Échos vedettes

«JE TOURNE UNE BELLE PAGE DE MA VIE»

– Mariana Mazza

- SAMUEL PRADIER

DANS SON LIVRE, MARIANA MAZZA A CHOISI DE RACONTER SON ENFANCE UN PEU ROCAMBOLES­QUE AVEC UN PÈRE QUI A PRIS LA FUITE ET UNE MÈRE QUI CUMULAIT LES EMPLOIS POUR FAIRE VIVRE SA PETITE FAMILLE. SANS PUDEUR NI RETENUE, ELLE NOUS LIVRE LES CLÉS QUI PERMETTENT DE MIEUX LA CONNAÎTRE ET LA COMPRENDRE. ON Y DÉCOUVRE SURTOUT UNE PETITE FILLE ADMIRATIVE DE SA MAMAN, SONIA, ET QUI SOUFFRE DE L’ABSENCE DE SON PAPA.

MONTRÉAL-NORD,

Mariana Mazza sentait que c’était le bon moment dans sa vie et sa carrière pour raconter son enfance, ses origines et les événements qui l’ont forgée en tant que femme. «J’avais besoin de sortir cette histoire de moi. Je voulais que les gens voient des choses qu’on ne perçoit pas en façade, explique-t-elle en entrevue. Je l’ai fait aussi pour mes amis, ma famille, les gens qui sont autour de moi et qui se posent parfois des questions. Mais je l’ai écrit aussi pour moi: ça m’a fait du bien. Je me rends compte que j’ai été chanceuse d’avoir eu malgré tout une belle enfance.»

À travers son histoire, on s’aperçoit que l’humoriste a bien des choses qui lui pèsent sur les épaules et qu’elle ne s’épargne guère les reproches. «J’ai toujours priorisé les autres. Je suis trop empathique pour penser juste à moi. Je me suis souvent tapé sur la tête pour plein de trucs. Il y a des choses que j’ai faites ou que j’ai dites qui sont banales, qui ne vont rien changer dans ma vie, mais que je regrette et qui me font encore de la peine.»

Le fait de s’être prêtée à l’exercice de raconter sa vie d’enfant à l’écrit lui a permis de reprendre un certain contrôle sur cette histoire. «Avoir pris le temps de mettre des mots sur une partie de ma vie, ça m’aide à fermer le chapitre de l’enfance. J’ai eu une enfance très étoffée. Elle est maintenant réglée. Je suis allée voir un psy pendant quelques années, et ça m’a fait du bien. J’ai eu les clés que je voulais, mais il y a une limite à ce que ça peut apporter. L’écriture me fait du bien, car ça me libère de beaucoup de choses. Ça m’a permis de tourner une belle page de ma vie.»

L’AMOUR DE SA MÈRE

Alors que, tout au long de son livre, Mariana dévoile différents moments charnières de son enfance, on constate qu’elle n’est pas seulement la fille colorée et espiègle qu’elle montre sur scène ou à la télé, mais qu’elle a aussi un fond nostalgiqu­e très important. «Je suis une fille festive et énergique. J’aime aussi me sentir enveloppée, dans le confort. J’aime sentir que je ne suis pas seule. Durant mon enfance, je me suis souvent sentie seule. Je suis plus souvent nostalgiqu­e et triste que très heureuse. Ça fait partie de moi. Je sens aussi ma mère très triste. Quand elle a lu le livre, elle s’est rappelé des choses qu’elle avait essayé d’oublier, mais elle va toujours de l’avant. J’ai de la misère à aller de l’avant comme elle.»

Pour son livre, Mariana a d’ailleurs questionné sa mère sur son passé, sur des événements marquants, voire tragiques, de sa vie. «J’ai toujours voulu savoir qui elle a été. Quand on était plus jeunes et qu’elle me racontait sa vie, ça changeait tout le temps. Cette fois-ci, comme elle savait que j’allais l’écrire, elle m’a donné l’heure juste. Ça explique beaucoup de choses sur elle, sur moi et aussi sur les gens qui émigrent au Québec. Les histoires d’immigrants sont toutes difficiles à entendre, mais elles ne sont pas forcément toutes vécues difficilem­ent. Ma mère a eu quatre jobs en même temps, mais ce n’était pas difficile pour elle. Ça la gardait en vie. De toute façon, je ne la verrais pas prendre sa retraite et ne plus rien faire; elle est comme ça. Le simple fait d’avoir le droit de travailler et de faire ce qu’elle veut, ça la rend heureuse. C’est une personne qui aime vivre et qui aime accomplir des choses. Elle a besoin d’action.»

Mariana confie même que sa mère serait plus délinquant­e qu’elle, mais que ce n’est ni réfléchi ni prémédité. «C’est une des raisons pour lesquelles je ne veux pas qu’elle vienne avec moi à la télé. Elle est beaucoup plus provocatri­ce que moi, et c’est naturel chez elle. Alors, je la protège. Cela dit, elle n’a aucune méchanceté. Elle est très naïve. Moi, je me préoccupe de ce que les gens pensent de moi, pas elle. Elle va, par contre, se préoccuper de moi en cherchant à savoir comment les gens vont me trouver: grosse, impolie ou bonne à l’école, mais elle se moque complèteme­nt de ce qu’ils pensent d’elle.»

SCÈNE TROUBLANTE

Un passage du livre va certaineme­nt faire vivre des émotions intenses aux lecteurs: celui où

Mariana et son frère, Juan, vont rencontrer leurs grands-parents maternels au Venezuela. Sans dévoiler la scène au complet, on peut juste dire que leur accueil a été glacial, voire hostile. «Je ne sais pas comment je me sens face à cette scène, même en ayant du recul. Ç’a été la scène la plus violente de ma vie. Je n’ai jamais compris pourquoi cela m’est arrivé. Encore aujourd’hui, quand j’y pense, je me sens exactement dans le même état que lorsque cela m’est arrivé. Je n’ai pas pardonné à ma grand-mère.»

TRISTE D’ÊTRE AIMÉE

Dans Montréal-Nord, l’autrice parle de son père, qui a quitté sa famille du jour au lendemain. Elle évoque aussi son frère, Juan, et ses demi-frères, nés du premier mariage de sa mère. «Ma relation avec mon frère est un peu compliquée actuelleme­nt, mais je suis toujours en contact avec les deux autres. Mohammed vit à Dubaï. Je suis déjà allée le voir. Ma mère y va chaque année. Wassim, le plus vieux, habite ici depuis cinq ans. Il possède plusieurs restaurant­s.»

Mais à la lecture de ce livre, ce qui est marquant, c’est la constante peur de Mariana d’être trop aimée, un sentiment qui l’habite depuis sa jeunesse. «Ça va être le combat de ma vie. Je ne sais pas pourquoi ça me rend triste d’être autant aimée. Le pire, c’est que je cherche cet amour. Mais quand je l’ai, ça me démolit. C’est très bizarre. Je cherche quelque chose que je sais que je peux avoir, et une fois que je l’ai, au lieu de m’emballer le coeur avec ça, j’ai de la difficulté.»

Avec le succès qu’elle connaît, tant pour ses spectacles et ses toiles que pour ses chroniques, on sent qu’elle se trouve dans un cercle vicieux qui ne la réconforte jamais. «J’ai un vide. Je suis faite comme ça. C’est comme quand tu arroses une plante et qu’elle n’est pas capable de retenir l’eau, mais qu’elle reste en santé pareil. C’est tout à fait moi. J’ai l’impression que ce n’est jamais suffisant. J’ai une belle vie, mais il y a toujours une petite tristesse qui m’habite.»

UNE TRILOGIE EN DEVENIR

Montréal-Nord est le premier volet d’une trilogie que Mariana Mazza va poursuivre dans les prochaines années. «Dans ce premier livre, je raconte mon enfance. Il va ensuite y avoir un livre sur mon adolescenc­e, puis un autre sur ma vie adulte. Mais le point commun de cette trilogie restera la tristesse qui m’habite et ma relation avec ma mère. Le premier est émotif, le second sera intense et le troisième sera plus intellectu­el.»

La table est mise pour la suite, et durant l’entrevue, elle nous a même dévoilé quelques anecdotes qu’on va trouver dans les prochains tomes, comme le jour où elle a appris la mort de son père ou encore le mariage de sa mère avec son beau-père…

«J’ai aménagé une pièce dans ma maison pour écrire. Mais j’accomplis beaucoup de choses en même temps. Je continue ma tournée et mes chroniques, je fais encore des toiles — on me fait même des commandes. J’ai mis un an et demi à écrire Montréal-Nord: j’ai appris le métier. J’ai maintenant tous les outils, il me faut juste du temps.»

Le 7 octobre, Ludovick Bourgeois lance son troisième opus de chansons originales. Nommée Rêveur, cette oeuvre musicale représente bien l’artiste. «Mon premier album n’avait pas de titre et le deuxième s’intitulait Ludovick Bourgeois 2. Je devais donc donner un nom au troisième. On a choisi celui d’une chanson, Rêveurs, mais on l’a mis au singulier, pour parler de moi. Parce que je suis quelqu’un de rêveur. J’aime la visualisat­ion, rêver, croire en mes rêves. J’aime aussi que les gens puissent se raconter leurs rêves. Je trouvais que ce titre me représenta­it bien et surtout, c’est ce que j’ai envie que le public fasse après deux années plus difficiles.»

Il est par ailleurs très heureux de retrouver le public pour lancer son album. «J’ai toutefois été chanceux, puisque j’ai eu des spectacles malgré tout. Or en musique, quand tu sors du matériel musical et que tu ne peux pas partir en tournée, c’est inutile. J’avais envie de proposer de nouvelles chansons aux gens qui me suivent.»

SE LANCER DES DÉFIS

Pour Rêveur, Ludovick a fait affaire avec une nouvelle équipe à la réalisatio­n. «On va me reconnaîtr­e, mais on va sentir un cheminemen­t chez moi qui est important. J’avais aussi envie d’aller chercher le meilleur de chaque personne qui travaille avec moi; c’est ce qui m’a mené à choisir plusieurs réalisateu­rs.» Étant un homme très cartésien, il n’a néanmoins pas eu de difficulté à lâcher prise pour la création de cet opus. «Je fais confiance aux gens avec lesquels je travaille, car je les ai choisis. Je suis créatif, mais ma force est de m’entourer de gens meilleurs que moi. Ç’a été relativeme­nt facile de lâcher prise, puisque je choisis les meilleures chansons et non les auteurs qui les ont composées.»

L’artiste qualifie cette oeuvre comme étant celle qui se rapproche le plus de lui. «C’est l’album qui me ressemble le plus, avec des sujets qui me touchent. Je parle de santé mentale, de parentalit­é, de ma fille, etc.» Pour elle est d’ailleurs

dédiée à sa fille, Sam. «La chanson qui me touche le plus est celle faite pour ma fille. C’est moi qui y joue le piano. Quand je l’ai écrite, Sam n’était pas encore née. C’est comme si je raconte ce que je vais faire dans le monde avant que ma fille arrive, ce que je ferai pour elle. Comme si je parlais à ma blonde, enceinte. Je pense que ma fille apprendra à apprécier cette chanson quand elle sera plus vieille.»

Plus habitué à la guitare, a-t-il trouvé difficile de jouer du piano sur sa chanson? «J’ai toujours un peu joué du piano en composant mes chansons. Mais je trouvais ça le fun de faire celle-là comme une berceuse. Je vais essayer de la jouer au lancement. C’est l’une des choses qui me stressent le plus.» Celui qui envisage toujours le pire scénario ne se crée d’ailleurs pas trop d’attentes pour son lancement. «Je vais donner le meilleur de moi-même et aller au bout de mes capacités, c’est ma façon de vivre de ne pas me créer d’attentes. Je suis groundé, mais je ne veux pas être déçu; ce n’est pas un sentiment que j’aime.»

UN PAPA GÂTEAU

Sa fille, qui a fait de lui un papa en octobre 2021, aura bientôt un an. «C’est extraordin­aire, être père! On se fait dire: “Tu vas voir, tu vas l’aimer, c’est indescript­ible.” Et c’est exactement comme ça que ça se passe. J’aime vraiment ça. Je me trouve bon, c’est le fun!» Il se décrit comme un papa généreux. «C’est encore récent pour dire quel genre de père je suis, mais je pense que je serai le genre à tout lui donner. Je risque d’avoir de la difficulté à dire non.»

La création de son nouvel album coïncidant avec la naissance de sa fille, cette grande nouveauté dans sa vie a-t-elle changé sa façon de créer? «Je dirais qu’à part l’évolution de ma musique et les sujets qui rejoignent la parentalit­é, ma carrière et ma vie ne changent pas. Ce sont d’autres éléments qui s’ajoutent. Je vis au jour le jour. Je trouve ça drôle de me faire dire que je suis papa, je ne suis pas encore habitué.»

Une tournée suivra le lancement de Rêveur, et Ludovick envisage plutôt bien la conciliati­on travail-famille. «Je l’ai déjà un peu vécu en faisant deux ou trois spectacles par semaine depuis sa naissance. Soit je trouve ça difficile, car je m’ennuie d’elle, soit je suis content de dormir à l’hôtel!»

Comme dans la chanson Promets toujours, présente sur son album, Ludovick et sa conjointe, Olivia, essayent le plus possible de s’arrêter, de s’écouter. «C’est ça, le défi. L’étape facile est de dire que c’est important de le faire. Le mettre en applicatio­n dans la réalité, ça devient plus compliqué. Comme n’importe quel couple qui a de jeunes enfants, il y a des défis. Mais c’est le fun de se rappeler nos rêves, de se

«J’ai 100 % la personnali­té de ma mère. Je lui dois tout.»

Cinq ans après constate-t-il que le public l’a un peu dissocié de l’émission et de son père, Patrick Bourgeois? «Je n’ai pas de réponse claire, puisque ce n’est pas moi qui me compare, mais les médias et le public. Je ne le vis pas comme ça. Je fais mon bout de chemin depuis un bon moment, et ça fait cinq ans que le public me connaît. Je ne sais pas s’il fera la différence un jour, mais ça ne me dérange pas. Si on me compare à mon père, c’est une bonne comparaiso­n.»

Dans le podcast Avec son Sam, il révèle à Sam Breton que sa mère a été la personne la plus importante dans sa vie. «C’est ma mère qui a été totalement là. Je te dirais que, oui, les gens me comparent à mon père, mais c’est physiqueme­nt, alors que j’ai 100 % la personnali­té de ma mère. Je lui dois tout. Je ne suis pas gêné de le dire, car c’est la vérité. L’histoire est plus romancée quand on parle de mon père, mais pour moi, c’est important d’avoir aussi l’apport de mes soeurs, de ma mère et de ma blonde.»

BIENTÔT 30 ANS

Celui qui aura 30 ans en janvier prochain estime ne pas avoir changé depuis La Voix. «Je crois être le même gars. J’ose croire que je suis quelqu’un de très authentiqu­e, mais j’ai mûri.» Le chiffre 30 ne change d’ailleurs rien à sa perception des choses. «Pour moi, ce n’est qu’un chiffre. Je suis plus en forme que jamais et je suis bien où je suis. Je suis heureux du chemin que j’ai pris.»

Son album s’intitulant Rêveur, on se demande donc à quoi rêve Ludovick Bourgeois. «De voyager avec ma musique. J’en rêve depuis que je suis jeune. Ça va dépendre des gens qui m’entourent, de mon équipe. J’aimerais au moins faire un spectacle à l’extérieur du Québec. Mais je n’ai pas encore tout fait ici, alors je me concentre donc sur la province et j’espère pouvoir un jour essayer autre chose.»

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Une maman très fière de sa fille, lors du vernissage de celle-ci en novembre dernier. Mariana avait présenté une quarantain­e de ses toiles à la galerie Institut National Art contempora­in, dans le Vieux-Montréal.
 ?? ?? Montréal-Nord, de Mariana Mazza, sort en librairie le 11 octobre.
Montréal-Nord, de Mariana Mazza, sort en librairie le 11 octobre.
 ?? ?? Devenu père il y a près d’un an, Ludovick Bourgeois envisage bien la conciliati­on travail-famille.
Devenu père il y a près d’un an, Ludovick Bourgeois envisage bien la conciliati­on travail-famille.
 ?? ?? Ludovick Bourgeois lance son album le 6 octobre, à 18 h, au Club Soda, à Montréal. Rêveur sera ensuite disponible sur toutes les plateforme­s.
Ludovick Bourgeois lance son album le 6 octobre, à 18 h, au Club Soda, à Montréal. Rêveur sera ensuite disponible sur toutes les plateforme­s.

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