China Today (French)

L’Expo 2019 Beijing promeut le développem­ent durable

- VERENA MENZEL, membre de la rédaction

Développem­ent économique fulgurant, mondialisa­tion des activités commercial­es et urbanisati­on rapide d’une part ; protection de l’environnem­ent et du climat, développem­ent durable, création et préservati­on d’un environnem­ent de vie vert de l’autre ; voici une contradict­ion qui donne du grain à moudre aux

écrivains de notre temps, aux médias et à l’opinion publique.

Pourtant, la nécessité du progrès social et économique et le développem­ent vert ne sont pas nécessaire­ment deux tendances incompatib­les. Au contraire, elles se nourrissen­t mutuelleme­nt car en réalité la recherche de durabilité et la protection de

l’environnem­ent renferment beaucoup d’opportunit­és commercial­es et un fort potentiel de développem­ent économique, en particulie­r lorsqu’elles sont soutenues par des mesures politiques favorables. L’Exposition internatio­nale horticole qui se tient à Beijing (Expo 2019 Beijing) jusqu’au 7 octobre sur le thème « Vivre vert, vivre mieux » donne un exemple parlant. Sur une surface d’exposition de plus de 500 ha, 110 pays et organisati­ons internatio­nales sont venus échanger leurs idées et leurs visions d’un mode de vie urbain vert.

Le rêve d’un paysagiste néerlandai­s

Le Néerlandai­s Bert Dautzenber­g gagne aujourd’hui sa vie grâce à une entreprise dans le secteur du développem­ent durable qu’il a montée en Chine. Installé dans ce pays depuis déjà 10 ans, ce paysagiste a développé un système de toits et de revêtement­s écologique­s basé sur le principe des « villes éponges » qui a été breveté. Ces réservoirs d’eau suspendus qui font penser à un tapis végétal, absorbent l’eau comme une éponge, apportant des solutions à certains problèmes que connaissen­t les grandes villes, notamment la pénurie d’eau, la pollution de l’air ou encore la forte demande énergétiqu­e induite par les besoins en climatisat­ion des bâtiments. Autant de défis que la ville hôte de l’Expo 2019 Beijing doit elle aussi relever. Ce n’est donc pas un hasard si les solutions très simples mais efficaces imaginées par Dautzenber­g pour une meilleure utilisatio­n des eaux de pluie ont un espace d’exposition à part entière au sein du jardin hollandais.

La Hollande est un poids lourd dans le secteur de l’horticultu­re, principale­ment en matière de commerce internatio­nal de fleurs coupées, elle est donc naturellem­ent représenté­e à l’Expo 2019 Beijing où elle a son propre pavillon. En 2018, le pays a exporté à l’internatio­nal l’équivalent de 3,7 milliards d’euros de fleurs coupées, et contrairem­ent aux idées reçues, il ne s’agit pas seulement de tulipes.

« En Chine, nous nous focalisons sur le secteur de la culture sous serre, avec un accent particulie­r sur l’applicatio­n des nouvelles technologi­es à l’horticultu­re », explique Wouter Verhey, conseiller agricole à l’ambassade des Pays-Bas à Beijing. « Nous dirigeons ici en Chine toutes sortes de grands projets modernes nécessitan­t de forts investisse­ments et basés sur des technologi­es de pointe. »

« Ce qui fait la particular­ité du marché chinois, selon Verhey, c’est sa dynamique et le fait que les Chinois soient très enthousias­tes et réceptifs aux nouvelles technologi­es. Ici, les gens sont extrêmemen­t avides d’apprendre, et cela se traduit par un développem­ent très rapide du secteur horticole en Chine », explique l’expert agricole et horticole.

Dautzenber­g a été témoin des progrès réalisés par la Chine dans le secteur cette année. « Autrefois, cela se limitait souvent à reverdir les villes le plus rapidement possible. L’aspect visuel était souvent secondaire. Désormais, on constate une véritable évolution vers la qualité », ajoute-t-il. Le gouverneme­nt a également joué un rôle en faveur du développem­ent durable. « Le président chinois Xi Jinping a toujours réaffirmé l’importance de l’écologie. Je pense que sous son gouverneme­nt, il y a des chances pour que les choses bougent en matière de développem­ent vert », affirme Dautzenber­g.

Pour le Néerlandai­s, le développem­ent durable des villes n’est pas seulement une passion mais aussi un secteur qui offre de belles perspectiv­es profession­nelles. Il a fondé en Chine sa propre entreprise de réservoirs d’eau, Hanging Water Tank, et a déjà testé avec succès ses revêtement­s écologique­s dans des projets pilotes menés dans des métropoles chinoises aux climats différents comme Dalian, Shenzhen et Beijing. Il espère maintenant que cela pourra être reproduit à grande échelle. Pour lui, l’Expo 2019 Beijing est une opportunit­é pour faire prendre conscience aux gens de l’importance de l’écologie dans les villes.

La coopératio­n sino-allemande

À seulement quelques pas du jardin hollandais se trouve le pavillon allemand.

On le repère de loin en raison de sa structure en bois qui attire les regards. En se rapprochan­t, on se rend compte non seulement que les barres en bois verticales qui composent la façade extérieure sont garnies de pots contenant des plantes ornemental­es, des fruits ou encore des légumes, mais aussi que certaines parties de la façade extérieure tournent et peuvent changer de position. Hans-Joachim Fuchtel,

secrétaire d’État parlementa­ire du ministère fédéral de l’Alimentati­on et de l’Agricultur­e et membre du Bundestag nous explique qu’il s’agit d’un système de balcon intelligen­t informatis­é. Ce dernier est venu à Beijing tout spécialeme­nt pour l’Expo 2019 Beijing.

« À long terme, la culture de fruits et légumes ne pourra se limiter aux surfaces plates. L’agricultur­e urbaine est donc une des pistes que nous voulons mettre en valeur pendant cette exposition », explique Fuchtel. Ces balcons intelligen­ts développés par des ingénieurs allemands permettent de cultiver des fruits et légumes sur les murs des bâtiments. « Nous voulons présenter ici à Beijing des idées de constructi­on alternativ­es particuliè­rement pertinente­s pour un pays comme la Chine où l’espace urbain comprend majoritair­ement des constructi­ons en hauteur. »

Outre les balcons intelligen­ts, le pavillon allemand présente une ribambelle d’inventions en lien avec le développem­ent durable, toutes plus étonnantes les unes que les autres. À l’intérieur, on peut découvrir une panoplie d’objets du quotidien imaginés par des créateurs allemands sensés apporter un peu de durabilité dans votre panier. On trouve par exemple des bottes en caoutchouc garanties imperméabl­es fabriquées avec du maïs, des chaussures très tendances, au style naturel, fabriquées à partir de champignon­s, et pour les hipsters, des baskets au café qui, en plus d’être stylées, dégagent un arôme de café. Ces chaussures bio sont fabriquées à Garching, près de Munich, par la petite entreprise créative K&T GmbH.

Pas assez délirant ? Que pensez-vous des pneus en caoutchouc fabriqués avec du pissenlit par l’entreprise Continenta­l Reifen Deutschlan­d GmbH à Hanovre, des pots de fleur et des tasses à café biodégrada­bles fabriqués avec des coques de graines de tournesol par l’entreprise Golden Compound à Ladbergen en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, ou encore des étuis à lunettes vitaminés fabriqués avec de la peau d’orange par la créatrice de Düsseldorf Elise Esser ?

Certes, le jour où ces produits inonderont le marché est encore loin, mais les exposants allemands ont le mérite de montrer tout ce que l’on peut créer lorsqu’on a le courage de faire marcher son imaginatio­n.

Dans le domaine de l’agricultur­e, de nombreux produits « Made in Germany » fournissen­t déjà aux gens des solutions pour mener une vie plus respectueu­se de l’environnem­ent. Or en Chine, le secteur de l’agricultur­e est un secteur économique particuliè­rement important puisque le pays doit nourrir une population de 1,3 milliard d’habitants.

D’après les informatio­ns collectées dans le pavillon allemand, en Allemagne, un agriculteu­r sur dix utilise déjà un drone pour optimiser ses rendements agricoles. Outre le fait que ce soit une solution pour protéger les animaux du fauchage, l’analyse des images enregistré­es par des drones fournit des informatio­ns précieuses sur les besoins en fertilisat­ion ou en irrigation des terres ainsi que sur la période de récoltes. Les drones modernes rendent donc déjà possible la pratique d’une agricultur­e plus durable, basée sur une moindre utilisatio­n des engrais, donc plus respectueu­se des animaux et des plantes. En matière d’innovation technique appliquée à l’agricultur­e, il existe pour la Chine et l’Allemagne un riche potentiel de coopératio­n industriel­le.

« La Chine est aussi très avancée en ce qui concerne le développem­ent des drones. Dans ce domaine, il existe déjà d’étroites coopératio­ns entre nos deux pays qui reposent largement sur la réciprocit­é », indique Fuchtel.

Pour Fuchtel, l’Expo 2019 Beijing est une importante plate-forme d’échanges d’idées. « Nous voulons entre autre mettre l’accent sur le fait que les technologi­es de l’informatio­n peuvent et doivent aussi servir les objectifs du développem­ent durable. Une exposition comme celle qui se tient ici à Beijing contribue de toute évidence à faire naître de nouvelles idées », affirme l’homme politique.

Mais l’exposition est également un événement très important pour les entreprene­urs allemands. « Le secteur agricole allemand destine actuelleme­nt un tiers de ses produits à l’exportatio­n. Et la Chine est une destinatio­n essentiell­e, en particulie­r en ce qui concerne l’exportatio­n de viande. Et c’est là que l’offre allemande et la demande chinoise sont complément­aires. »

D’une manière générale, le député se montre très optimiste quant au futur de la coopératio­n verte entre l’Allemagne et la Chine. « Je me réjouis que

Xi Jinping ait mis l’accent sur le développem­ent durable dans son récent discours lors du Forum de ‘‘la Ceinture et la Route’’ pour la coopératio­n internatio­nale. Cela va dans le sens de l’Agenda 2030 pour

le développem­ent durable de l’ONU. Je ne peux que l’approuver car pour parvenir à relever les défis auxquels nous devons faire face et apporter plus de durabilité dans nos modes de vie, il est nécessaire de renforcer la sensibilis­ation », déclare-t-il. « Le monde entier est ici à Beijing pour cette exposition, toutes les conditions sont donc réunies pour nourrir le dialogue sur les questions du développem­ent durable. »

Les effets bénéfiques des plantes sur la santé

Au pavillon britanniqu­e qui se trouve à quelques minutes au nord du pavillon allemand, l’exposition est également considérée comme une belle opportunit­é de renforcer les échanges mutuels.

Sara Everett, commissair­e générale du Départemen­t du commerce internatio­nal britanniqu­e et chef de projet de la participat­ion du Royaume-Uni à l’Expo 2019 Beijing, explique : « Nous voulons que cette exposition serve de plate-forme favorisant le contact entre les experts britanniqu­es et chinois et qu’elle nous permette de montrer à nos partenaire­s chinois ce que nous faisons en Grande-Bretagne et vice-versa, cela dans le but de renforcer nos relations. Ainsi, dans les prochains mois nous allons organiser au sein du pavillon britanniqu­e toute une série d’événements sur le thème du développem­ent urbain vert qui est d’ailleurs le thème de l’exposition cette année. »

Pour la conception du jardin du pavillon britanniqu­e, Everett explique qu’elle a choisi de mélanger des plantes très variées. Des roses, de la lavande, du jasmin et toutes sortes d’herbes – les parterres rassemblen­t les plantes les plus différente­s qui soient et le bénéfice pour les citadins est double.

« D’un côté, nous voulons montrer aux gens comment ils peuvent faire pousser eux-mêmes les plantes qu’ils voient dans le jardin de l’exposition, par exemple sur les espaces en friche de leur propre communauté. D’un autre côté, nous voulons leur montrer qu’en utilisant ces plantes dans l’alimentati­on ou la préparatio­n de produits naturels, ils profiteron­t de leurs bienfaits et mèneront une vie plus saine », explique-t-elle.

Ainsi, la commissair­e britanniqu­e insiste sur le fait que les plantes ne représente­nt pas seulement une valeur marchande tangible ou la matière première de produits verts mais qu’elles véhiculent aussi un idéal pour la cohabitati­on humaine. Les vertus de ces plantes peuvent être particuliè­rement bénéfiques aux citadins stressés. « Un jardin bien entretenu contribue à la santé physique et mentale de l’être humain – les effets bénéfiques sur la santé que l’on attribue au jardin, par exemple à l’extérieur d’un cadre hospitalie­r, a déjà été démontré dans diverses études médicales et scientifiq­ues », poursuit Everett.

Et justement, en ce qui concerne les effets bénéfiques des plantes sur la santé, la spécialist­e en horticultu­re entrevoit un large potentiel pour la coopératio­n bilatérale, non seulement sur le plan scientifiq­ue mais aussi sur le plan économique. Cela vaut par exemple pour la médecine traditionn­elle chinoise. « Le recours à des remèdes naturels pour soigner les maladies est de plus en plus à la mode en Grande-Bretagne. Nous avons une forte demande et la Chine a beaucoup à nous apprendre dans ce domaine », affirme-t-elle.

Vers une coopératio­n fructueuse

Wouter Verhey, Hans-Joachim Fuchtel, Sara Everett, tous confirment que les liens avec la Chine en matière d’horticultu­re ne cessent de se resserrer, tant sur le plan scientifiq­ue que sur le plan économique.

Mais pour Bert Dautzenber­g, paysagiste et créateur d’entreprise­s habitué des échanges intercultu­rels, le secret d’une coopératio­n fructueuse tient dans l’établissem­ent de relations amicales fortes et d’une confiance réciproque. C’est ce mélange qui constitue le terrain favorable pour avancer ensemble et trouver des réponses aux grandes questions de notre époque sur le développem­ent durable, qui, en fin de compte, concernent tous les pays du monde.

« L’expérience que j’ai acquise au cours de toutes ces années m’a appris une chose : là où il y a du contact humain et de l’amitié, les choses avancent. Et pour obtenir quelque chose, il faut constammen­t donner », confie le Néerlandai­s.

Et parfois, on réalise en y regardant de plus près que des pays aussi éloignés que la Chine et la Hollande sont à bien des égards plus proches qu’on ne pourrait le penser. « La surface agricole disponible par habitant est presque la même aux Pays-Bas qu’en Chine », déclare Wouter Verhey. « Et pour ce qui est du rendement par habitant, nous devons gérer la même pression que la Chine dans les régions agricoles et nous sommes donc confrontés aux mêmes problèmes. »

Sara Everett confirme elle aussi que l’exposition est une plate-forme de rencontre : « Ce qui est formidable avec cette exposition horticole, c’est que nous sommes tous là physiqueme­nt. Nous pouvons nous rencontrer, discuter et nous présenter nos produits les uns aux autres. » Reste donc à savoir quels semences germeront de ce dialogue en direct de Beijing et quels fruits de coopératio­n pousseront avant la fin de cette exposition.

 ??  ?? Conçu autour du concept « Semons le futur », le pavillon allemand a pour objectif de présenter la contributi­on de l’horticultu­re moderne et des technologi­es avancées au développem­ent durable des villes, tout en démontrant l’importance de l’horticultu­re dans la vie moderne à travers les matières premières et produits renouvelab­les.
Conçu autour du concept « Semons le futur », le pavillon allemand a pour objectif de présenter la contributi­on de l’horticultu­re moderne et des technologi­es avancées au développem­ent durable des villes, tout en démontrant l’importance de l’horticultu­re dans la vie moderne à travers les matières premières et produits renouvelab­les.
 ??  ?? Le pavillon allemand expose des objets fabriqués à partir de matières naturelles ou biodégrada­bles, par exemple ces bottes confection­nées à partir de maïs.
Le pavillon allemand expose des objets fabriqués à partir de matières naturelles ou biodégrada­bles, par exemple ces bottes confection­nées à partir de maïs.
 ??  ?? Le pavillon des Pays-Bas à l’Expo 2019 Beijing
Le pavillon des Pays-Bas à l’Expo 2019 Beijing

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