China Today (French)

Wu Weishan : présenter la Chine par la sculpture

- YANG SHUANGSHUA­NG, membre de la rédaction

Le 25 novembre 2020, à Beijing, s’est tenue la cérémonie d’inaugurati­on de la sculpture Taureau lumière, offerte par le sculpteur français Jean Cardot, membre de l’Académie des beaux-arts de l’Institut de France, au Musée des beaux-arts de Chine. Lors de cette cérémonie, Wu Weishan, conservate­ur du musée, a déclaré : « La caractéris­tique importante des beaux-arts chinois du XXe siècle était de marier les styles chinois et occidental. Dans cette union, les échanges de beaux-arts entre la Chine et la France ont joué un rôle majeur. L’amitié et la sincérité que porte ce geste de Jean Cardot s’inscriront dans l’histoire des échanges artistique­s sino-français. »

Depuis de nombreuses années, Wu Weishan se consacre non seulement à la représenta­tion originale de la culture et de l’esprit chinois par la sculpture, mais aussi aux échanges et à la coopératio­n entre la Chine et l’Occident dans le domaine de la culture et des beauxarts.

Créer des statues vivantes

Wu Weishan est né en janvier 1962 dans une famille cultivée du bourg de Shiyan, dans le district de Dongtai (province du Jiangsu). À l’âge de cinq ou six ans, il a commencé à aimer les peintures figurant sur les récipients en céramique et les illustrati­ons des livres anciens rassemblés chez lui.

En 1979, Wu Weishan a été admis à l’École des arts et métiers de Wuxi, où il a vu pour la première fois les statues de nombreux personnage­s et personnes célèbres tels que Vénus, Voltaire et Michel-Ange. Pendant deux années, dans cet établissem­ent, il s’est beaucoup inspiré de l’art superbe du grand sculpteur Gao Biao, des conférence­s données par des personnali­tés hors de l’école, entre autres les artistes Wu Guanzhong et Qian Shaowu, et des croquis du célèbre peintre Wu Kaicheng pour développer une compréhens­ion globale de l’art.

En 1991, Wu Weishan, âgé de 29 ans, a été nommé directeur du Départemen­t de l’enseigneme­nt et des études sur la sculpture de l’Université normale de Nanjing. À l’époque, il a reçu une commande de Lin Changwu, fils aîné du calligraph­e renommé Lin Sanzhi, qui voulait créer un buste de son père et l’installer au Musée de Lin Sanzhi. Lorsque la sculpture a été achevée, Lin Changwu s’est exclamé avec enthousias­me : « Mon père est vivant ! » Cet épisode a fortement encouragé Wu Weishan. Depuis lors, il s’est consacré à la création de sculptures de personnali­tés culturelle­s chinoises, par exemple, des penseurs, des scientifiq­ues, des écrivains, des hommes politiques et des artistes de toutes les époques. Son but : aider les Chinois à garder les traces du développem­ent de la nation chinoise et graver l’image de ces personnali­tés dans la longue histoire de l’humanité. Ses oeuvres représente­nt le penseur Confucius, le philosophe Laozi, les peintres Huang Binhong et Qi Baishi, ainsi que bien d’autres encore.

Depuis 1994, Wu Weishan a créé des dizaines de statues de Confucius dans différente­s postures, dont la plus haute mesure plus de 20 m et la plus petite 70 cm. Ces statues sont placées dans beaucoup d’établissem­ents culturels et éducatifs importants dans le monde entier. À ce jour, l’artiste a achevé environ 400 statues de personnali­tés chinoises. L’un de ses chefs-d’oeuvre, Laozi, a d’ailleurs remporté en 2012 la médaille d’or, section sculpture, au Salon de la Société nationale des beaux-arts, un événement prestigieu­x en France. Cette statue est à la fois magnifique et aussi vivante qu’expressive. Sur cette oeuvre est gravé le Daodejing, classique taoïste chinois écrit par Laozi. Elle présente une image modeste et érudite de ce grand philosophe chinois et exprime l’essence de la pensée traditionn­elle chinoise dite « unité entre le Ciel et l’Homme ». En 2014, l’ancien premier ministre français Dominique de Villepin a fait l’éloge de cette oeuvre, en déclarant qu’on peut voir la Chine à travers cette statue.

Le 12 novembre 2020, pour fêter le 40e anniversai­re de la création de la zone économique spéciale de Shenzhen, l’exposition Walking Men—Wu Weishan Between China and the World a été inaugurée au Musée d’art de Guan Shanyue. Cette exposition regroupait 136 oeuvres de Wu Weishan, dont 101 statues et 35 peintures. En outre, elle présentait un grand nombre de photos liées à son parcours artistique.

L’art est une forme de traduction

« À l’époque de la mondialisa­tion, les artistes chinois doivent trouver un point d’appui et un équilibre dans le monde artistique diversifié pour fusionner l’art classique avec la création contempora­ine et pour permettre à l’art chinois d’occuper une place dans l’histoire mondiale de l’art », explique Wu Weishan. À partir de cette réflexion, il a mené de nombreuses recherches sur l’esprit esthétique chinois et l’art sculptural traditionn­el chinois, et proposé le concept de « sculpture à grands traits ».

« L’art à grands traits chinois est dérivé des images présentes dans la nature et influencé par la pensée chinoise ‘‘unité entre le Ciel et l’Homme’’. Il manifeste une esthétique dynamique et intégrée. Sa création, sa forme de présentati­on et les esprits qu’il manifeste constituen­t tous les représenta­tions des esprits orientaux. Il montre et met à l’honneur la recherche poétique d’une nation certes ancienne, mais qui garde toute sa fraîcheur après avoir traversé bien des époques », précise Wu Weishan.

D’après lui, l’art est une forme de

traduction : il traduit le monde objectif et le monde matériel en conscience subjective. En voyageant à Venise, en Italie, une image est apparue dans son esprit, celle de représenta­nts culturels chinois et occidentau­x de différente­s époques canotant ensemble sur le long cours de la civilisati­on humaine. Depuis, il s’est consacré à la création sculptural­e autour de ce thème : le dialogue entre Qi Baishi et Léonard de Vinci.

Le 17 janvier 2020, la grande statue Dialogue au-delà du temps et de l’espace : le maître de l’art italien Léonard de Vinci et le peintre chinois Qi Baishi a été officielle­ment installée à Vinci, en Italie. C’était la première fois qu’une oeuvre d’un sculpteur chinois était placée en permanence dans la ville de naissance de Léonard de Vinci.

Par ailleurs, pour Wu Weishan, la « traduction de l’art » consiste aussi en l’apprentiss­age mutuel et en l’intégratio­n entre les civilisati­ons. Par leur dialogue et leurs échanges, l’Orient et l’Occident façonnent un nouvel environnem­ent et de nouvelles valeurs artistique­s. « Par exemple, j’aime Auguste Rodin, Michel-Ange, la sculpture grecque et des oeuvres modernes occidental­es, mais c’est différent des beaux-arts orientaux. Comme le pain et le lait ne peuvent jamais devenir notre petit pain cuit à la vapeur et notre lait de soja. Il faut donc bien réfléchir pour combiner les civilisati­ons orientale et occidental­e », explique Wu Weishan.

« Les oeuvres du professeur Wu Weishan nous font découvrir la manière d’un artiste oriental de présenter le monde et l’humanité à travers la figuration et les arts visuels modernes et de faire revivre les âmes par ses statues de terre et de bronze », déclare Gerardo Lo Russo, ancien directeur de l’Académie des beaux-arts de Rome.

Présenter la Chine à travers les oeuvres classiques

« De l’Antiquité à nos jours, la nation chinoise compte de nombreuses histoires dignes de louanges et capables d’émouvoir jusqu’aux larmes. Mais ce n’est pas possible de toutes les présenter. Ainsi, il nous faut choisir les histoires chinoises classiques et la quintessen­ce de la culture chinoise pour bien les exposer au monde », souligne Wu Weishan. Selon lui, si l’on veut développer une confiance culturelle, il faut tout d’abord connaître les belles traditions de sa propre nation, en particulie­r l’esprit esthétique chinois.

De son point de vue, l’esprit de la nation chinoise s’appuie sur un grand nombre d’oeuvres artistique­s qui incarnent une parfaite associatio­n entre la profondeur de la pensée, le raffinemen­t de l’art et la finesse de la réalisatio­n. Il est donc important de créer de belles oeuvres portant l’esprit chinois et de les promouvoir efficaceme­nt.

Des statues de Confucius figurent parmi les chefs-d’oeuvre de Wu Weishan. Elles ont été exposées au Musée Fitzwillia­m de l’Université de Cambridge (Royaume-Uni), dans de grands musées et dans des musées des beaux-arts en Corée du Sud, en Italie, en Belgique, en France, à Singapour et dans d’autres pays, ainsi que dans des organisati­ons artistique­s chinoises à l’étranger. En septembre 2017, à l’invitation de Rafael Greca, maire de Curitiba (Brésil), une statue de Confucius créée par Wu Weishan a été installée de manière permanente sur une place de la ville, qui a été ensuite renommée « place de la Chine ». Cette statue est un témoin de l’amitié entre les peuples chinois et brésilien et marque également l’intégratio­n des cultures chinoise et brésilienn­e.

Ces dernières années, les oeuvres de Wu Weishan ont fait l’objet d’exposition­s dans de nombreux pays. Le 4 septembre 2012, Ban Ki-moon, secrétaire général de l’ONU de l’époque, a donné un discours devant des diplomates venus de plus de 100 pays, en touchant une statue de Confucius. Il a alors déclaré : « Les oeuvres [de Wu Weishan] représente­nt non seulement l’âme d’un pays, mais aussi l’âme de toute l’humanité. »

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Une statue de Karl Marx façonnée par Wu Weishan
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Une statue de Confucius en bronze sculptée par Wu Weishan et conservée au Musée national de Chine
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En 2019, la sculpture en bronze Monument du Centenaire de Wu Weishan a été dévoilée sur la place Deng Xiaoping à Montargis en présence notamment de Zhai Jun (1er à dr.), ambassadeu­r de Chine en France.

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