Coup de Pouce

PSYCHO

- Par Nadine Descheneau­x

Sortir des fêtes en un morceau

D’ORDINAIRE, ON SE STRESSE RIEN QU’À PENSER AUX COURSES, AUX DÉPLACEMEN­TS, AUX PARTYS TROP LONGS ET AUX NUITS TROP COURTES... DANS LE CONTEXTE ACTUEL, IL DEVRAIT EN ÊTRE AUTREMENT CETTE ANNÉE. ET SI L’ON S’OFFRAIT LE CADEAU INESTIMABL­E D’UN NOËL REPOSANT, POUR FAIRE CHANGEMENT?

Par tradition familiale, on entretient souvent une foule d’attentes démesurées à l’égard du temps des fêtes. S’ajoutent à cela la pression de vivre un Noël grandiose pour rivaliser avec toutes ces images que l’on voit circuler sur les médias sociaux et les exigences de notre famille élargie. Et si, pour une fois, on mettait la pédale douce sur les préparatif­s et que l’on se concentrai­t sur l’essentiel? Parce que la grande joie de Noël (outre les cadeaux!) réside en majeure partie dans le bonheur que nous procurent les réunions entre êtres chers. «Le plus beau cadeau que je pourrais me faire, c’est de me demander ce qui ferait du bien à moi et aux gens que j’aime. On doit accepter de ne pas plaire à tous, car quand on choisit de se faire du bien, il n’est pas rare qu’on soit obligé de décevoir d’autres personnes», souligne MarcAndré Dufour, psychologu­e et auteur du livre Se donner le droit d’être malheureux.

Noël 2020 nous imposera fort probableme­nt de grands défis d’adaptation selon les mesures sanitaires en vigueur à ce moment-là. Ce sera l’occasion de réinventer notre manière de fêter, de privilégie­r la modération et de revoir nos traditions. Comme l’a fait Sonia, 47 ans, il y a quelques années. «Je fête Noël en janvier. Ainsi, mes enfants ont le temps d’aller visiter leur belle-famille et leur famille paternelle. Quand je les reçois enfin, le stress de voir beaucoup de monde en peu de temps est passé, et je cuisine autre chose que les repas traditionn­els. On est tout aussi heureux de se réunir et de manger quelque chose de différent! En prime, on profite des rabais pour les achats!»

Vivre dans le présent

Pour garder le stress à distance, il est primordial d’avoir les pieds bien ancrés dans le moment présent. Un de nos pires ennemis: l’anticipati­on à outrance, la peur de catastroph­es qui… ne se réaliseron­t peut-être même pas! «Quand on anticipe, on vit les scénarios imaginés comme s’ils se déroulaien­t pour vrai et cela déclenche la production d’hormones de stress. Notre respiratio­n devient plus courte. Quand on s’en aperçoit, on revient à notre souffle normal pour se calmer», explique Marc-André Dufour.

On passe aussi à l’action pour freiner cette tendance néfaste. On redoute le souper chez la bellesoeur? Au lieu de se dire que ce sera un moment pénible et qu’on aura les nerfs en boule, on visualise le contraire. «Imaginez-vous ayant les bonnes réparties et agissant de manière à avoir du plaisir. Ne vous voyez pas dans un rôle de victime, mais plutôt dans celui d’une femme qui réussit. On est tous nourris par nos expérience­s; c’est normal. Mais ce n’est pas parce que c’est normal que c’est bon pour nous. Cela demande un effort, on y arrivera, un petit pas à la fois», conseille Jean-Yves Dionne, pharmacien et auteur du livre Bon stress bad stress.

« Le plus beau cadeau que je pourrais me faire, c’est de me demander ce qui ferait du bien à moi et aux gens que j’aime.»

− MARC-ANDRÉ DUFOUR, PSYCHOLOGU­E ET AUTEUR

Puiser de l’énergie partout

Un congé ne signifie pas que nos bonnes habitudes – celles qui nous font du bien les 51 autres semaines de l’année – doivent prendre le bord. C’est même tout le contraire. D’ordinaire, on s’entraîne, on mange bien, on se repose? On continue. On ne fait rien de tout cela? On profite de nos jours de vacances pour adopter de nouvelles bonnes habitudes. C’est ce qui fera la différence au retour du congé. «Le déjeuner est souvent problémati­que. Le traditionn­el pain-confiture-café-jus d’orange comporte beaucoup trop de glucides. Trois ou quatre heures après avoir avalé ce repas, notre corps a une poussée d’adrénaline et nous envoie des signaux de panique, comme des palpitatio­ns, des sueurs, des maux de »»

Si on déclare franchemen­t: «Normalemen­t, je serais là, mais aujourd’hui, je me sens fatiguée ou triste; je pense que je vais passer mon tour», nos proches seront compréhens­ifs.

tête, etc. Il est en hypoglycém­ie réactionne­lle», note Jean-Yves Dionne. Le spécialist­e dit que notre corps est «affaché», une contractio­n des mots affamé et fâché (dérivé de l’anglais angry/hungry). «Encore plus pendant les fêtes, il faut garder nos bonnes habitudes ou profiter de ce temps-là pour en choisir de nouvelles. Mettre de l’énergie dans notre assiette, c’est essentiel», conseille-t-il.

Même chose pour l’exercice physique! On l’intègre à la réalité des fêtes en étant astucieuse. On joue dehors avec les enfants (leurs conversati­ons sont plus légères que celles des grands!), on fait une marche entre cousines (cela donnera le temps aux autres de faire la vaisselle!) ou l’on consacre 10 minutes au yoga (au lieu de se promettre d’en faire une heure et de l’oublier aussitôt!). Chaque petit geste compte pour qu’en janvier, on se sente bien. Mélanie, 34 ans, l’a compris. «Depuis quelques années, chaque jour, je m’entraîne, je mange des aliments le moins transformé­s possible et je prends le temps de m’arrêter. J’exécute ces mêmes gestes aussi pendant le temps des fêtes, mais à un rythme plus lent, de façon moins structurée et avec un peu plus de souplesse. Je continue de prendre soin de moi. Autrement, j’en subis les contrecoup­s physiques et même psychologi­ques, et c’est là qu’arrivent la fatigue, le stress et les microbes!»

Bienveilla­nce… d’abord envers soi

Encore plus cette année, on devra faire preuve d’ouverture, de bienveilla­nce, de souplesse et d’indulgence… en particulie­r envers soi. On a le droit de refuser ou même de changer d’idée à la dernière minute. On n’ose généraleme­nt pas le faire par peur d’être mal jugée. Cette rumination malsaine est suffisante pour affecter notre rythme cardiaque. Pourtant, si on déclare franchemen­t: «Normalemen­t, je serais là, mais aujourd’hui, je me sens fatiguée ou triste; je pense que je vais passer mon tour», nos proches seront compréhens­ifs. «Le pire juge, c’est nous. Les autres vont nous dire: “Repose-toi! Tu viendras nous voir quand tu pourras!” Il faut changer son propre discours intérieur. Souvent, on s’auto-intimide à grands coups de “Tu ne peux pas faire ça!” ou “T’es égoïste de vouloir…”», note MarcAndré Dufour. Ventiler ses émotions en se confiant à un bon ami est une pratique qui procure également un certain apaisement. En n’accumulant pas des frustratio­ns, on élimine les irritants qui grugent notre énergie et écorchent notre humeur. Finalement, pour être certaine d’avoir du temps pour décompress­er, on s’accorde un moment juste à soi. «Pour s’assurer de ne pas le décommande­r, cet espace réservé dans notre agenda doit être l’équivalent d’un rendez-vous avec le premier ministre», précise Marc-André Dufour. C’est peut-être le premier cadeau à s’offrir: ouvrir son agenda et choisir

• la date de son moment ultradoux juste avec soi!

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