China Today (French)

Au bout du compte : le gagnant-gagnant

- LU SHAYE*

L’année 2019 marque le 6e anniversai­re de l’initiative « la Ceinture et la Route ». Depuis six ans, cette initiative est devenue l’un des biens communs les plus populaires au monde. Et pourtant, à l’étranger, et notamment en Occident, subsistent encore nombre de malentendu­s et de doutes à ce sujet. Permettezm­oi donc de saisir cette occasion pour faire quelques observatio­ns.

On entend dire que le manque de transparen­ce dans la co-constructi­on de « la Ceinture et de la Route » est un moyen pour la Chine de masquer ses ambitions géopolitiq­ues. Il me faut donc rappeler ici que « la Ceinture et la Route » est une initiative dont la vocation première est le développem­ent. À l’origine, elle est née pour favoriser

l’ouverture de l’Ouest de la Chine et permettre aux régions enclavées de l’intérieur du pays de devenir des avant-postes de l’ouverture, pour créer ainsi de nouveaux relais de croissance en faveur des économies locales. Or, il se trouve que cette initiative était parfaiteme­nt en ligne avec les besoins de coopératio­n des pays d’Asie et d’Europe, ainsi que de nombreux pays en développem­ent d’Asie et d’Afrique. 137 pays et 30 organisati­ons internatio­nales ont signé avec la Chine plus de 190 documents sur cette initiative. Selon certains, la Chine dissimuler­ait délibéréme­nt le contenu des documents liés à la constructi­on conjointe de « la Ceinture et la Route ». En fait, nous n’avons rien à cacher et ces documents ne sont que des documents de principes exprimant le souhait des parties de coopérer. Peut-être que certains partenaire­s ne souhaitent pas les rendre publics. Mais, si un jour la Chine et la France signent un mémorandum d’entente sur l’initiative, surtout si c’est le voeu de la France, la Chine le publiera. En ce qui concerne les projets commerciau­x liés à « la Ceinture et la Route », c’est aux responsabl­es des projets de décider des modalités de leur diffusion.

J’entends aussi des critiques sur l’initiative, l’accusant de précipiter les pays riverains dans le « piège de la dette ». Mais, ces pays sont surtout englués dans les pièges du sous-développem­ent et de la pauvreté, et non pas dans celui de la dette. Au reste, ce sont les pays concernés et leurs peuples qui sont les mieux placés pour donner un avis sur l’initiative « la Ceinture et la Route ». Mahinda Rajapakse, premier ministre du Sri-Lanka, qui se trouve justement au coeur de la tourmente du « piège de la dette », a déclaré dans une interview le 7 décembre dernier, qu’il ne croyait pas à cette histoire de « piège de la dette ». Toute la série de grands projets de développem­ent, y compris celui du port d’Hambantota, sont prometteur­s et permettron­t parfaiteme­nt de rembourser les crédits qui leurs ont été alloués. Parmi les projets du Corridor économique sino-pakistanai­s, plus de 80 % ont été financés par des investisse­ments directs chinois ou par des aides sans contrepart­ie de Chine. À peine 20 % de ces projets ont bénéficié de crédits chinois. Selon les statistiqu­es pakistanai­ses, la dette liée au Corridor économique sino-pakistanai­s s’élèverait à 4,9 milliards de dollars, soit moins d’un dixième de la dette extérieure totale du Pakistan. À ce jour, aucun pays n’est tombé dans le « piège de la dette » à cause de sa participat­ion à l’initiative « la Ceinture et la Route ». Bien au contraire, de nombreux pays, parce qu’ils travaillen­t avec la Chine et s’inspirent de ses méthodes de lutte contre la pauvreté, sont en train de sortir du « piège de la pauvreté ». Au cours des six dernières années, le commerce de marchandis­es entre la Chine et les pays riverains a totalisé plus de 7 500 milliards de dollars. Selon une étude de la Banque mondiale, l’initiative « la Ceinture et la Route » permettra à 7,6 millions de gens de sortir de l’extrême pauvreté et à 32 millions d’autres de sortir de la moyenne pauvreté. En outre, le volume de leurs échanges commerciau­x devrait augmenter entre 2,8 % et 9,7 %.

D’autres encore craignent que la Chine n’utilise l’initiative que pour diviser l’UE et mieux y régner. Crainte ô combien inutile ! Pour la Chine, l’UE est un partenaire stratégiqu­e global, et non un concurrent. D’ailleurs, la Chine invite l’UE et les pays européens à participer activement à la co-constructi­on de « la Ceinture et la Route » pour en faire une route de paix, de prospérité, d’ouverture, d’innovation, de civilisati­on, d’écologie et d’intégrité. Récemment, le président Xi Jinping et le premier ministre Li Keqiang, invités par les dirigeants des grandes instances européenne­s, Charles Michel et Ursula von der Leyen dans des entretiens téléphoniq­ues, ont tous deux

réaffirmé le plein soutien de la Chine à l’intégratio­n européenne. Il faut dire que, parmi tous les grands acteurs mondiaux en dehors de la région, c’est la Chine qui a la politique la plus constante et la plus stable à l’égard de l’UE. Ce n’est que par un développem­ent commun de tous les pays de l’UE qu’elle réalisera véritablem­ent son unité et son indépendan­ce. La Chine a toujours aidé l’UE par des actions concrètes et a toujours souhaité la renforcer en favorisant, en son sein, un développem­ent équilibré. Ainsi, lorsque la Grèce a été frappée par la crise européenne de la dette, nous sommes venus à son secours. Réalisatio­n majeure de l’initiative « la Ceinture et la Route », le port du Pirée est devenu aujourd’hui l’un des plus grands ports de la Méditerran­ée. Cette coopératio­n Chine-PECO se poursuivra dans le cadre des relations Chine-UE.

Certains se demandent aussi quel peut bien être l’intérêt de participer à une telle initiative ? Le principal intérêt, c’est d’offrir à l’Europe davantage d’opportunit­és d’investisse­ment, de marché et de coopératio­n pour son développem­ent. C’est aussi de pouvoir relier efficaceme­nt l’initiative avec les programmes d’investisse­ment européens et sa Stratégie d’interconne­xion eurasiatiq­ue, de faire jouer nos complément­arités et d’accélérer l’osmose entre la sphère économique asiatique et la sphère économique européenne. La ligne de chemin de fer Chine-Europe qui traverse 55 villes des 18 pays européens a déjà fait circuler sur ses voies plus de 20 000 convois. Les chiffres du Centre for Economic Policy Research (CEPR) montrent que l’améliorati­on des infrastruc­tures générée par l’initiative « la Ceinture et la Route » devrait entraîner une réduction du coût des échanges mondiaux et des temps de transport, en moyenne de 2,2 % et 2,5 %.

Par ailleurs, la participat­ion à l’initiative est utile à la défense du multilatér­alisme, puisque ses principes directeurs sont la concertati­on, la synergie et le partage, et qu’elle incarne le concept de coopératio­n internatio­nale marqué par le respect mutuel, la justice, l’équité et la coopératio­n gagnantgag­nant. Elle est l’illustrati­on d’un attachemen­t à une économie mondiale ouverte et elle est propice à une mondialisa­tion économique plus ouverte, plus inclusive, plus profitable, plus équilibrée et plus avantageus­e pour tous. Dans le climat actuel d’unilatéral­isme et de protection­nisme forcenés, construire conjointem­ent l’initiative « la Ceinture et de la Route » est en soi l’expression d’une adhésion forte au multilatér­alisme, en même temps que du souci de rechercher des pistes de réforme pour une meilleure gouvernanc­e mondiale et pour une plus grande facilitati­on du commerce et de l’investisse­ment.

La Chine et l’UE se situent aux antipodes du continent eurasiatiq­ue. Cet espace continenta­l est d’une importance majeure au regard de la co-constructi­on de l’initiative « la Ceinture et la Route ». Considéran­t l’influence grandissan­te de l’initiative en France et en Europe, les conditions pour des coopératio­ns pragmatiqu­es sont en train de mûrir. Naturellem­ent, compte tenu des grandes différence­s politiques, économique­s et culturelle­s qui existent entre la Chine et l’UE, il est normal d’avoir, çà et là, des perception­s différente­s sur l’initiative « la Ceinture et la Route ». Mais l’essentiel est d’avancer sur ce qui nous rassemble, en laissant de côté nos divergence­s. Nous devons renforcer la confiance mutuelle et rechercher des solutions gagnantgag­nant.

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Le parc scientifiq­ue et technologi­que d’agricultur­e sino-français à Meishan, au Sichuan
La Cité interdite Le parc scientifiq­ue et technologi­que d’agricultur­e sino-français à Meishan, au Sichuan
 ??  ?? Le 28 décembre 2019, la chaîne de production du projet de production de PVC Navoy en Ouzbékista­n
Le 28 décembre 2019, la chaîne de production du projet de production de PVC Navoy en Ouzbékista­n
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Le chantier de constructi­on de la raffinerie Azur au Koweït le 12 décembre 2019, dans le gouvernora­t d’Al Ahmadi, au Koweït

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