Châtelaine (French)

Ma petite révolution : Viviane Nguyen

- ANNE FLEISCHMAN PAR LOUISE SAVOIE PHOTOS

Changer de carrière ? Une sacrée pirouette. En ajouter une autre, ça frise la haute voltige. Notaire de profession, la pâtissière Viviane Nguyen consacre une partie de sa formidable énergie à régaler les enfants allergique­s. Une double vie avec laquelle elle jongle avec bonheur et déterminat­ion. Ce qui a tout déclenché Mon fils Ethan, qui a maintenant 7 ans, a subi un choc anaphylact­ique à l’âge de 10 mois. Un simple contact avec le glaçage d’un gâteau l’a conduit à l’hôpital. On a découvert qu’il était allergique à une quinzaine d’ingrédient­s. Puis, un deuxième choc a fait monter la liste à 30 allergènes. J’ai alors constaté qu’il n’y avait pas une pâtisserie au pays capable de lui confection­ner un gâteau pour son premier anniversai­re. Je me suis donc mise au travail… Le moment où j’ai su que je ferais le grand saut Voir la joie de mon fils devant ce tout premier gâteau m’a décidée à ouvrir une pâtisserie. C’est là que j’ai réalisé que se tartiner la bouche de glaçage est un plaisir auquel tous les petits devraient avoir droit. Ceux qui sont allergique­s et leurs parents vivent énormément d’anxiété et de frustratio­n. Pour un enfant, c’est vraiment triste de se faire tout le temps dire « non ». Mon second métier… N’est pas si différent du premier, malgré les apparences. Les notaires aident leurs clients, donnent des conseils et prévoient les problèmes. C’est aussi ce que j’essaie de faire avec la pâtisserie Petit Lapin. Mes deux métiers se rencontren­t parfois : il m’est déjà arrivé de livrer un gâteau pour une cérémonie de mariage où j’étais la célébrante !

Mon secret pour arriver à tout

mener de front Je suis très organisée et je dors peu, à peine quatre heures par nuit ! C’est dans ma nature – j’adore être occupée. J’ai même ouvert Petit Lapin alors que j’étais enceinte de mon deuxième enfant. Je songe parfois à me consacrer totalement à mon commerce, mais en tant que notaire, j’ai des responsabi­lités envers mes clients. Alors, pour l’instant, je continue sur les deux tableaux.

Je trouve difficile de… Prendre les décisions toute seule. Je n’ai pas encore rencontré de partenaire d’affaires engagé dans la même cause que moi. J’ai également dû mettre un frein à ma vie sociale, car je n’ai plus beaucoup de temps pour les amis. C’est dommage, mais je dois l’accepter.

Etlafamill­e,danstoutça? Elle m’a toujours épaulée. Mon père travaille à la pâtisserie et mon mari dit que je suis Superwoman ! [Rires] Quant à mes enfants, ils sont le centre de mon attention entre l’heure où ils sortent de la garderie et celle du dodo. Je me remets au travail après ! Je consacre aussi des moments particulie­rs à Dustin, mon cadet, qui n’est pas allergique, lui. On en profite pour aller manger à l’extérieur des gâteries qui sont interdites à la maison…

Ce qui m’anime Plus la société sera sensibilis­ée à la question des allergies alimentair­es, mieux ce sera pour mon fils. Réussir à intéresser les gens à ce grave problème de santé est donc très important pour moi.

Ce qui me touche Recevoir des dessins et des lettres d’enfants qui me remercient parce qu’ils peuvent enfin manger des gâteaux. Comme j’ai moi-même le bec sucré, je sais à quel point les desserts peuvent être de petites merveilles.

Comment j’ai pu me lancer dans

l’inconnu J’ai foncé, tout simplement. Je n’ai jamais douté, car j’ai toujours cru en mes intuitions. Mon objectif était clair, même si je n’avais aucune idée de la route à prendre pour m’y rendre ! L’important est d’être en mode « solutions » et de s’adapter. En affaires, il n’y a pas de chemin parfait : chaque fois qu’on rencontre une petite bosse, on monte et on descend, c’est comme les montagnes russes. Ce qui compte, c’est d’y croire fermement et de travailler fort.

Ce que j’ai appris… et que

j’apprends encore À déléguer ! J’ai toujours été perfection­niste, ce qui est à la fois une qualité et un défaut, car j’ai beaucoup de mal à faire confiance. Je souhaite être partout, tout faire, de l’emballage d’un gâteau qui part en livraison à la finition des décoration­s. Je sais à quel point il est indispensa­ble de tout contrôler quand on vit avec un enfant ayant de graves allergies alimentair­es. Le côté « mère poule » est très développé chez moi. Mais maintenant, je n’ai plus le choix, je dois apprendre à laisser faire les autres…

À celles qui veulent changer de vie

profession­nelle, je dirais… On doit choisir un domaine qui nous motive vraiment, se relever quand on tombe, ne jamais se décourager… Il n’y a pas de recette miracle pour devenir entreprene­ure, c’est une expérience faite d’essais et d’erreurs. L’important est de garder son calme et de suivre ses plans. Un problème peut toujours se transforme­r en quelque chose de positif. Enfin, même si on se donne au maximum, il peut arriver qu’on soit incapable de cocher tout ce qu’on avait sur sa liste au début de la journée. Ce n’est pas si grave, il faut aussi savoir se mettre à off. Une leçon que je n’oublierai jamais On ne peut jamais tout prévoir, malgré les précaution­s. Ethan a vécu un troisième choc anaphylact­ique l’an dernier dans un restaurant, heureuseme­nt sans conséquenc­e grave. Ça m’a donné l’idée… d’ouvrir un restaurant.

Un livre qui m’inspire Voir grand, de Luc Poirier. Sa philosophi­e – viser haut et ne jamais dire non à une occasion qui se présente – me rejoint. J’aime la manière dont il conclut son ouvrage en parlant de l’importance de la famille. La mienne est au centre de tout ce que j’entreprend­s.

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