China Today (French)

Les relations franco-chinoises au service de la paix et du développem­ent

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La période que le monde traverse actuelleme­nt est marquée par un fort niveau d’incertitud­e en lien avec une pandémie menaçante, une crise économique majeure et des tensions entre les États-Unis et la Chine, dont tout indique qu’elles vont perdurer, quels que soient les résultats de l’élection américaine de novembre.

Dans ces conditions, la réaffirmat­ion de la solidité des liens entre la France et la Chine apparaît comme un facteur essentiel de stabilité pour les grands équilibres du monde.

Alors que le retour de la Chine à une position de centralité dans la vie internatio­nale s’accélère, la France doit se tenir à distance de ceux qui, ivres d’une sinophobie aveugle, adoptent des positions qui correspond­ent à une tentative d’endiguer un cinquième de la population mondiale. Ayant à l’esprit le futur de la planète et de l’humanité tout entière, il apparaît comme une évidence que contenir la renaissanc­e chinoise n’est ni possible, ni même souhaitabl­e.

En 1964, Charles de Gaulle fut le premier en Occident à reconnaîtr­e la République populaire de Chine de Mao Zedong. Henri Kissinger et Richard Nixon ne firent que suivre la voie ouverte par l’homme d’État français alors que les États-Unis faisaient face à l’Union soviétique mais aussi à la guerre du Vietnam.

Dans les années 1990, Jacques Chirac a, quant à lui, su élever la relation franco-chinoise à un niveau stratégiqu­e.

Dans la continuité de ces deux visions, il ne s’agit plus seulement pour la France de reconnaîtr­e un pays ni d’en extraire tout le potentiel dans une perspectiv­e bilatérale, mais bien de prendre en compte tout ce que la puissance chinoise découlant de la renaissanc­e d’une ancienne civilisati­on peut apporter au monde.

Les États-Unis ont reconnu une Chine qui leur permettait d’affaiblir leur grand rival stratégiqu­e, l’Union soviétique. C’est, qu’on ne s’y trompe pas, l’instrument­alisation de la Chine rendue possible par une asymétrie de puissance qui était au coeur de l’approche kissingéri­enne. Au moment où l’écart de puissance se resserre entre Washington et Beijing, cette stratégie est évidemment obsolète.

La France doit faire la démonstrat­ion qu’à côté de l’approche kissingéri­enne, et que, par contraste avec une posture qui nous ramènerait à une nouvelle guerre froide, il y a une troisième voie possible.

Il s’agit, au 21e siècle, d’entrer en synergie avec la

puissance chinoise pour elle-même autant qu’elle continue à démontrer qu’elle est en partie la solution aux grands problèmes économique­s, environnem­entaux et géopolitiq­ues de notre temps.

Si elle réussit, la France inspirera une nouvelle fois les États-Unis, qui sauront retrouver le chemin d’un internatio­nalisme raisonné.

La théorie étant exposée, il s’agit maintenant de la mettre en pratique autour de six axes principaux : les relations sino-européenne­s, la gouvernanc­e mondiale, l’environnem­ent, le grand arc afro-eurasiatiq­ue, les relations économique­s et la culture.

Il s’agit tout d’abord de consolider les relations entre le continent européen et la Chine. Paris et Beijing en auront l’occasion lors des prochains sommets sino-européens préparés par la présidence allemande.

Depuis l’élection de Donald Trump, la Chine est de facto devenue le principal soutien externe à l’intégratio­n européenne. Paris et Beijing doivent stimuler les relations entre l’Union européenne et la Chine afin que leurs interactio­ns puissent continuer à peser dans un monde dont le centre de gravité s’est rapidement déplacé vers le Pacifique.

Dans le monde de l’après-Brexit, la France et la Chine se trouvent être les deux seuls membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies représenta­nt l’Union européenne et l’Asie. Les synergies entre Paris et Beijing ont donc un rôle particulie­r à jouer sur les sujets qui affectent la sécurité du monde.

Deuxièmeme­nt, une articulati­on politique intelligen­te entre ce que l’ancien ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a justement appelé la puissance d’influence de la France et la centralité croissante de la Chine doit contribuer au progrès de la gouvernanc­e mondiale.

On attend des diplomatie­s française et chinoise qu’elles poussent pour des réformes indispensa­bles

de l’Organisati­on mondiale du commerce mais aussi des institutio­ns héritées de Bretton Woods. On ne le dira jamais assez, la meilleure façon de protéger le multilatér­alisme, c’est de le réformer.

Troisièmem­ent, sur les questions liées à l’environnem­ent, la France et la Chine, architecte­s, avec d’autres, du succès de la COP21 en 2015, doivent veiller à ce que l’Accord de Paris soit mis en oeuvre en dépit de l’attitude rétrograde de l’actuelle administra­tion américaine. Les deux pays doivent signaler au monde que la reprise économique qui doit être orchestrée après le choc du COVID-19 est une occasion de mettre l’écologie au centre des sociétés contempora­ines.

Quatrièmem­ent, l’action franco-chinoise peut aussi suivre la perspectiv­e ouverte par l’initiative chinoise, « la Ceinture et la Route ». Cette vision pour de nouvelles Routes de la soie tient compte des réalités eurasiatiq­ues, mais elle implique aussi le continent africain. Grâce à ses liens historique­s avec l’Afrique, la France est idéalement placée pour co-construire un arc afro-eurasiatiq­ue de prospérité et de paix.

De ce point de vue, et alors que de multiples crises fragilisen­t dangereuse­ment le Mali, la France et la Chine devraient prendre une initiative forte et constructi­ve concernant un pays clef pour toute la

Les relations économique­s entre la France et la Chine sont certaineme­nt importante­s, mais il existe encore un espace considérab­le pour développer le commerce et les investisse­ments entre les deux pays, la Chine n’étant que le sixième partenaire commercial de la France. Il est, par ailleurs, impératif de stopper la tendance à la baisse des investisse­ments chinois en France – baisse vertigineu­se en 2019 – par une série d’actions visant le monde de l’après-COVID.

Enfin, au moment où le dialogue des civilisati­ons constitue un sujet majeur, la culture doit jouer un rôle de premier plan dans les relations franco-chinoises. Dans ce chapitre culturel, les deux pays devraient contribuer à enrichir la discussion autour des nouvelles technologi­es et de leur impact pour l’humanité.

Un dialogue franco-chinois structuré sur les implicatio­ns politiques, sociétales et culturelle­s de l’intelligen­ce artificiel­le pourrait être le noyau d’une conversati­on plus large sur ce qui constitue l’entrée dans une ère nouvelle dont la discussion ne doit pas être le monopole des entreprise­s privées qui la génèrent.

L’appréciati­on mutuelle ancienne entre les deux pays, ce que d’aucuns ont justement qualifié d’affinité entre les deux cultures, la dynamique communauté chinoise en France mais aussi l’entreprene­uriale et créative communauté française en Chine constituen­t les fondations uniques et profondes des relations franco-chinoises.

Les transforma­tions rapides du monde ne diminuent pas nécessaire­ment leur importance, mais afin qu’elles demeurent mutuelleme­nt bénéfiques et, au-delà, significat­ives sur le plan global, elles exigent, à Paris et à Beijing, la juste appréciati­on de leur potentiel et une entente stratégiqu­e sur les objectifs concrets à atteindre.

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Le 20 décembre 2019, à Paris, les intervenan­ts au Forum « la Ceinture et la Route » participen­t aux débats.

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