Coup de Pouce

JEÛNE INTERMITTE­NT: BON OU MAUVAIS?

LE JEÛNE INTERMITTE­NT EST EN VOGUE. LES TÉMOIGNAGE­S D’EXPERTS SONT INSPIRANTS, ET LES DONNÉES SCIENTIFIQ­UES, PROMETTEUS­ES. EN REVANCHE, LE MANQUE D’ÉTUDES SUR LES EFFETS À LONG TERME INCITE À LA PRUDENCE. EST-CE QU’ON JEÛNE OU PAS?

- Par Maude Dionne

Après une prise de poids, Émilie, 32 ans, a recherché le régime miracle: «Je voulais une façon de perdre du poids rapidement, sans trop me restreindr­e!» révèlet-elle. En quelques clics, elle découvre le jeûne intermitte­nt. Cela consiste à jeûner, ou à très peu manger, une ou plusieurs fois par semaine. Ces périodes de jeûne durent de 14 à 24 heures. Émilie suit la méthode 20/4: elle jeûne 20 heures et mange tout ce qu’elle veut pendant 4 heures, tous les jours. »»

Très populaire, ce régime semble être une façon rapide et efficace de perdre du poids, mais les preuves scientifiq­ues sont encore limitées. Pendant un an, des chercheurs norvégiens ont suivi des adultes obèses soumis à différents régimes hypocalori­ques. En juillet 2018, ils ont conclu que le jeûne intermitte­nt aurait la même efficacité que d’autres régimes hypocalori­ques pour maigrir et maintenir son poids.

JEÛNER POUR NOTRE SANTÉ

Selon le Dr Gaétan Brouillard, auteur du best-seller

La santé repensée (Éditions de l’Homme), la perte de poids n’est pas l’objectif du jeûne: «Ça fait partie d’un mode de vie sain, on ne jeûne pas pour maigrir, mais pour rester en santé ou la retrouver.» D’après lui, nous souffrons de suraliment­ation: «Notre système est encrassé par la nourriture. Le jeûne permet une détoxicati­on. Il devient une pilule miracle qui ne coûte pas cher!» En effet, plusieurs maladies chroniques, dont le diabète de type 2, résultent de nos excès alimentair­es.

Le jeûne intermitte­nt fait fureur dans la communauté scientifiq­ue. L’étude norvégienn­e affirme que ce régime, en réduisant notamment le tour de taille, la pression sanguine et le cholestéro­l, diminuerai­t du même coup les risques de maladies cardiovasc­ulaires. Plusieurs recherches à travers le monde donnent des résultats semblables, mais aucune n’a pu évaluer les effets à long terme.

Le Dr Brouillard n’a «pas besoin d’attendre 10 000 autres études pour dire que le jeûne est important». Il précise que «dans celles sur le diabète, l’arthrite et les maladies cardiaques, on voit les effets positifs: les gens iraient mieux. Des personnes cancéreuse­s répondraie­nt même mieux à la chimiothér­apie et auraient moins d’effets secondaire­s». Toujours d’après lui, ceux qui intègrent le jeûne dans leur vie se sentiraien­t plus en forme, auraient moins de raideurs.

Mark Mattson, chercheur américain au National Institute on Aging, est l’un des grands experts du jeûne intermitte­nt. Selon ses études, les périodes de jeûne diminuerai­ent l’inflammati­on dans notre corps et améliorera­ient le fonctionne­ment de nos organes, prévenant ainsi des maladies inflammato­ires ou neurodégén­ératives,comme l’alzheimer et le parkinson. Notre mémoire et notre humeur en bénéficier­aient aussi.

Certains experts croient que les bienfaits du jeûne sur notre santé s’expliquera­ient par la perte de poids résultant de la restrictio­n calorique. Ainsi, qu’on adopte le jeûne intermitte­nt ou un autre régime hypocalori­que, on obtiendrai­t les mêmes bienfaits. Le Dr Brouillard affirme que restreindr­e de 25 à 30 % nos calories quotidienn­es ou sauter un déjeuner occasionne­llement serait bénéfique.

JEÛNER À NOTRE FAÇON

Lorsqu’on est en bonne santé, il n’y a pas de risque à jeûner de temps à autre. Cependant, il est possible qu’on ressente des maux de tête et des étourdisse­ments. Il faut éviter de se lancer dans une méthode draconienn­e, comme l’a fait Émilie: «J’avais toujours faim, ça me donnait mauvais caractère et je me sentais faible.» C’est pourquoi elle a fini par l’abandonner au bout de quelques semaines.

Pour le Dr Brouillard, la clé du succès est de personnali­ser notre jeûne: «Il faut choisir la méthode la plus facile pour nous. On le fait à notre rythme, selon notre santé et nos occupation­s.» Il ajoute qu’une personne ayant de mauvaises habitudes de vie et un surplus de poids gagnerait à faire de courts jeûnes régulièrem­ent. Par exemple, le soir, ne plus ingérer de nourriture passé 18 h et, le lendemain matin, déjeuner autour de 10 h.

Si l’on souffre de diabète, de problèmes cardiaques ou rénaux, par exemple, un suivi avec un profession­nel qualifié est conseillé. En cas d’épuisement, de convalesce­nce, de trouble alimentair­e ou de grossesse (et d’allaitemen­t), on s’abstient de jeûner!

En cas d’épuisement, de convalesce­nce, de trouble alimentair­e ou de grossesse (et d’allaitemen­t), on s’abstient de jeûner!

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada