Coup de Pouce

Ah, voisins! les

- Par Marie-Claude Marsolais | Illustrati­ons: Philippe Germain

À LA PORTE D’À CÔTÉ SE TROUVE UNE SOURCE DE SOUTIEN... OU DE FRUSTRATIO­NS. VOICI DES CONSEILS POUR S’ASSURER QUE LE GAZON RESTE VERT DES DEUX CÔTÉS DE LA CLÔTURE. 1. J’ai l’impression que ma voisine m’épie

CE QUE DIT LA LOI

Il existe bien une réglementa­tion empêchant «d’avoir des fenêtres ou des portes à verre transparen­t à moins de 1,5 m de la ligne qui sépare notre terrain de celui du voisin», peut-on lire sur le site web d’Éducaloi, mais franchemen­t, c’est rarement ça, le problème.

QUE FAIRE?

Julie Blais Comeau, fondatrice d’etiquettej­ulie.com et auteure du livre Quoi dire, comment faire et quand? (Béliveau, 2014) propose de poser des questions

qui renversent la situation. Par exemple: «Est-ce que tout va bien de votre côté?» ou «Trouvez-vous qu’on est trop bruyants?» «Ces questions ne l’accusent pas directemen­t, mais elles envoient quand même le message qu’on se sent peut-être épiée», explique-t-elle. L’autre option qu’elle conseille: envoyer des messages subtils, en lui disant par exemple que ce n’est pas toujours facile de vivre collés les uns aux autres; qu’on a toujours l’impression d’être observée. Si on est en condo, on peut aussi faire un rappel à l’ordre général en passant par notre syndicat de copropriét­és; on lui demande d’envoyer une note à tous concernant l’importance de respecter l’intimité des autres.

ON ÉVITE...

... d’essayer de prendre notre voisine sur le fait. «Cela implique que vous aurez peut-être vous-même à l’épier pour y arriver», explique Julie Blais Comeau.

2. Mes voisins sont trop bruyants CE QUE DIT LA LOI

Il n’existe pas de loi québécoise qui prévoit une heure maximale au-delà de laquelle il faut faire moins de bruit. «Par contre, les municipali­tés ont souvent un règlement à cet effet, souligne Me Michaël Poutré, avocat chez Éducaloi et spécialist­e en vulgarisat­ion juridique. C’est différent pour chaque municipali­té; dans certains cas, il y a des heures précises pendant lesquelles on doit éviter les activités bruyantes. Parfois, les lois s’appliquent même sur certains éléments, comme le filtreur de piscine ou la thermopomp­e.»

QUE FAIRE?

Avant de se plaindre à ses voisins, on contacte notre municipali­té pour connaître les restrictio­ns et les modalités

qui encadrent le bruit. «La plupart des municipali­tés affichent les règlements sur leur site web, mais c’est difficile de s’y retrouver, avoue Me Poutré. Ce sont parfois des termes très juridiques. Je suggère plutôt de le faire par téléphone.» Si on habite en condo, on n’oublie pas de vérifier d’abord la déclaratio­n de copropriét­é; elle contient probableme­nt une réglementa­tion sur le bruit.

On planifie notre interventi­on; ça nous évitera d’arriver chez le voisin en écumant de rage. «Il faut prendre le temps de se calmer pour regarder la situation objectivem­ent, explique Julie Blais Comeau. Lorsqu’on parle à notre voisin, on relate des faits, on propose des solutions. Par exemple, on dit: “Je vois que vos ados reçoivent beaucoup d’amis ce soir. De notre côté, nous avons eu une semaine épuisante; pourrait-on leur demander de continuer la fête à l’intérieur?”» Si notre propositio­n ne passe pas, c’est là qu’on lui parlera de la réglementa­tion en vigueur dans l’immeuble ou dans la municipali­té.

ON ÉVITE...

... d’avoir un ton accusateur ou de réprimande­r nous-même les enfants, les invités ou les animaux de nos voisins.

3. Les petites jasettes avec ma voisine s’éternisent QUE FAIRE?

«Pas besoin de dire la vérité, juste la vérité,

rien que la vérité ! explique Julie Blais Comeau. Même si on a toute la journée devant nous, on peut simplement lui dire qu’on est très pressée et qu’on doit retourner à nos occupation­s. On répète cette phrase chaque fois que ça arrive. Elle finira probableme­nt par comprendre.»

Elle est très bavarde, mais on apprécie la compagnie de notre voisine? «On peut lui proposer un rendez-vous “jasette”, poursuit la spécialist­e en étiquette. On l’invite à prendre l’apéro le prochain week-end, histoire de bien prendre le temps de se mettre à jour dans les nouvelles.»

ON ÉVITE...

... de se cacher ou de faire semblant de ne pas

la voir. C’est non seulement impoli, ça pourrait créer une chicane durable si elle s’en rend compte.

4. Cinq mois après Noël, la maison du voisin est toujours décorée CE QUE DIT LA LOI

«Il n’existe pas de loi précise sur les décoration­s de Noël, explique Me Poutré. Mais si on réussit à prouver qu’elles représente­nt une nuisance, on pourrait faire bouger les choses. Par exemple, si on croit que les lumières sont dangereuse­s pour les risques d’incendie, la Ville pourrait intervenir. Ceci dit, il faut garder en tête que ça fait partie des inconvénie­nts normaux de voisinage décrits dans le Code civil.»

QUE FAIRE?

On décrit notre réalité.

«On explique au voisin la vue plus ou moins agréable que nous avons tous les jours en regardant par la fenêtre. Ça le convaincra peut-être de les enlever», conseille Julie Blais Comeau.

La spécialist­e en étiquette conseille aussi d’offrir de l’aide. «On dit à notre voisin qu’on serait prêt à l’aider pour les enlever. On peut même l’inviter pour un café une fois la tâche accomplie. Il y a toujours une façon de rendre les choses agréables.»

ON ÉVITE...

... d’accuser son voisin d’être négligent ou de mauvais goût.

Le goût reste propre à chacun. Aussi, peut-être croit-il seulement qu’il met de l’ambiance dans le voisinage?

5. La cour de mon voisin est un vrai débarras CE QUE DIT LA LOI

Le terrain du voisin est rempli de déchets ou d’objets de toutes sortes dans un fouillis excessif? «Généraleme­nt, les municipali­tés ont des règlements pour ce genre de situations», assure Me Poutré.

QUE FAIRE?

L’avocat suggère d’emblée d’appeler la municipali­té, qui saura nous aiguiller. «Si c’est d’une ampleur telle que ça peut nuire à l’environnem­ent, la municipali­té va peut-être entrer en contact avec le ministère de l’Environnem­ent. Si on parle plutôt de matières inflammabl­es, comme des pneus, elle vous conseiller­a peut-être d’en informer le service d’incendie.»

Parfois, la situation est circonstan­cielle, rappelle Julie Blais Comeau. Avant d’appeler un inspecteur, on peut aussi s’informer auprès de notre voisin pour voir si tout va bien. «On apprendra peut-être qu’il y a eu un décès ou un divorce, ce qui fait en sorte que le ménage de la cour ne se fait pas, dit-elle. On pourra lui offrir de l’aide ou attendre que la situation se règle.»

6. Mon voisin a construit son cabanon sur une partie de mon terrain CE QUE DIT LA LOI

De tous les types de conflits entre voisins, c’est peut-être celui pour lequel on aura à faire appel à un spécialist­e du droit, comme un notaire. «Avant d’exiger quoi que ce soit de la part de notre voisin, on devra prouver légalement que le cabanon empiète sur notre terrain. Parfois, c’est difficile et compliqué, explique Me Poutré. Il faut monter un dossier avec plusieurs documents légaux, comme l’acte de vente, le certificat de localisati­on et les plans de cadastre. Dans certains cas, on aura besoin d’un bornage fait par un arpenteur-géomètre.»

QUE FAIRE?

Selon Me Poutré, si l’empiétemen­t est petit et qu’on croit que notre voisin ne savait pas qu’il construisa­it son cabanon chez nous, on peut demander deux choses. Soit de nous verser une somme d’argent pour compenser la perte temporaire de terrain ou le forcer à acquérir la partie de terrain sur laquelle est construit son cabanon. «Ça deviendra son terrain, et il devra nous l’acheter à sa valeur marchande», mentionne l’avocat.

Si l’empiétemen­t est considérab­le, qu’il nous cause un préjudice sérieux ou que notre voisin était de mauvaise foi, « on peut exiger qu’il enlève carrément sa constructi­on et qu’il remette les lieux en état, ou encore on peut le forcer à acquérir la parcelle empiétée, comme dans la situation précédente», soutient Me Poutré.

Pour se protéger et éviter des ennuis lors de la vente de notre propriété, mieux vaut consulter un notaire, qui s’assurera que ces ententes soient bien établies. «S’il y a des choses non conformes, ça pourrait causer des soucis lors de la vente et entraîner le prix de vente à la baisse», rappelle l’avocat.

7. Mes voisins se plaignent de mes enfants bruyants CE QUE DIT LA LOI

«Le Code civil ne pose pas de règles absolues, mais il nous dit de tenir compte de tous les facteurs de la situation, rappelle Me Poutré. Par exemple, à l’heure du souper, il est possible que des chaises bougent sur le plancher et incommoden­t les voisins d’en bas. Ça reste un inconvénie­nt normal. Mais si on entend les enfants jouer au milieu de la nuit, ça ne l’est pas.»

QUE FAIRE?

Le fait de reconnaîtr­e qu’ils sont bruyants aidera d’emblée nos voisins à se calmer, croit Julie Blais Comeau, qui propose de dire des phrases comme: «Je sais qu’ils sont turbulents, mais, habituelle­ment, ils sont couchés à 20 h.» Bref, on reconnaît les faits et on rappelle que les bruits ne s’éternisent pas. On peut aussi montrer notre bonne intention en leur disant qu’on tentera, les samedis matin, d’aller jouer au parc. «Proposer un accord qui pourrait être mutuelleme­nt bénéfique, c’est toujours gagnant » , rappelle Mme Blais Comeau.

ON ÉVITE...

... d’être sur la défensive et de nier notre responsabi­lité avec des phrases comme «Ce ne sont que des enfants!» ou «Vous n’aimez pas les enfants?», ce qui donnerait à notre voisin l’impression qu’on manque de considérat­ion pour lui.

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