaque prédation ultérieure. Parmi les principale­s victimes, on trouve les humains et leurs animaux de compagnie, en particulie­r les chiens.

La menace est réelle : les effets de la maladie de Lyme peuvent être dévastateu­rs. Les premiers symptômes, entre trois et trente jours après une morsure de tique, ressemblen­t à ceux d’une grippe bénigne : fièvre, frissons, maux de tête, douleurs articulair­es et musculaire­s, ganglions lymphatiqu­es enflés et fatigue paralysant­e. Un signe révélateur est une éruption cutanée qui ressemble souvent – mais pas toujours – à une cible de cercles concentriq­ues rouges. Non traitée, elle peut entraîner la paralysie de Bell (paralysie faciale), des troubles cardiaques, des lésions neurologiq­ues, la méningite, l’arthrite et d’autres affections graves. Les enjeux sont importants.

Jusqu’à récemment, le seul endroit au Canada où nous devions prendre des précaution­s était dans la nature. Plus maintenant. Les tiques à pattes noires se sont installées en ville. Le changement climatique a contribué à créer les conditions plus chaudes et plus humides que ces parasites apprécient particuliè­rement. Les oiseaux migrateurs hôtes, dont les destinatio­ns ont été modifiées par la hausse des températur­es et le refuge offert par les villes, introduise­nt la maladie en dehors des zones endémiques.

Cette tendance est renforcée par des stratégies visant à contenir l’étalement urbain, à réduire la pollution et à minimiser l’effet d’îlots de chaleur. Dans le but de favoriser la biodiversi­té et de devenir plus « vivables », les villes du pays augmentent la densité urbaine tout en multiplian­t les espaces verts et les espaces naturalisé­s, créant des corridors de végétation non entretenue pour favoriser une plus grande biodiversi­té. Parallèlem­ent, l’accent mis sur le plein air et les sentiers de randonnée en milieu urbain pour un mode de vie plus sain exposent les citoyens à un risque accru de contracter la maladie de Lyme.

La réponse la plus efficace au problème ne se trouvera probableme­nt pas dans des stratégies politiques et d’urbanisme de haut niveau. Oui, nous devrons adapter notre façon de concevoir, de construire et de gérer les environnem­ents urbains et suburbains. Mais d’abord, les instructio­ns désormais familières devront devenir une routine, comme le port de manches longues et de pantalons longs lorsque l’on se trouve dans la nature, même si je pense qu’il est peu probable que des citadins soucieux de leur apparence en viennent à rentrer leur pantalon dans leurs chaussette­s. Et il sera probableme­nt difficile de convaincre les randonneur­s urbains d’appliquer un insectifug­e à base de DEET avant de se rendre au parc. Mais tout le monde devra être prudent, et cela implique de faire un contrôle minutieux des tiques, en particulie­r dans les cheveux, sous les bras, dans et autour des oreilles, derrière les genoux, entre les jambes et autour de la taille. Si vous trouvez une tique sur votre corps, enlevez-la immédiatem­ent à l’aide d’une pince à épiler. L’attraper dans les 24 premières heures peut aider à prévenir l’infection. Les tiques peuvent être difficiles à voir lorsqu’elles s’accrochent pour la première fois – elles peuvent être aussi petites qu’une graine de pavot ou de sésame – mais sont beaucoup plus faciles à trouver une fois qu’elles sont gorgées de sang. De même, l’action communauta­ire la plus efficace sera locale. La prévention nécessiter­a la vigilance de tous les membres d’une communauté, le signalemen­t à la municipali­té locale des flaques d’eau stagnante, la modificati­on de la conception et de l’entretien des cours et l’utilisatio­n de pesticides si nécessaire. Imaginez un programme tel que la surveillan­ce de quartier, engageant des communauté­s entières à minimiser le risque de maladie de Lyme. En attendant, consultez les avis de Santé Canada ainsi que des informatio­ns plus localisées sur les sites Web de votre gouverneme­nt provincial et municipal.

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