Louis de Santis: de merveilleux souvenirs
LOUIS DE SANTIS A FAIT LES APRÈS-MIDIS DES TOUT-PETITS PENDANT 20 ANS DANS LA BOÎTE À SURPRISE. ON L’A CONNU SOUS LES TRAITS DU CLOWN BIM DANS LE CÉLÈBRE DUO BIM ET SOL, AVEC LE REGRETTÉ MARC FAVREAU. L’HOMME DE 92 ANS A ENCORE TOUTE SA SUPERBE ET SE LIVRE AVEC PLAISIR.
Le prétexte de notre rencontre est l’exposition Tout un cirque!, présentée à la TOHU, haut lieu des arts du cirque à Montréal. L’ancien clown, comédien et peintre a encore du panache et a le rire facile. Il nous reçoit dans son bel appartement d’Outremont, où trône une immense toile du peintre québécois Mousseau et d’autres oeuvres d’art. Les yeux se posent sur le mont Royal et même sur le mont Saint-Bruno au loin. La vue est superbe, et le vieil homme a encore du charme.
DES ÉTUDES À PARIS
Il s’étonne que j’aie avec moi d’anciennes photos. Cela le fait sourire. Elles proviennent des archives d’Échos-Vedettes. Il est content de replonger dans ses souvenirs. Le dictionnaire français Le petit auguste alphabétique le présente comme un des pionniers de l’art clownesque au Québec. De Santis n’est pas un patronyme courant au Québec. Je lui demande d’où vient son nom de famille.
Le père de Louis de Santis est italien et, dès l’âge de 14 ans, il part vivre chez une tante à Boston. Puis il vient travailler au Québec comme ingénieur, et tombe en amour avec la seule fille bilingue de Baie-Saint-Paul. Ils auront neuf enfants et le petit dernier, Louis, deviendra clown. Les écoles de théâtre et les conservatoires n’existant pas à l’époque, Louis part étudier à Paris, à la célèbre école d’Étienne Decroux. Petite parenthèse: avec les années, Decroux développera l’art du mime et formera des acteurs venus du monde entier, dont Marcel Marceau, un des plus grands mimes de tous les temps. Celui-ci reproduira dans ses spectacles le mouvement en rétroglissade (moonwalk) que lui a appris Étienne Decroux. Ce dernier serait donc le véritable père du moonwalk de Michael Jackson.
LA BOÎTE À SURPRISE
En revenant de Paris en 1954, on lui offre une nouvelle émission conçue et réalisée par Claude Fournier, La Boîte à Surprise. On donne un canevas aux comédiens et on improvise beaucoup. La première de l’émission a lieu le 2 décembre 1956. Le réalisateur trouve le nom de Bim pour le personnage de Louis de Santis. On propose à Bim de travailler avec Nok, campé par nul autre que Jean-Louis Millette qui, un an plus tard, quitte l’émission pour d’autres projets. Radio-Canada lui cherche un remplaçant. Ce sera Marc Favreau et son clown auguste, Sol. Bim et Sol seront en ondes de 1954 à 1968.
Louis de Santis quittera l’émission, n’ayant pas réussi à obtenir une augmentation de salaire. À partir de 1962, Louis de Santis et Marc Favreau
écrivent entièrement leurs textes. «Pierre Thériault, le père de Serge Thériault de Ding et Dong, était Monsieur Surprise. Il y avait Le pirate Maboule qui donnait des suçons à ma fille. Ç’a été des moments de télévision extraordinaires. Il y avait plein de personnages. Plusieurs acteurs qui les incarnaient sont morts, mais certains, comme moi et Kim Yaroshevskaya, qui jouait Fanfreluche, sont toujours vivants.»
Louis de Santis fera des voix dans Nic et Pic, l’histoire de deux mignonnes petites souris, et il jouera le Sergent Foudre dans Maigrichon et Gras-double. «Mon personnage était toujours de mauvaise humeur. Et je me souviens que l’auteur me donnait souvent de très longues tirades à apprendre.»
L’APPEL DU THÉÂTRE
Louis de Santis sera aussi comédien au théâtre et sera de la distribution de plusieurs téléromans. «J’ai joué au Rideau Vert, au TNM, chez Duceppe et dans les théâtres d’été. J’ai été de la création des pièces de théâtre de Félix Leclerc. J’ai même joué Le Petit Bonheur à Paris, aux Trois Baudets, se remémore-t-il. J’ai beaucoup joué au théâtre d’été avec Monique Chabot. J’ai aussi joué avec Yves Massicotte dans de nombreuses pièces.» L’homme a également tenu des rôles dans plusieurs téléromans, que ce soit Terre humaine, Rue des Pignons, Rue de l’Anse, Le temps d’une paix...
PROFESSEUR AU CÉGEP
Il enseignera le théâtre durant 25 ans au cégep de Saint-Hyacinthe. Il en a été le chef de département pendant plusieurs années. «Je donnais des cours que je me plaisais à appeler des cours d’atmosphère, dira-t-il, le regard rêveur. Je donnais aussi des cours de mime, d’expression corporelle. C’est un art d’apprendre à faire une belle grimace. Alain Zouvi, qui est devenu mon ami, y a enseigné en même temps que moi pendant plusieurs années...»
Avant de se marier et d’avoir de nombreuses obligations familiales et professionnelles, Louis de Santis aimait peindre. Il avoue le faire encore à l’occasion. Mais ses plus beaux souvenirs restent la création de son personnage de Bim. «Quelqu’un a dit que les génies viennent de sang mêlé, d’une famille nombreuse et sont les derniers-nés. C’est tout moi, ça!» dit-il en éclatant de rire. Un beau rire sonore qui fend l’air et qui nous laisse entrevoir le clown qui vit encore gentiment en lui...
Ne manquez pas l’exposition Tout un cirque! – La grande aventure du cirque québécois, présentée à la TOHU jusqu’au 28 mars 2022. Vous pouvez voir le costume de Bim ainsi que des photos de La Boîte à Surprise, entre autres.