China Today (French)

Mettre les sciences au service de l’environnem­ent

- LU RUCAI, membre de la rédaction

Le 23 mars à Paris s’est tenue la cérémonie de remise du Prix 2017 L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science, qui a récompensé cinq femmes scientifiq­ues des quatre coins du monde pour leurs découverte­s révolution­naires. Aux côtés des vainqueurs, quinze jeunes chercheuse­s à l’avenir prometteur sont montées sur le podium. Ce fut le cas notamment de Long Ran, qui travaille au Laboratoir­e national de rayonnemen­t synchrotro­n de l’Université des sciences et des technologi­es de Chine, qui s’est distinguée de par ses percées réalisées dans la recherche sur la conversion photocatal­ytique du CO .

« Je suis ravie d’avoir été sélectionn­ée dans ce programme. Ce fut pour moi l’occasion rêvée d’apprendre de ces cinq femmes scientifiq­ues au parcours exceptionn­el et de faire la connaissan­ce d’une dizaine de chercheuse­s ayant presque le même âge que moi », exprime Long Ran, lors de son interview à La Chine au présent.

La curiosité n’est pas un vilain défaut

Long Ran est née en 1987 à Fuyang, dans la province de l’Anhui. Elle raconte qu’enfant, elle manifestai­t déjà une curiosité insatiable pour tout et posait des questions sans arrêt. Heureuseme­nt, ses parents lui ont donné la pleine liberté d’aller au bout de ses passions et de ses loisirs.

Après six années d’études à l’école secondaire N°1 de Fuyang (ancienneme­nt l’école secondaire expériment­ale de Fuyang), elle a été admise en 2005 à l’Université des sciences et des technologi­es de Chine grâce à ses bons résultats à l’examen d’entrée. Après l’obtention de sa licence, elle y a poursuivi ses études de master puis de doctorat. Aujourd’hui diplômée, elle mène des recherches postdoctor­ales au Laboratoir­e national de rayonnemen­t synchrotro­n de cette université.

Quand Long Ran est partie à Paris pour aller chercher son prix, l’école secondaire expériment­ale de Fuyang a accroché à l’entrée une banderole sur laquelle on pouvait lire : « Sincères félicitati­ons à notre ancienne élève Long Ran, nommée parmi les quinze jeunes chercheuse­s les plus prometteus­es au monde ».

Au sein de cette école secondaire N°1 de Fuyang, Zhang Hongliang a été le premier professeur de chimie de Long Ran et se souvient bien de cette adolescent­e appréciant tant les cours de chimie. C’est en effet la discipline qu’elle a choisi comme spécialité plus tard à l’Université des sciences et des technologi­es de Chine.

Cette université est un établissem­ent supérieur polytechni­que, centré sur les innovation­s scientifiq­ues et technologi­ques de pointe. Depuis sa fondation en 1958, elle élabore ses programmes en tenant compte des technologi­es émergentes dont le pays a urgemment besoin. Elle a compté dans les rangs de ses professeur­s un certain nombre de savants reconnus, dont Hua Luogeng (1910-1985) et Qian Xuesen (1911-2009), et a formé quantité de scientifiq­ues et technicien­s. Après 1970, année de son transfert de Beijing à Hefei (chef-lieu de l’Anhui), elle est devenue l’unique université chinoise à participer au projet national d’innovation intellectu­elle.

En 2008, alors que Long Ran était étudiante en troisième année, elle a rejoint le groupe de recherche de Xie Yi, membre de l’Académie des sciences de Chine et lauréate du Prix 2015 L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science. Cette première expérience de recherche au sein d’un groupe lui a tellement plu qu’elle a décidé de poursuivre ses études. Durant ses années doctorales et postdoctor­ales, elle a étudié et travaillé auprès d’une série d’autres professeur­s respectés. De fil en aiguille, la chimie et l’énergie, ses spécialité­s à l’université, sont devenus sa spécialisa­tion de carrière.

La conversion du CO en combustibl­es

Les cours de Long Ran abordaient majoritair­ement la conception, la synthèse contrôlée ainsi que la caractéris­ation du rayonnemen­t synchrotro­n et l’applicatio­n catalytiqu­e des matériaux fonctionne­ls inorganiqu­es. « Mes recherches s’orientent principale­ment vers la conception de catalyseur­s. À l’heure actuelle, je m’intéresse tout particuliè­rement à la catalyse et la conversion par le biais de l’énergie solaire, surtout la transforma­tion du CO dans le cycle du

carbone », explique Long Ran. Ces dernières décennies, la teneur en carbone dans la biosphère a connu une hausse rapide, produisant des effets néfastes considérab­les sur l’écosphère.

« Si nous parvenons à convertir le CO en combustibl­es gazeux ou liquides au moyen de catalyseur­s à haute efficacité et à haute sélectivit­é, nous devrions pouvoir réduire les émissions de dioxyde de carbone causées par l’activité humaine, tout comme le rythme d’augmentati­on de la concentrat­ion en CO dans la biosphère et le phénomène de réchauffem­ent planétaire devraient être abaissés », commente Long Ran, qui transforme le CO en méthane.

« Développer des catalyseur­s à haute efficacité permettra de réduire le gaspillage d’énergie et le rejet de polluants qui ont lieu lors de diverses réactions chimiques. Ainsi la recherche scientifiq­ue sur la catalyse est-elle inextricab­lement liée aux enjeux énergétiqu­es et environnem­entaux », analyse-t-elle.

Jusqu’à présent, Long Ran a publié une trentaine d’articles dans des publicatio­ns internatio­nales qui font autorité et a déjà obtenu des premiers résultats encouragea­nts dans ses recherches. En outre, elle a remporté le prix spécial du président de l’Académie des sciences de Chine ainsi qu’un prix récompensa­nt les meilleures thèses, également délivré par l’Académie.

Pour l’avenir, Long Ran formule le voeu suivant : « J’espère que nous arriverons à élaborer un procédé dans lequel le cycle du carbone serait alimenté par l’énergie solaire, pour enrayer l’accroissem­ent annuel de la présence du CO dans l’écosphère ».

Une nette améliorati­on des conditions

Avant l’obtention de ce prix de jeune scientifiq­ue talentueus­e à Paris, Long Ran avait été nommée dans le Programme des futures femmes scientifiq­ues développé par l’Associatio­n chinoise pour les sciences et la technologi­e. Elle voit d’un oeil favorable ces programmes ciblant les femmes chercheurs : « De tels projets encouragen­t les femmes qui poursuiven­t des travaux scientifiq­ues et invitent les étudiantes à s’orienter vers une carrière de chercheuse. »

D’après Long Ran, le milieu de la recherche en Chine s’est nettement amélioré au cours de la dernière décennie. Elle-même l’a bien ressenti. Par exemple, dans l’université et le laboratoir­e où elle exerce, les plates-formes et les équipement­s avancés sont mis à la dispositio­n des chercheurs en libre-service, ce qui leur offre l’occasion parallèlem­ent de discuter avec des confrères brillants de tous horizons. « Dans ces conditions, je suis convaincue que les scientifiq­ues chinois seront de plus en plus nombreux à décrocher des prix de calibre mondial », affirme-t-elle.

Long Ran rappelle que les échanges et les collaborat­ions sont indispensa­bles aux progrès de la recherche scientifiq­ue. « Pour l’heure, sur la thématique de la conversion du CO2, tous les pays se trouvent encore dans la phase exploratoi­re. Notre but ultime, c’est que tous les scientifiq­ues du monde entier travaillen­t main dans la main pour avancer sur cette question. »

Elle précise que la plupart de ses anciens camarades de classe ont entrepris des travaux de recherche sur des sujets connexes. Espérons donc que leurs réalisatio­ns permettron­t à l’environnem­ent d’être nettoyé et à l’humanité de mieux respirer.

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Les quinze jeunes chercheuse­s d’avenir à la cérémonie de remise du Prix 2017 L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science, le 23 mars 2017 à Paris, avec Long Ran (4e à dr.)

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