«ON ENTRETENAIT DE BELLES CONVERSATIONS»

C’est en 1993 que Jim Corcoran connaît un véritable coup de foudre musical pour le premier album des Colocs. Une découverte mémorable qui le mènera rapidement à se lier d’amitié avec le leader du groupe. «Peu de temps après la sortie de l’album, Dédé est devenu mon voisin. Il vivait à quelques pas de chez moi et on se voyait souvent. On avait un respect mutuel l’un pour l’autre et on entretenait de belles conversations. Il avait ce désir de savoir ce que je pensais d’une chose ou d’une autre. Toutefois, Dédé n’était pas téteux et moi non plus. On était toujours contents de se voir, mais on ne se courait pas après.»

Jim Corcoran se souvient de Dédé Fortin comme d’un homme d’une grande sensibilité. «J’étais avec Dédé lorsqu’il a appris, en novembre 1994, la mort de son ami Patrick Esposito Di Napoli, qui était séropositif. (À noter que ce dernier a joué de l’harmonica au sein des Colocs jusqu’à sa mort.) Dédé savait qu’il allait mourir et il s’était arrangé pour que le premier album des Colocs soit entièrement composé de chansons joyeuses pour que Patrick puisse partir heureux. Ce n’est qu’à la suite de la mort de Patrick Esposito Di Napoli que Dédé s’est permis d’exposer son côté plus sombre.»

Par ailleurs, Jim Corcoran avait une grande admiration pour ce leader des Colocs qui ne se laissait rien imposer. «Dédé était un artiste totalement autonome et indépendant. Il ne se souciait pas d’être au goût du jour, de suivre la mode ou de se retrouver dans le top des palmarès. Au contraire, il avait cet instinct et cette forme d’abandon dans la créativité qui lui appartenaient. Il mettait clairement sur papier les sentiments qui l’habitaient. Les gens ont pris du temps à comprendre ce qu’il faisait, mais il a réussi à faire en sorte qu’une belle histoire d’amour s’installe entre les Colocs et le public québécois. Aujourd’hui, les chansons des Colocs traversent le temps, car elles ne sont pas attachées aux sonorités d’une époque bien précise. Ce sont des chansons qui continuent d’être appréciées et écoutées par des gens de différentes générations avec le même enthousiasme.»