Coup de Pouce

LES PIEDS À L’ÉTRANGER, LE COEUR AU QUÉBEC

- Par Julie Roy Illustrati­on: Marie-Eve Tremblay/Colagene.com/c

LA FAMILLE CÔTÉ-CAMPBELL S’EST PAS MAL PROMENÉE AU COURS DES DERNIÈRES ANNÉES: UN PEU PARTOUT AU CANADA

ET EN FRANCE, PUIS DANS LE SUD DE L’ITALIE, OÙ ELLE EST INSTALLÉE DEPUIS PRESQUE UN AN.

« Quand mes filles ont le mal du pays, je leur cuisine un pâté chinois et elles le dégustent comme si c’était de la grande gastronomi­e!» raconte Sophie Campbell, dont le conjoint est militaire. Une belle façon de faciliter l’acclimatat­ion à un nouvel endroit.

Bucolique? Charmant? « Les premiers mois en Italie ont été déstabilis­ants et remplis de défis», précise Sophie. Fille d’une féministe de la première heure, elle a vécu quelques chocs culturels intenses. « Je me suis fait siffler dans la rue, ce qui ne m’était pas arrivé depuis très longtemps! Et à l’école de ma benjamine, on semble encourager les filles à être plus spectatric­es que sportives en éducation physique. Les valeurs sont, à certains égards, différente­s de celles du Canada», dit-elle. Et c’est sans parler de la barrière de la langue – l’anglais n’y est pas parlé partout – et des différence­s sur le plan de l’alimentati­on. «Après des semaines de pizzas et de pâtes, les filles m’ont réclamé de la poutine. Inutile de vous dire que c’était assez difficile de dénicher du fromage en grains!»

Apprendre à vivre ailleurs, avec tout ce que cela comporte de bouleverse­ments, peut se révéler ardu, en particulie­r lorsqu’on ne parle pas la langue et qu’on connaît peu l’endroit. «En voyage, on est déstabilis­é. Nos besoins de base, comme celui de se sentir en sécurité, ne sont pas tout à fait comblés, et il est possible qu’on ressente un certain inconfort», explique l’auteure et psychologu­e Lucie Mandeville. Spécialist­e de la psychologi­e positive, elle précise que, dans la vie, on a tendance à s’attacher à nos habitudes, qu’elles soient mauvaises ou pas. «Celles-ci font partie de notre identité. En leur absence, on peut se sentir un peu perdu», ajoute la psychologu­e.

C’est exactement pour cette raison que Sophie a toujours tenu à ce que ses filles parlent en français à la maison, mais aussi à l’école quand c’est possible. Pour Sophie, le fait d’écouter de la musique d’ici, de suivre les nouvelles canadienne­s, de lire des auteurs québécois l’aide à maintenir bien vivant son sentiment d’appartenan­ce envers son pays d’origine. «Depuis quelques mois, dans l’auto, Hubert Lenoir joue en boucle!» rigole Sophie.

«Par ailleurs, ça ne nous empêche pas de vouloir découvrir la culture des endroits où l’on s’installe. Comme les filles ont grandi dans plusieurs contrées, elles sont devenues à la fois très ouvertes aux autres et très fières de leur identité québécoise», explique Sophie. «Personnell­ement, je dirais même que les voyages que j’ai faits dans la dernière année m’ont été d’une grande utilité pour apprivoise­r ce nouveau pays.»

Cela dit, parfois, les frontières entre ceux qu’on aime et nous demeurent bien difficiles à franchir. «Mon père est malade, ce qui l’empêche de venir nous voir. Ça nous rend tous inquiets», avouet-elle. Heureuseme­nt, malgré une connexion internet à vitesse variable, toute la famille peut prendre des nouvelles de grand-papa par Facetime. Il arrive aussi que des amis canadiens traversent l’océan pour passer du temps avec eux, comme ce sera le cas bientôt. «La meilleure amie d’une de mes filles viendra sous peu nous visiter avec sa maman», ajoute Sophie. Ces moments-là, assez rares, sont particuliè­rement précieux.

L’exploratio­n d’un nouveau milieu de vie tout en gardant un contact avec nos proches serait-elle la recette pour vivre loin sans trop s’ennuyer? L’un ne devrait pas exclure l’autre, selon Lucie Mandeville. «Le contact qu’on garde grâce à internet nous procure une forme de réconfort.» Cependant, il faut aussi profiter de l’occasion pour mieux comprendre notre terre d’accueil. «Les humains, où qu’ils soient, se ressemblen­t plus qu’on le pense. Ce serait triste de revenir chez soi en n’ayant pas vu ce qui nous unit aux autres», ajoute-t-elle.

Une des découverte­s qu’a faites Sophie en arrivant en Italie, c’est l’amour des Italiens pour les feux d’artifice. «Tous les soirs, ou presque, on peut les voir, mais surtout les entendre. J’ai appris récemment que c’était une tradition d’ici. Pour célébrer un anniversai­re, on allume des feux d’artifice à l’heure de naissance exacte de la personne.» Cette année, Sophie se promet bien d’en faire éclater quelques-uns… le 24 juin. Célébrer une tradition bien québécoise en adoptant une coutume tout italienne, n’est-ce pas une chouette idée pour vivre heureux, où que l’on soit?

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada