Échos vedettes

Frédéric Pierre: une réflexion sur notre époque

- MARIE-CLAUDE DOYLE

LE COMÉDIEN FRÉDÉRIC PIERRE TOURNERA UNE PAGE D’HISTOIRE EN JOUANT AU THÉÂTRE DANS HÉRITAGE. CONSIDÉRÉE COMME UNE OEUVRE PHARE DE SON ÉPOQUE, LA PREMIÈRE PIÈCE D’UNE AFRO-AMÉRICAINE À ÊTRE PRODUITE À BROADWAY OUVRIRA LA SAISON THÉÂTRALE CHEZ DUCEPPE.

Ce qui a d’abord interpellé Frédéric Pierre dans cette oeuvre de l’autrice Lorraine Hansberry, c’est le fait que les deux codirecteu­rs artistique­s de chez Duceppe aient décidé d’honorer la dramaturgi­e afro-américaine. «Avant même le contenu de l’oeuvre, c’est le moment historique au théâtre québécois francophon­e qui m’a interpellé, parce que, du côté anglophone, il s’en est monté des shows avec des noirs au Black Theatre Workshop, qui existe depuis longtemps à Montréal. Après ça, c’est une histoire de famille tellement humaine. Oui, il y a tout le contexte de l’oppression et de la façon dont cette famille noire des années 1950 vivait son oppression, mais, au-delà de ça, ce sont des dynamiques de famille, de liberté individuel­le. C’est du théâtre contempora­in. La courbe de mon personnage m’a tout de suite séduit. C’est un gars qui ne va pas bien. Je savais que c’était un beau défi de jeu pour moi», explique le comédien.

Frédéric Pierre incarne Walter Lee Younger, un des enfants de la famille Younger, dont trois génération­s vivent sous le même toit dans un petit appartemen­t d’un quartier pauvre de Chicago. Au décès du père, la famille attend la prime d’assurance de 10 000 $ et chacun songe à ce qu’il pourrait faire avec cet argent. «Walter est le mouton noir de la famille. Il veut se lancer en affaires et ouvrir un magasin d’alcools. Il se voit riche, mais sa vie ne va pas bien. Il a toute sa famille à dos. Son mariage ne va pas bien. La seule relation qui va, c’est celle avec son fils. Il se sent doublement rejeté: par la société dominante blanche, et à l’intérieur même des quatre murs de l’appartemen­t où il vit avec sa famille. Il se sent incompris et personne ne l’appuie dans ses affaires.»

UNE RÉFLEXION SUR NOTRE ÉPOQUE

Sur 10 acteurs dans la pièce, 9 sont de race noire. Quand on lui demande s’il y a encore à faire sur le plan de la diversité, il répond: «Oui, mais l’effort est mis, il faut juste continuer. La compagnie Jean Duceppe décide d’ouvrir sa saison avec un classique afro-américain. La ségrégatio­n n’est pas ce qu’elle était, mais on revit en ce moment quelque chose d’assez troublant en Amérique du Nord. Il y a quelque chose de profondéme­nt ancré dans l’Amérique blanche qui ressort et qui fait peur. Aux États-Unis, c’est le retour d’un racisme flagrant, qui est plus sournois; c’est le retour des néonazis. Il y a un président raciste qui encourage la xénophobie. Je trouve ça hot que ce show-là (Héritage) se fasse en ce moment, parce que c’est un peu la réflexion que ça enverra au public 70 ans plus tard, à savoir on en est où?»

UNE BELLE AVENTURE

Depuis près de 10 ans, Frédéric Pierre vit une belle aventure sur scène dans Ladies Night. «Je pense que, même à ma retraite, je vais toujours me souvenir des années de Ladies Night. Ne serait-ce que d’avoir un gagne-pain constant et une belle gang, ç’a été exceptionn­el. Chaque fois, les gens veulent venir voir le phénomène. Ils savent qu’ils vont rire. On n’est jamais nerveux avant de jouer.» Des représenta­tions sont annoncées jusqu’en mai 2020.

Cet automne, on retrouvera l’acteur dans 5e rang, à Radio-Canada, sous les traits de Nicolas Giguère, le conjoint de Sophie (Julie du Page), puis il sera dans la nouvelle série Alerte Amber, à TVA. Il jouera Renaud Magloire, un enquêteur de l’Escouade spéciale pour personnes disparues.

«On revit quelque chose d’assez troublant en Amérique du Nord.»

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