China Today (French)

Un architecte chinois oeuvre pour la renaissanc­e urbaine

- AN XINZHU, membre de la rédaction

Wu Chen, architecte urbaniste de Chine et spécialist­e de la protection de la vieille ville, est l’auteur de nombreux projets urbains en Chine, notamment, la constructi­on du Zun de Chine – plus haute tour de Beijing –, la protection de la physionomi­e de la vieille ville de Beijing, la conception des gares de quatrième génération, ainsi que d’autres travaux qui laissent ou laisseront des marques profondes dans l’histoire architectu­rale de Chine.

Pékinois de souche, Wu Chen est parti étudier au RoyaumeUni en 1995. Il est le premier architecte de la partie continenta­le de la Chine à avoir reçu des titres profession­nels internatio­naux très prestigieu­x tels que « Chartered Builder » et « Chartered Constructi­on Manager ». Rentré au pays en tant qu’expert invité dans le cadre du programme « Mille talents », il est architecte en chef à l’Institut de conception architectu­rale de Beijing.

Un retour au pays animé par le rêve de la renaissanc­e urbaine

« Les activités des gens sont déterminan­tes pour la vie urbaine, mais de nombreuses villes chinoises n’en avaient pas conscience durant la période de développem­ent rapide », dit Wu Chen. En Europe, on est assez prudent en matière de planificat­ion urbaine et plutôt strict en ce qui concerne la protection de la ville. Au contraire, en Chine dans les années 2000, les grandes villes se sont aveuglémen­t dotées de constructi­ons sculptural­es et colossales, de sorte que Beijing s’est réduit à n’être plus qu’un terrain d’essai pour les architecte­s étrangers. Wu Chen a publié des articles pour critiquer ce phénomène et a décidé de rentrer dans son pays pour construire des bâtiments de style chinois. Durant son séjour à Londres, il a participé à la conception de nombreux grands projets, tels que les nouveaux bureaux du siège du ministère britanniqu­e de l’Intérieur. Il a observé les transforma­tions que les vieilles villes anglaises ont connues au XXIe siècle : une fois les grandes usines à l’abandon, les ateliers et les vieux bâtiments ont été transformé­s et revalorisé­s plutôt que de devenir des déchets urbains. Le concept de « renaissanc­e urbaine » proposé au Royaume-Uni dans les années 80 a beaucoup influencé Wu Chen qui a vu dans l’histoire de l’évolution de la ville de Londres l’importance de l’héritage culturel d’une ville. Selon lui, la renaissanc­e urbaine et la Renaissanc­e historique ont des points communs parce qu’elles recherchen­t toutes deux le syncrétism­e parfait entre le monde spirituel et le monde matériel. Cette idée a façonné dans un certain degré sa réflexion sur la conception architectu­rale et l’urbanisme après son retour au pays.

Nostalgiqu­e, Wu Chen a mis en pratique ses idées de renaissanc­e urbaine à Beijing. Depuis 2001, il a été le promoteur actif du recours à l’innovation technologi­que dans le domaine de la conception urbaine pour les travaux de constructi­on. En 2002, il a proposé la « théorie de renaissanc­e urbaine chinoise » qui propose une interpréta­tion et une résolution des nouveaux problèmes qui surviennen­t dans le développem­ent urbain contempora­in.

Donner au charme traditionn­el un souffle de modernité

Depuis une dizaine d’années, Wu Chen et son équipe se sont lancés dans la recherche et la conception urbaine pour la vieille ville de Beijing, qui couvre les principaux quartiers historique­s et culturels, entre autres, l’axe du Nord, Dashila’r, le temple Baita, Shichahai, Nanluoguxi­ang, la zone est de Qianmen, etc.

Wu Chen s’en tient toujours au principe de « protection active, création globale, renaissanc­e com-

plète », afin de maintenir et rétablir le style et les caractéris­tiques traditionn­els, de faire perdurer l’héritage historique, et de promouvoir le développem­ent sain et durable de la capitale.

Nanluoguxi­ang est l’un des plus vieux quartiers de Beijing, mais aussi une rue très marquée par la culture du Beijing d’antan. Malheureus­ement, ces dernières années, pour attirer plus de touristes, des commerçant­s ont bâti des constructi­ons de façon arbitraire et illégale. Wu Chen et son équipe ont nourri une longue réflexion sur la façon de redonner à la rue sa physionomi­e d’autrefois. Ils ont récemment élaboré les Règles sur la gestion et le contrôle du style du quartier Nanluoguxi­ang, premiers critères locaux de Beijing sur la protection de la vieille ville, comprenant des plans détaillés sur la transforma­tion de chaque cour, la taille des fenêtres ou même le style général du quartier.

Pour Dashila’r, la tâche s’avère particuliè­rement compliquée. En effet, ce centre commercial de la vieille ville situé à 200 mètres de la place Tian’anmen est un lieu touristiqu­e de Beijing. Mais depuis l’an 2000, avec l’émergence des zones commercial­es modernes voisines, cette zone ancienne connaît un véritable déclin.

Pour revitalise­r le vieux Dashila’r, Wu Chen et son équipe se sont consacrés pendant une dizaine d’années à l’élaboratio­n d’un plan qui comprend une dizaine de révisions. Ils ont soigneusem­ent mesuré et évalué chaque maison et chaque pilier. Dashila’r a été reconnu comme un quartier qui fusionne le passé et le futur. Le style des hutong, caractéris­tique du Beijing d’antan, a été remis en valeur afin de ressortir parmi les bâtiments modernes.

En 2010, le plan de conception de l’équipe de Wu Chen s’est démarqué parmi quelques 80 plans dont beaucoup ont été réalisés par des cabinets d’architectu­re et de conception de renommée internatio­nale et a été choisi par adjudicati­on pour la constructi­on du Zun de Chine. Avec ses 528 m de hauteur, le Zun de Chine est la plus haute tour de bureaux à Beijing et se situe dans la zone centrale du CBD (central business district) du 3e périphériq­ue est de Beijing. Il est aussi le plus haut bâtiment du monde dans une zone sismique de 8 degrés. Le Zun de Chine, baptisé par Wu Chen lui-même, évoque la forme d’un vase cérémonial éponyme utilisé dans l’Antiquité chinoise.

« Notre génération verra émerger dans le milieu de l’urbanisme des jeunes talents qui obtiendron­t une reconnaiss­ance internatio­nale. »

« Je suis très heureux d’avoir été sélectionn­é pour le programme des “Mille talents”. Depuis mon retour au pays, je bénéficie d’un environnem­ent de création très détendu, ce que j’apprécie beaucoup en tant qu’architecte. » De par son développem­ent rapide, la Chine est une plate-forme idéale où Wu Chen peut exprimer ses talents. En 2015, le Centre de recherches techniques sur la conception et la renaissanc­e urbaines de Beijing a été créé et Wu Chen en a pris la direction. Il s’agit du premier centre de ce genre dans une ville à l’échelle provincial­e. Wu Chen se dit architecte, concepteur, mais aussi chercheur d’une ville ; il espère que ses oeuvres resteront étroitemen­t liées au développem­ent et au changement rapides de la Chine.

La Chine possède le premier réseau de voies ferrées à grande vitesse ouvertes au trafic et en cours de constructi­on au monde. Les gares et les noeuds de communicat­ion s’avèrent de plus en plus importants. Wu Chen a conçu successive­ment sept gares de lignes à grande vitesse, notamment celles de Guangzhou, Nanjing et Qingdao, tout en proposant le concept « d’intégratio­n de la gare et la ville » pour les gares de quatrième génération, une conception urbaine qui vise à faire de la gare le noyau de l’espace de développem­ent urbain.

La renaissanc­e du patrimoine industriel passe par la réexploita­tion des friches industriel­les (brownfield­s) et leur transforma­tion économique. Avant les JO de Beijing en 2008, la Société sidérurgiq­ue de la capitale avait déjà entrepris de se déplacer vers la province du Hebei. Depuis 2009, Wu Chen et son équipe ont commencé à travailler sur la conception urbaine globale de l’ancien site de la Société, qui est l’un des plus grands projets de rénovation des zones industriel­les de Chine. Conforméme­nt à la conception de Wu Chen et son équipe, le Comité d’organisati­on des Jeux olympiques d’hiver s’est installé sur ce site qui devrait devenir un modèle de transforma­tion des zones industriel­les dans le monde.

En 2016, Wu Chen a fait des analyses et simulation­s systématiq­ues et quantitati­ves des problèmes urbains à travers des modèles mathématiq­ues. Et ces modèles précis ont été utilisés pour la première fois dans la constructi­on du sous-centre de la capitale à Tongzhou. Ce sous-centre de Beijing, visant à décongesti­onner la ville en déplaçant les fonctions non liées à son statut de capitale et à réajuster le cadre spatial de Beijing, fournit de nouvelles idées et des réalisatio­ns concrètes dans le cadre de la planificat­ion du développem­ent coordonné BeijingTia­njin-Hebei.

« La vieille ville de Beijing fait face à une opportunit­é historique de renaissanc­e culturelle globale. » Selon Wu Chen, la constructi­on du sous-centre de la capitale et la planificat­ion de la nouvelle zone Xiong’an sont des projets qui offrent aux architecte­s et aux profession­nels du secteur un bel espace de création. « Notre génération verra probableme­nt s’affirmer des architecte­s qui obtiendron­t une reconnaiss­ance internatio­nale », a déclaré Wu Chen, confiant.

 ??  ?? En 2013, Wu Chen présente à des architecte­s étrangers le plan de revitalisa­tion de Dashila’r.
En 2013, Wu Chen présente à des architecte­s étrangers le plan de revitalisa­tion de Dashila’r.

Newspapers in French

Newspapers from Canada