Là où la nature rencontre la science
La conservation de la nature n’est pas une idée nouvelle — le terme existe depuis des siècles. Mais le concept de science de la conservation — où les disciplines de l’écologie, de la biologie et de la génétique sont croisées et pollinisées par les principes et les pratiques de défense de la nature — est beaucoup plus nouveau, peut-être diffusé depuis 50 ans. Ce fait m’est revenu à l’esprit au moment de mettre sous presse lorsque j’ai appris le décès de David Schindler, probablement le plus grand défenseur de la nature que ce pays ait jamais connu.
Au cours de sa carrière longue et diversifiée, David Schindler a été à l’avant-garde en tant que scientifique et amoureux de la nature. Il s’est engagé en faveur de politiques de conservation fondées sur de bonnes connaissances scientifiques, elles-mêmes soutenues en retour par des mobilisations locales, nationales et internationales. Élevé dans les bois et sur les eaux du Dakota du Nord, il est devenu boursier Rhodes à l’université d’Oxford sous la direction de Charles Elton, l’un des premiers leaders du mouvement écologiste. Plus tard, Schindler a été le pionnier de l’arpentage et le directeur fondateur de la Région des lacs expérimentaux du Canada, qui représentait alors (et représente toujours) une contribution véritablement révolutionnaire à la recherche sur les eaux douces. Et lorsque ses travaux ont démontré l’impact considérable des phosphates sur l’écologie des lacs, il est devenu un défenseur omniprésent et convaincant du changement. Les phosphates ont rapidement été interdits dans les détergents à lessive, empêchant ainsi la destruction à grande échelle des lacs dans le monde entier. Ses travaux ultérieurs sur les pluies acides ont montré que celles-ci tuaient les lacs et tout ce qui y vivait. Cela a conduit à l’Accord Canada–États-Unis sur la qualité de l’air en 1991 et à l’élimination des pluies acides, une incontestable réussite écologique. Lauréat en 1992 du prestigieux prix de l’eau de Stockholm, mais plus heureux lorsqu’il travaillait sur le terrain à « produire de la science », Schindler a été une source d’inspiration pour toute une génération de scientifiques de la conservation.
Dans cette optique, j’aimerais attirer votre attention sur les articles de fond de ce numéro, qui s’intéressent à des scientifiques passionnés qui défendent ardemment leurs sujets parce qu’ils les connaissent si intimement. Dans notre article sur le boeuf musqué, l’auteur Tim Falconer nous fait découvrir ces bêtes préhistoriques tout en nous présentant les femmes et les hommes dévoués qui les étudient, parlent en leur nom, et qui les aiment. Leurs efforts sont aussi une source d’inspiration. Vous trouverez sous la plume de Kerry Banks le portrait d’un autre défenseur canadien accompli de la nature : la professeure Suzanne Simard, de l’Université de la Colombie-Britannique, a découvert des vérités étonnantes sur les forêts et les arbres qui les composent. C’est aussi un travail révolutionnaire.
Tout ce que nous faisons à la FCF repose sur la science, qui est à la base du travail des défenseurs de la nature et de l’environnement. En tant qu’organisation, la FCF accorde une grande importance à l’apport de connaissances et d’approches scientifiques aux problèmes de conservation. Nos quatre responsables de la conservation, tous titulaires d’un doctorat dans leur domaine, collaborent activement avec leurs collègues des universités et du secteur privé à faire progresser la recherche appliquée en matière de conservation. Et la FCF contribue à la formation de la prochaine génération de scientifiques de la conservation en commanditant et en soutenant le travail d’étudiants de deuxième cycle.
La FCF est également fière du travail de conservation fondé sur des données probantes qu’elle effectue dans tout le Canada avec les Premières Nations, l’industrie et d’autres intervenants afin d’intégrer de multiples types de connaissances dans la création de solutions concrètes. De plus, la FCF est heureuse de travailler avec le Centre canadien de conservation fondée sur des preuves, où nous sommes appelés à contribuer à un examen par des experts des recherches et des politiques gouvernementales et universitaires liées à la conservation des milieux sauvages et de la biodiversité.
Il reste beaucoup de travail à faire. Comme l’a démontré David Schindler, l’avenir sera mieux servi en associant le meilleur de la recherche scientifique à la passion et à l’énergie des communautés qui défendent la nature. La FCF est fière d’y participer.