Nancy Saunders: le bouche-à-oreille
Nancy Saunders
AVEC LA SÉRIE ÉPIDÉMIE, DIFFUSÉE À TVA, ON A DÉCOUVERT UNE NOUVELLE COMÉDIENNE EN LA PERSONNE DE NANCY SAUNDERS. CELLE QUI DONNE VIE AU PERSONNAGE DE NELLI KADJULIK EN EST À SES DÉBUTS À LA TÉLÉ, MAIS SA FEUILLE DE ROUTE COMME ARTISTE EST DÉJÀ TRÈS IMPRESSIONNANTE.
Nancy Saunders est originaire de Kuujjuaq, au Nunavik. «J’ai besoin d’y retourner souvent; j’y vais pour me ressourcer», raconte-t-elle avant de préciser qu’elle vit à Montréal depuis une dizaine d’années. Avant de s’y établir, il s’est passé cinq années au cours desquelles elle a habité à plusieurs endroits, dont Ottawa, Blainville et la Bolivie. «J’ai participé à un programme de développement durable dans une communauté rurale.»
Nancy a 12 ans lorsque sa famille et elle quittent le nord du Québec pour s’installer à Saint-Lin, dans les Laurentides. «Après mes études secondaires, j’ai voyagé un peu partout parce que je ne savais pas ce que je voulais faire. Je suis entre autres retournée à Kuujjuaq, où j’ai fait du remplacement à l’école primaire. J’ai alors pris la décision de devenir enseignante au primaire.»
Elle entreprend donc de terminer le cursus secondaire. Puis un autre temps d’arrêt s’impose à elle, mais pas question de ne rien faire. Nancy décroche un emploi à l’institut culturel des Inuits du Nunavik (Avataq). «J’y ai découvert toutes les opportunités qu’il y avait pour les artistes.»
UN TOURNANT INATTENDU
À Avataq, Nancy Saunders se remet au dessin et à l’aquarelle. Niap est son nom d’artiste, qui vient d’une charmante anecdote. «C’est une abréviation d’une mauvaise prononciation de mes trois frères cadets des mots “grande soeur”.»
Son amoureux lui fait remarquer que des gens seraient peut-être intéressés par ce qu’elle crée. «J’ai donc partagé ce que je faisais sur Internet et j’ai commencé à en vendre.»
Pendant son année à Avataq, une de ses tantes est décédée de façon inattendue. En deuil, Nancy se rend à Kuujjuaq pour les funérailles et y reste pendant plusieurs semaines. «Je me suis remise en question et j’ai réfléchi à ce que je voulais faire et à ce que je n’arrêtais pas de repousser.» Les réponses qui lui venaient en tête tournaient autour de la création. «J’ai donc décidé que je ne pouvais plus remettre ça.» Elle se trouve alors un programme de formation en arts au cégep. «Et tout ce que je faisais à l’école, je le vendais aussi», précise-t-elle.
LE BOUCHE-À-OREILLE
Se sont ensuite succédé divers stages et résidences d’artistes, dont quelques semaines à Paris pour poursuivre son apprentissage de la sculpture. Nancy fait du dessin, de l’aquarelle, de la sculpture, de la peinture, du perlage traditionnel, de la couture et des chants de gorge. Le bouche-à-oreille a commencé. «Chaque fois qu’on avait besoin d’un artiste inuit, on me recommandait.» Elle participe ainsi à une exposition liée à un festival de marionnettes. L’artiste propose une idée de projet qui dormait dans ses tiroirs et obtient même une bourse. «J’ai fait mon installation sculpturale et quelqu’un a dit à quelqu’un...» Tant et si bien que Jacques Desrochers, le commissaire en chef du Musée des beaux-arts, se déplace et apprécie son oeuvre. Il s’intéresse à l’installation Katajjausivallaat, le rythme bercé, qui sera présentée au public du musée cette année lors du redéploiement de la collection d’art inuit. Le musée a aussi fait l’acquisition de quatre autres oeuvres de Nancy Saunders (Niap).
Quant au théâtre et à la télé, Nancy le répète, c’est le bouche-à-oreille qui l’y a amenée. Elle devait être assistante-scénographe pour la pièce Aalaapi (au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui l’an dernier), mais, en la voyant évoluer, on lui propose de faire partie de la troupe et de l’équipe de création. Ensuite, Annie Piérard, coauteure de la série Épidémie, voit le spectacle. Une audition plus tard, Nancy décroche le rôle de Nelli Kadjulik.
Dans les prochains mois, Nancy sera en tournée avec la pièce Aalaapi, préparera des expositions et fera confiance à la vie. Si les six prochaines années sont semblables aux six dernières, la vie sera bonne pour Nancy Saunders ou, si vous préférez, Niap.