TABOU, MAIS PAS PARTOUT
La clinique de Jason Fung est un peu moins « unique au monde » que le croit son fondateur. En Russie et en Allemagne, le jeûne est un soin relativement commun dans les établissements de santé. À l’Hôpital universitaire de la Charité de Berlin, par exemple, ça fait 20 ans que les spécialistes y ont recours pour guérir ou soulager certains maux, tels que le diabète, l’arthrite rhumatoïde, la fibromyalgie et le syndrome métabolique. « Environ 1 000 patients par an s’y soumettent, et le succès est au rendez-vous », affirme par courriel le Dr Andreas Michalsen, qui dirige une chaire de recherche au sein de cet hôpital. « Je m’explique mal que ce ne soit pas plus répandu sur la planète. » Mais ce n’est pas demain la veille que le traitement se banalisera chez nous. « Il faudra patienter encore au moins 15 ans pour que l’idée fasse son chemin », avance le néphrologue ontarien Jason Fung. Il l’a bien compris quand il a tenté de faire paraître ce qu’on appelle, en jargon médical, une « analyse rétrospective de dossiers » : en gros, il s’agissait de présenter, données à l’appui, les effets du jeûne sur ses patients. Il faut l’autorisation d’un comité d’éthique de la recherche pour publier ce type de document. Une pure formalité, la plupart du temps. Or, on lui a dit non deux fois. « Apparemment, c’est trop nouveau ! Ils craignent que des gens me croient et l’essaient… Mais n’est-ce pas le but de la recherche que de repousser les frontières ? Je ne propose quand même pas de leur administrer du cyanure ! »