Coup de Pouce

LES NOËLS D’ANTAN

ÂGÉS RESPECTIVE­MENT DE 88, 90 ET 100 ANS, ARMAND PARADIS, YOLANDE LAROCHE ET MARIE-CLAIRE DANEAU ONT DÉJÀ VU NEIGER… LES TROIS SAGES SE RAPPELLENT LES NOËLS DE LEUR ENFANCE.

- Par Amélie Cournoyer

Armand Paradis | 88 ans

Armand se rappelle que la veille de Noël était tranquille quand il était enfant. Il passait la soirée en famille, avec son père, sa mère et sa soeur. Après le souper, sa soeur et lui allaient se coucher, ne dormant que d’un oeil jusqu’à ce que leurs parents les réveillent pour la messe de minuit. «Je me souviens du sleigh que l’on prenait pour aller à l’église et du son des clochettes attachées aux chevaux, dit-il. L’église était tellement belle, toute décorée et illuminée pour l’occasion.»

Après la messe, la famille Paradis revenait à la maison et les enfants recevaient de petits cadeaux. «Je n’oublierai jamais le revolver-jouet avec les cartouches en bois qu’on m’a donnés, un Noël. Ils étaient accrochés à une ceinture que je pouvais mettre à ma taille. J’ai joué avec ça toute l’année!», raconte Armand. Quant à sa soeur, elle recevait des «affaires de filles», comme des poupées.

Le 25 décembre sonnait le début des festivités chez les Paradis. «Chaque soir, à tour de rôle, une famille invitait le reste de la parenté. Entre mes tantes, il y avait même un petit concours à savoir qui ferait le meilleur dessert ou la meilleure tourtière», poursuit celui qui ne cache pas s’être régalé.

Reste que le plus gros rassemblem­ent familial, c’était au jour de l’An. «On partait en sleigh, emmitouflé­s dans d’épaisses couverture­s, se souvient-il. Mon père mettait des briques chauffées sous nos pieds pour nous garder au chaud. Ça prenait seulement une demi-heure pour nous rendre chez mon grand-père, qui habitait dans le même village, mais je trouvais ça tellement long! J’avais hâte d’arriver.» La maison du grand-père maternel était alors remplie d’invités, la table débordait de nourriture, tout le monde était heureux et s’amusait… Bref, Armand savait que la soirée finirait tard! Yolande Laroche | 90 ans Celle qui a grandi au sein d’une famille de 14 enfants se rappelle que Noël demandait beaucoup de préparatio­n… «À l’époque, le temps des fêtes commençait au début du mois de décembre et se poursuivai­t jusqu’à l'Épiphanie. Noël et le jour de l’An étaient les deux grandes fêtes au coeur de cette période de réjouissan­ces», raconte Yolande.

Tout commençait début décembre avec l’abattage de quelques animaux de la ferme familiale par les hommes. On faisait ainsi des provisions de viande pour l’hiver et pour les repas du temps des fêtes, bien sûr! Ensuite, les femmes pouvaient entreprend­re le grand ménage de la maison et cuisiner les rôtis, tourtières, cretons, tartes, gâteaux et tout ce qu’il fallait pour bien recevoir la visite. «Durant leurs moments de répit, le soir, les femmes tricotaien­t des vêtements ou faisaient de la broderie tandis que les hommes fabriquaie­nt des jouets en bois. C’étaient leurs cadeaux aux enfants. Ils n’achetaient pratiqueme­nt rien dans les magasins», poursuit-elle.

Tout le mois de décembre, à l’école, l’enseignant­e préparait les enfants à la naissance du petit Jésus. Les sacrifices que faisaient Yolande et ses camarades de classe (travailler fort à l’école, aider les parents à la maison, rendre service, éviter la chicane) étaient écrits sur des bouts de papier. Ceux-ci devenaient les brins de paille dans la crèche; alors il en fallait beaucoup pour la rendre confortabl­e et que le nouveau-né soit bien au chaud! «Noël était une fête religieuse entièremen­t consacrée à l’arrivée de Jésus, souligne Yolande. Il n’était pas question de cadeaux. L’enfant qui avait fait des sacrifices pour faire plaisir à Jésus et qui assistait à la messe de minuit était comblé.»

Quant au jour de l’An, ça swinguait fort dans la famille de Yolande! «Il y avait plus de 100 personnes chez nous, se souvient-elle. C’est à ce moment-là qu’on se donnait des cadeaux. On se gâtait, on mangeait, puis on chantait et on dansait durant une bonne partie de la nuit.»

Marie -Claire Daneau | 100 ans

Dans la famille de Marie-Claire, le temps des fêtes commençait par la messe de minuit. «C’était très solennel. Les gens étaient bien habillés. Il y avait une chorale spéciale qui interpréta­it les chants de Noël», dit-elle.

Après la messe, le domicile familial de Marie-Claire devenait le point de rassemblem­ent de toute la parenté. Oncles, tantes, cousins, cousines... ils étaient une quarantain­e en tout à s’échanger des voeux de Noël tout en dégustant des tourtières, des sandwichs de toutes sortes et une très grande quantité de beignes préparés par sa mère, ses soeurs et elle. Pour mettre de l’ambiance, un disque de chansons de Noël jouait en boucle, «mais pas trop fort pour ne pas déranger».

Vers 2 h du matin, les enfants recevaient leurs cadeaux. «La plupart du temps, on se faisait donner des gants, des tuques et des foulards que mes soeurs avaient tricotés», raconte Marie-Claire. Dans leur bas de Noël, c’est-à-dire un bas de laine accroché à leur lit, les enfants trouvaient des bonbons aux patates, un morceau de chocolat ou de sucre à la crème, puis un fruit, comme une pomme, une orange ou une banane.

Par la suite, tout le monde allait se coucher pour dormir une heure ou deux avant de se rendre à la messe de l’aurore du 25 décembre. «Mes soeurs et mon beau-frère faisaient partie de la chorale. Quand on les entendait chanter, on se sentait au ciel», se rappelle-t-elle.

Tout le temps des fêtes, la parenté en profitait pour se visiter tous les jours, ce qui donnait lieu à des soirées dansantes. «Ma mère jouait du piano et mon père chantait. Le reste du monde dansait des valses et des sets carrés», poursuit Marie-Claire. Dans sa famille, les festivités se terminaien­t à la fête des Rois, le 6 janvier, par une soirée paroissial­e où l’on voisins.• jouait aux cartes entre

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