Contraception: quoi de neuf, docteur? -
Plus de 15 % des femmes de 15 à 49 ans prennent la pilule anticonceptionnelle au Canada et aux États-Unis. Pour certaines, elle ne cause aucun problème, alors que, pour d’autres, elle perd en efficacité avec le temps ou a des effets indésirables. Ça vaut donc la peine de s’arrêter un moment pour étudier toutes nos options!
Dans le monde entier, ce sont près de la moitié des grossesses qui ne sont pas planifiées, ce qui en dit long sur les méthodes qui permettent de profiter de sa sexualité l’esprit tranquille. En novembre 2022, le magazine scientifique Translational Medicine révélait les conclusions d’une étude étonnante concernant la contraception. Une équipe scientifique suédoise a testé l’efficacité contraceptive du renforcement topique de la glaire cervicale avec des polymères mucoadhésifs de chitosane. En langage ordinaire, disons simplement qu’on s’est servi d’une barrière adhérente aux muqueuses du corps, et inoffensive pour celui-ci, afin d’essayer de barrer la route aux spermatozoïdes.
Dans l’étude in vitro, les chercheurs ont observé le comportement des chitosanes, des molécules biodégradables et biocompatibles qui se diffusent passivement dans la glaire cervicale, le mucus à l’intérieur du canal cervical. Bien dispersés à cet endroit, les chitosanes empêchent les spermatozoïdes de pénétrer la glaire et donc de faire leur éventuel travail de fécondation. Les chercheurs ont développé un gel de chitosane qui, appliqué à des brebis avant l’insémination artificielle, entraîne une réduction marquée du nombre de spermatozoïdes atteignant «leur but». Même si davantage d’études montrant l’effet contraceptif de ce gel seront nécessaires avant sa commercialisation, ces résultats indiquent que le gel de chitosane pourrait offrir une solution de rechange aux méthodes contraceptives hormonales que l’on connaît, et ce, dans un avenir rapproché.
La pilule sous la loupe
En janvier dernier, la revue scientifique Frontiers in Neuroendocrinology déclinait la liste impressionnante des avancées scientifiques concernant la pilule contraceptive en dévoilant les exploits d’une équipe de recherche de la Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa. Nafissa Ismail, titulaire de la Chaire de recherche de l’Université sur le stress et la santé mentale, professeure titulaire à l’École de psychologie et directrice du laboratoire NISE (NeuroImmunologie, Stress et Endocrinologie), signe en partie cette étude révélant, une nouvelle fois, les faiblesses de «la pilule» classique.
La recherche menée par son équipe dévoile que les effets indésirables des contraceptifs oraux, autant sur l’humeur que sur le corps en général, pourraient être fonction de l’âge de la patiente au moment de la prise de sa première pilule ainsi que de son microbiome intestinal. «[Les contraceptifs oraux] comptent parmi les médicaments les plus utilisés chez les femmes. On estime qu’elles sont 100 millions à en prendre dans le monde, explique la scientifique dans une entrevue diffusée sur le site de l’Université d’Ottawa. Ils contiennent habituellement des hormones synthétiques et sont souvent prescrits à des adolescentes à différentes fins, principalement la contraception, le traitement de l’acné et celui du syndrome prémenstruel.» Dans l’étude parue dans Frontiers in Neuroendocrinology, on estime que 20 % des femmes qui ont choisi la méthode des contraceptifs oraux vivront avec des effets indésirables cognitifs ou liés à l’humeur. ›››
Plusieurs jeunes femmes prennent la pilule à un moment critique de leur développement, soutient la professeure. «Sachant que les contraceptifs oraux passent par l’intestin, nous pensons que le microbiome intestinal jouerait un rôle important dans la dépression, car il peut en moduler les symptômes», affirme-telle dans l’entrevue effectuée par l’Université d’Ottawa.
Et après?
En raison de ces effets secondaires, bon nombre de scientifiques déplorent le manque de recherche en ce qui a trait à la santé féminine et, du même coup, à la contraception. Le magazine Contemporary OB/GYN promet que plusieurs nouvelles méthodes de contraception nous seront proposées sous peu et que de nouvelles avancées rendront nos méthodes actuelles plus efficaces. D’abord, plusieurs nouveaux modèles de dispositifs intra-utérins (DIU) non hormonaux ont été approuvés récemment. En d’autres mots, c’est le bon vieux stérilet non hormonal qui est «revu et amélioré». Mirena est l’un des trois dispositifs de ce type disponibles au Canada. Auparavant, son efficacité ne dépassait pas six ans. Aujourd’hui, elle atteint sept et peut-être même huit ans, selon des études en cours. Mirena assure un taux de réussite de 99,6 %. C’est l’un des principaux avantages du stérilet: nous permettre d’avoir l’esprit tranquille… pendant sept ans!
Et la mine dans le crayon, elle?
La gent féminine, qui porte son chapeau de grande responsable en chef de la non-procréation dans un couple hétérosexuel depuis des décennies, attend patiemment qu’on lui propose une autre option. Les femmes pourront peut-être dorénavant compter sur leur partenaire, et pas seulement en leur tendant habilement un condom au moment opportun. En effet, dans Contemporary OB/ GYN, la Dre Kathleen Morrell, directrice de la Division de la planification familiale au service d’obstétrique et de gynécologie du Maimonides Medical Center, à New York, évoque un marché émergent: la contraception masculine. Deux projets sont dans le collimateur: le premier est un gel et l’autre un comprimé.
Le gel, composé de progestérone et de testostérone, doit être frotté chaque jour sur la poitrine ou les épaules de l’homme. La progestérone empêche la production de sperme et la testostérone contrebalance la perte de libido associée à la progestérone.
La «pilule homme», quant à elle, est non hormonale et on l’étudie actuellement sur des souris. Au cours des quatre semaines qu’a duré l’essai clinique, on a administré oralement la pilule à des souris mâles. Celle-ci cible une protéine du corps pour permettre une réduction draconienne du nombre de spermatozoïdes. Les chercheurs ont remarqué que, dans 99 % des cas, on réussissait à prévenir la grossesse chez les souris femelles, et ce, sans effets secondaires observables. Autre fait intéressant: les effets de la «pilule masculine» étaient réversibles dans les quatre à six semaines suivant l’emploi. En d’autres mots, on pouvait aisément donner naissance à des souriceaux environ un mois après avoir arrêté la pilule.