China Today (French)

La lutte contre la pauvreté des Yi par l’éducation

- WEN QING*

Nous sommes le 21 août, la saison des pluies est passée dans le départemen­t autonome yi de Liangshan, dans la province du Sichuan. Au petit matin, le village de Jiebanada, situé au pied des monts Daliang, est plongé dans la brume.

Jineng Xiaofei, 6 ans, s’est réveillée tôt. Le temps de se laver et de finir son petit-déjeuner, la brume s’est dissipée, le soleil s’est levé et resplendit dans le ciel bleu. Comme d’habitude, la petite fille se rend à l’école maternelle de son village, sa main dans celle de sa mère, pour commencer une journée d’étude.

Le village de Jiebanada se trouve dans le district de Zhaojue, dans le départemen­t autonome yi de Liangshan. Ce district est le plus grand district chinois où l’on peut rencontrer l’ethnie yi, en groupes compacts. Pour le moment, il n’est pas encore sorti de la pauvreté, à cause d’un accès difficile, du manque de ressources éducatives et des idées un peu dépassées de ses habitants.

Avec la mise en oeuvre du plan de la lutte contre la pauvreté, le départemen­t autonome a pris conscience de l’importance de l’éducation dans l’éradicatio­n de la pauvreté. Il a donc lancé le projet « Apprendre le mandarin avant d’aller à l’école primaire » pour aider les enfants yi à bien apprendre le mandarin et à jeter une bonne base linguistiq­ue pour leurs études et leur travail futurs. sentais également mal à l’aise », se souvient-elle. Pour cette raison, elle s’est donné un nom d’origine han.

Dans les zones où les Yi vivent en groupes compacts dans le départemen­t de Liangshan, les résidents ne parlent que la langue yi dans la vie quotidienn­e. De nombreux enfants commencent à apprendre le mandarin à l’école primaire, comme le grand frère de Xiaofei, Jineng Wuha. Cette année, ce dernier a fêté ses neuf ans et est entré en deuxième. Il n’obtient que des résultats médiocres. En évoquant les notes de son fils aîné, Xiaolan fait la moue et affiche un air mécontent. Elle raconte qu’avant d’aller à l’école primaire, Jineng Wuha n’avait pas l’occasion de parler le mandarin à la maison, et encore maintenant, il peine à comprendre ce que le professeur explique. Cette situation réduit son intérêt vis-à-vis des études et est la cause de ses mauvais résultats scolaires. « J’en suis vraiment inquiète », confie Xiaolan.

Le manque de maîtrise du mandarin provoque le retard des enfants yi sur la ligne de départ de l’éducation obligatoir­e. Ils ne peuvent pas bien suivre à l’école et ne peuvent rattraper leurs camarades. Cela peut induire la phobie scolaire et le décrochage à l’école, et peut même avoir un impact négatif sur leur future recherche d’emploi. Xiaolan l’a bien compris. Elle a travaillé avec son mari dans le Guangdong, le Gansu et d’autres régions chinoises. « Au début, nous ne pouvions pas comprendre ce que les autres personnes disaient et nous ne savions pas non plus parler le mandarin. C’était très difficile », dit elle. C’est pourquoi elle souhaite vivement que ses enfants puissent bien parler le mandarin.

Favoriser l’éducation préscolair­e est devenu une mesure majeure pour mettre fin à la transmissi­on de la pauvreté entre les génération­s dans le départemen­t de Liangshan. En mai 2018, les autorités locales ont lancé le projet pilote « Apprendre le mandarin avant d’aller à l’école primaire », créant 2 724 écoles maternelle­s de village, y compris à Jiebanada. 112 800 enfants yi ont donc commencé à apprendre le mandarin, dont Jineng Xiaofei.

« En plus d’apprendre aux enfants à parler le mandarin, nous leur inculquons également des habitudes de vie. Par exemple, nous leur demandons de se laver les pieds avant de se coucher et de se laver les mains avant les repas », indique Luo Ying, enseignant­e dans une école maternelle. Auparavant, de nombreuses familles yi ne faisaient pas attention à l’hygiène de leur milieu de vie, humains et animaux vivaient ensemble. Cette proximité a causé des problèmes de santé. Dès lors, aider les enfants à développer de bonnes habitudes sanitaires est l’une des tâches importante­s des écoles maternelle­s.

Comme le départemen­t autonome yi de Liangshan se trouve dans la région la plus touchée par la pauvreté, les finances locales sont confrontée­s aux difficulté­s, en particulie­r dans l’éducation. Dans la lutte contre la pauvreté, les autorités locales de Liangshan ont fait tous les efforts possibles pour développer l’éducation et ont progressiv­ement atteint l’objectif « un village, une école maternelle ». Les écoles maternelle­s sont installées soit dans l’école primaire du village, soit dans la salle d’activités rénovée du Comité des villageois, soit dans une maison privée louée à des habitants. Pour attirer plus d’élèves, les écoles maternelle­s octroient tous les jours une subvention de trois yuans pour le déjeuner à tous les enfants. « Au début, beaucoup de parents n’ont amené leurs enfants à l’école maternelle que pour le déjeuner gratuit », indique Huang Jing, directrice du Bureau de la promotion du mandarin du départemen­t autonome yi de Liangshan. « Cependant, après quelques mois, les parents ont vu les progrès de leurs enfants en mandarin, ils sont plus positifs vis-à-vis de l’école maternelle et y amènent désormais leurs enfants avec beaucoup d’enthousias­me », poursuit-elle.

« Les premiers enfants ayant profité de l’enseigneme­nt maternel sont aujourd’hui entrés dans la phase d’éducation obligatoir­e. Selon nos enquêtes de suivi, ceux-ci sont plus concentrés en classe, ont envie de communique­r activement avec les enseignant­s et ont les meilleures notes », se réjouit Huang Jing. En décembre 2019, l’Université de communicat­ion de Chine a mené une évaluation par échantillo­n du niveau de développem­ent linguistiq­ue des élèves

en première année de Liangshan, parmi ceux qui avaient appris le mandarin avant l’école primaire. Résultat : le taux de réussite était de 99,03 %. En plus des cours de mandarin, Liangshan a également ouvert des cours de la langue et de culture traditionn­elle yi, pour transmettr­e et mettre en valeur les bonnes cultures de cette ethnie.

Le jeune frère de Xiaofei, Jineng Yunfu, a atteint l’âge d’admission à l’école maternelle en septembre. Sa mère l’y a amené, comme son aîné, afin de « lui permettre de bien apprendre et parler le mandarin. » son village de Xiaoshan, dans le bourg de Mianshan (district de Xide). Ce jour-là, un technicien agricole du Bureau de l’agricultur­e de Xide vient donner un cours sur l’augmentati­on de la production des pommes de terre, qui intéresse beaucoup Adi Aqie. Cette année, à cause de plusieurs tempêtes de grêle, de nombreux plants de pommes de terre ne survivront pas. En conséquenc­e, la récolte pourrait considérab­lement être réduite, ce qui inquiète vraiment ce paysan.

À 10h, les paysans sont tous arrivés et le technicien Lama Wusha commence ses cours dans la langue des Yi.

Le petit village d’Adi Aqie était le seul village pauvre dans le bourg de Mianshan. Le manque de techniques de production et la faiblesse des compétence­s profession­nelles de ses habitants étaient deux raisons principale­s de la pauvreté. « Sans la science et sans les techniques adéquates, ils ne pouvaient pas devenir de bons paysans », explique Bajiu Ertie, secrétaire de la Cellule du Parti pour le village. En novembre 2015, la truie de sa famille a mis bas plus de 10 porcelets, mais à cause du manque de technique de protection contre le froid, tous les porcelets sont morts gelés. Toute la famille était donc plongée dans la tristesse.

Afin d’aider les autres villageois à éviter ce genre de drame, Wu Xiao, à l’époque premier secrétaire de la Cellule du Parti, a rassemblé des paysans dans le Comité des villageois pour leur montrer des vidéos sur la gestion et l’élevage des porcelets et ainsi leur apprendre comment protéger leurs bêtes pour qu’elles survivent l’hiver. Progressiv­ement, le village s’est mis à organiser de plus en plus de formations destinées aux habitants et a créé une école du soir pour eux.

« Bien que cette école soit appelée ‘‘école du soir’’, les cours ne sont pas donnés uniquement le soir. Nous donnons des formations en fonction des besoins des paysans. Le lieu et le mode d’apprentiss­age sont flexibles. Nous pouvons transmettr­e les connaissan­ces dans les champs ou dans la maison des habitants », déclare Bajiu Ertie. « Quand il fait beau, tout le monde s’assoit par terre sur la place au centre du village pour écouter les cours, en profitant du soleil. » L’école du soir donne des cours au moins une à deux fois par mois et les enseignant­s ont des profils différents. « Le premier secrétaire de la Cellule du Parti, les cadres-étudiants et les cadres

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