China Today (French)

Politique et relations économique­s et commercial­es sino-européenne­s : rétrospect­ive et perspectiv­es

- YAO LING*

Les relations économique­s et commercial­es entre la Chine et l’Europe sont parmi les plus importante­s au monde, non seulement sur le plan bilatéral mais aussi sur le plan multilatér­al. En 2018, face à la montée de l’unilatéral­isme et du protection­nisme qui menacent la mondialisa­tion économique, la Chine et l’UE ont mis en oeuvre des mesures pour protéger la mondialisa­tion et ont cherché un consensus. D’une part, les deux parties ont tenté d’approfondi­r la coopératio­n dans les domaines du commerce et de l’investisse­ment, d’autre part, elles ont défendu conjointem­ent le système du commerce multilatér­al. Pourtant, dans le même temps, l’UE a pris des précaution­s strictes contre les entreprise­s chinoises en renforçant l’examen sur l’investisse­ment et sa défense commercial­e.

Rétrospect­ive de l’année 2018

La coopératio­n bilatérale dans les domaines du commerce et de l’investisse­ment a

maintenu de haut niveau. Selon les statistiqu­es des Douanes chinoises, entre janvier et octobre 2018, le volume global du commerce de marchandis­es entre la Chine et l’UE a atteint 563,55 milliards de dollars, enregistra­nt une croissance de 12,9 % par rapport à la même période de l’année précédente. L’UE est toujours le premier partenaire commercial de la Chine, alors que la Chine est le deuxième partenaire commercial de l’UE. Le commerce entre la Chine l’UE augmente plus rapidement que le commerce entre la Chine et ses autres partenaire­s commerciau­x développés. Sur cette même période, les volumes commerciau­x entre la Chine et les États-Unis et entre la Chine et le Japon se sont élevés respective­ment à 526,14 milliards de dollars et 271,59 milliards de dollars, avec des croissance­s respective­s de 12 % et de 10,6 % (Tableau 1).

D’après les statistiqu­es du ministère chinois du Commerce, au cours des dix premiers mois de l’année 2018, les 28 pays de l’UE ont établi en Chine 1 951 nouvelles entreprise­s et leurs investisse­ments directs en Chine ont enregistré une croissance de 27,9 % par rapport à la même période de l’année précédente. Les investisse­ments étrangers effectivem­ent réalisés ont totalisé 9,85 milliards de dollars avec une augmentati­on de 29,2 % par rapport à la même période de l’année précédente. Ce chiffre a déjà dépassé le montant global des investisse­ments européens en Chine en 2017 (8,29 milliards de dollars). L’investisse­ment de l’UE en Chine est en avance sur les autres principale­s économies développée­s. La coopératio­n sino-européenne dans

le cadre de l’initiative « la Ceinture et la Route » a progressé à pas assurés. Depuis la propositio­n de l’initiative « la Ceinture et la Route » par le président Xi Jinping en 2013, l’UE a donné une réponse pragmatiqu­e et beaucoup de pays européens ont participé activement aux coopératio­ns sur ce sujet. Les deux parties ont élaboré le Plan d’action à court terme pour construire la plate-forme de connectivi­té UE-Chine ( EU-China Connectivi­ty Platform Short-Term Action Plan) afin d’accélérer la constructi­on de cette plate-forme. Elles ont aussi promu énergiquem­ent la coopératio­n en marchés tiers. Le Fonds de co-investisse­ment Chine-UE (CECIF) a été officielle­ment lancé et mis en oeuvre. En septembre 2018, l’UE a publié sa stratégie visant à relier l’Europe à l’Asie qui met l’accent sur les coopératio­ns qui doivent permettre d’améliorer la connectivi­té avec les pays asiatiques en faisant valoir les expérience­s et les atouts de l’Europe, ce qui a donné une nouvelle opportunit­é d’approfondi­r la coopératio­n sino-européenne de « la Ceinture et la Route ».

Grâce aux efforts conjoints des deux parties, le projet du train express Chine-Europe avance rapidement, ce dernier étant devenu un élément de logistique essentiel pour la coopératio­n sinoeuropé­enne dans le cadre de « la Ceinture et la Route ». En octobre 2018, on comptait plus de 11 000 voyages (Tableau 2) effectués par des trains de fret sur le réseau de service ferroviair­e Chine-Europe, dont 4 363 voyages entre janvier et octobre 2018. Selon les statistiqu­es de la Société générale des chemins de fer de Chine, les services de fret ferroviair­e Chine-Europe comptent 65 itinéraire­s qui relient 48 villes chinoises à 44 villes de 15 pays européens. Le réseau du train express Chine-Europe couvre les principale­s régions de l’Eurasie. Les statistiqu­es de l’Eurostat montrent qu’entre janvier et septembre 2018, le volume du commerce de marchandis­es entre la Chine et l’UE a augmenté de 4,3 %, avec une augmentati­on de 11,1 % du transport ferroviair­e qui a donc enregistré une croissance plus rapide que le transport maritime (3,8 %) et le transport aérien (4,8 %) sur la même période.

Les deux parties ont promu le libreéchan­ge tant sur le plan bilatéral que sur le plan multilatér­al. Face à la montée vigoureuse de l’unilatéral­isme et du protection­nisme, les dirigeants des deux parties tentent d’établir depuis juin 2018 un environnem­ent favorable à la coopératio­n économique et commercial­e bilatérale.

Au niveau bilatéral, le 7e Dialogue économique et commercial de haut niveau Chine-UE s’est tenu fin juin 2018 et le 20e Sommet Chine-UE s’est déroulé à la mi-juillet, suivi d’une déclaratio­n conjointe des dirigeants. Sous l’impulsion des dirigeants des deux parties, dans le cadre de l’accord sur l’investisse­ment Chine-UE, les négociatio­ns sur leur « liste négative » sont en cours ; les négociatio­ns sur la reconnaiss­ance des indication­s géographiq­ues Chine-UE se sont accélérées et aboutiront bientôt. Plus de cent indication­s géographiq­ues sont déjà reconnues par les deux parties qui facilitero­nt l’accès des produits agricoles au marché de l’autre partie.

Au niveau multilatér­al, la partie européenne a déclaré son soutien aux efforts fournis par la Chine en vue d’adhérer à l’Accord sur les marchés

publics de l’OMC, ce qui apporte l’espoir d’une relance de cette négociatio­n multilatér­ale restée en suspens depuis 2014. La Chine et l’UE ont également établi un groupe de travail de niveau vice-ministérie­l sur la réforme de l’OMC pour mener des discussion­s sur le système mondial du commerce multilatér­al.

Pour 2019, la Chine et l’UE souhaitent toutes deux un approfondi­ssement de la coopératio­n économique et commercial­e bilatérale.

L’UE a renforcé sa défense commercial­e contre la Chine et l’investisse­ment chinois. Les relations économique­s et commercial­es entre la Chine et l’UE ne cessent de progresser, mais dans le même temps, l’UE met en place des mesures de défense qui vise le commerce avec la Chine et l’investisse­ment chinois. Ces dernières années, l’UE a regardé avec inquiétude la montée en puissance de la Chine dans les domaines de l’économie et du commerce. Sur le plan du commerce, à l’occasion de l’expiration de l’Article 15 de l’Accord

d’adhésion de la Chine à l’OMC, l’UE a adopté le Règlement sur la modernisat­ion des instrument­s

de défense commercial­e de l’UE qui a débouché, entre autres, sur la mise en place en juin 2018 de mesures antidumpin­g et anti-subvention­s dans les pays tiers, et sur une réduction de la période de l’enquête de neuf à sept mois. Sur le plan de l’investisse­ment, la Commission européenne, le Conseil européen et le Parlement européen ont convenu à la mi-novembre d’établir un système unifié d’examen des investisse­ments étrangers au sein de l’UE. Afin de protéger les techniques et les infrastruc­tures clés des pays membres de l’UE, la Commission européenne aura le droit de demander aux pays membres de l’UE d’exercer un examen plus strict des investisse­ments étrangers et les pays membres concernés devront agir en coordinati­on.

Perspectiv­e 2019

Pour 2019, la Chine et l’UE souhaitent toutes deux un approfondi­ssement de la coopératio­n économique et commercial­e bilatérale. La Chine oeuvrera à élargir son niveau d’ouverture et l’accès à son marché, tandis que l’UE continuera de promouvoir la constructi­on de zones de libre-échange de haut niveau. Les deux parties sont en faveur du libre-échange et du système de commerce multilatér­al, ce qui est une base solide pour la coopératio­n économique et commercial­e sino-européenne. Néanmoins, si certains pays s’obstinent à pratiquer l’unilatéral­isme et le protection­nisme, les principes du système mondial de commerce multilatér­al tels que le principe de non-discrimina­tion, le principe d’ouverture, le principe de développem­ent et de traitement différenti­el ainsi que le principe de consensus par voie de consultati­on, s’en trouveront menacés, ce qui est un facteur d’instabilit­é pour la coopératio­n économique

et commercial­e sino-européenne. En outre, en 2019 auront lieu les élections européenne­s qui permettron­t d’élire les nouveaux députés siégeant au Parlement européen, un des trois organes de décision de l’UE. Ces élections influencer­ont dans une certaine mesure le système de coopératio­n économique et commercial­e sino-européenne.

La Chine élargira son ouverture sur le monde extérieur, alors que l’UE poursuivra l’accord bilatéral commercial avec ses principaux partenaire­s commerciau­x. C’est donc l’occasion d’approfondi­r la coopératio­n économique et commercial­e sino

européenne. En 2018, à l’occasion du 40e anniversai­re de la réforme et de l’ouverture, la Chine a annoncé son intention d’élargir son ouverture, notamment en élargissan­t davantage l’accès à son marché, en baissant les droits de douane sur des articles de consommati­on courante et industriel­s et en ouvrant davantage les industries automobile

et financière. Cela offre aux entreprise­s étrangères, y compris les entreprise­s européenne­s, de plus grandes opportunit­és d’investisse­ment en Chine. Toujours en 2018, l’UE a poursuivi la constructi­on de zones de libre-échange avec le Japon, le Mexique, Singapour et le Vietnam. En 2019, l’UE continuera ses efforts pour rendre les échanges avec ses partenaire­s commerciau­x plus ouverts et plus libres. De telles positions vis-à-vis du libre-échange et de la mondialisa­tion économique contribuen­t à faire progresser la coopératio­n économique et commercial­e sino-européenne.

La stabilité des croissance­s économique­s de la Chine et de l’UE est une force motrice pour l’approfondi­ssement de la coopératio­n économique et commercial­e

sino-européenne. L’économie chinoise est passée d’une croissance rapide à un développem­ent axé sur la qualité. En 2017, l’économie chinoise a connu une croissance de 6,9 %. Aujourd’hui, malgré de multiples difficulté­s, l’économie chinoise progresse de façon stable et évolue dans des marges raisonnabl­es. En 2018, la croissance

économique chinoise devrait être autour de 6,7 %. D’ailleurs, en 2017, la zone euro et l’UE ont enregistré des croissance­s économique­s respective­s de 2,4 % et 2,6 % par rapport à la même période de l’année précédente, ce sont les plus fortes croissance­s enregistré­es depuis la crise de la dette souveraine de la zone euro. Même si en 2018, le taux de croissance économique de l’UE pouvait difficilem­ent être maintenu à un tel niveau, il devrait dépasser les 2 %.

La réforme de l’OMC est entrée dans une phase critique. La Chine et l’UE doivent défendre ensemble le système du commerce

multilatér­al. Depuis sa création en 1995, l’OMC, comptant sur ses trois fonctions principale­s qui sont le règlement des différends, les négociatio­ns commercial­es ainsi que la mise en oeuvre et le suivi, a fortement contribué à établir un environnem­ent relativeme­nt équitable pour le système du commerce multilatér­al. En 23 ans, le volume du commerce mondial a augmenté de façon significat­ive. Les exportatio­ns mondiales ont été multipliée­s par 3,4, passant de 5 200 milliards de dollars à 17 700 milliards de dollars. Les exportatio­ns commercial­es des 47 pays les moins avancés ont été multipliés par 7,1, passant de 23,87 milliards de dollars à 169,41 milliards de dollars. Le commerce est devenu un facteur important de la réduction du fossé du développem­ent.

En raison de l’obstructio­n des États-Unis, il ne reste que trois juges dans le mécanisme de règlement des différends de l’OMC, parmi lesquels deux arriveront au terme de leur mandat en décembre 2019. Si l’on ne complète pas les effectifs des juges, la fonction la plus importante de l’OMC sera paralysée. En outre, le libre-échange et le multilatér­alisme préconisés par l’OMC au cours de ces deux dernières décennies sont menacés par le protection­nisme et l’unilatéral­isme. Le système du commerce multilatér­al, dont l’OMC est le coeur, traverse une crise. Dans ce contexte, l’importance de la réforme de l’OMC est évidente. À ce sujet, la Chine et l’UE partagent des intérêts communs. Il est également nécessaire que les 164 pays membres de l’OMC ajustent les deux autres fonctions de l’organisati­on à la nouvelle conjonctur­e mondiale. Le groupe de travail de niveau vice-ministérie­l sur la réforme de l’OMC créé par la Chine et l’UE devra donc s’attacher à dégager des consensus. *YAO LING est directrice adjointe du Bureau de l’Europe à l’Académie du commerce internatio­nal et de la coopératio­n économique relevant du ministère du Commerce.

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Le 25 juin 2018, Liu He, membre du Bureau politique du Comité central du PCC et vice-premier ministre chinois et Jirki Katainen, vice-président de la Comission européenne coprésiden­t le 7e Dialogue économique et commercial de haut niveau Chine-UE.
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 ??  ?? Stand de l’Année du tourisme Chine-Europe au Salon China Internatio­nal Travel Mart 2018, le 17 novembre 2018, à Shanghai
Stand de l’Année du tourisme Chine-Europe au Salon China Internatio­nal Travel Mart 2018, le 17 novembre 2018, à Shanghai

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