ELLE (Québec)

Julia Roberts, la magnifique.

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Star planétaire, femme heureuse et mère comblée, Julia Roberts, à l’aube de la cinquantai­ne, resplendit comme jamais. En novembre, celle qui est aussi le visage de la marque italienne Calzedonia nous bouleverse­ra dans Wonder, l’un des films les plus attendus de l’année. entrevue STÉPHANIE CHAYET | texte VIRGINIE DOLATA adaptation MANON CHEVALIER | photos TOM MUNRO stylisme JEANNE LE BAULT

Une matinée de juin, à Malibu, en Californie. À la demande de l’actrice, la rencontre se déroule près de chez elle, dans une grande maison lumineuse louée pour l’occasion. Ultra-relax dans sa longue robe bleue au décolleté plongeant, elle fait son apparition, cheveux mouillés et pieds nus dans des sandales à fleurs. Affichant son sourire légendaire – celui qui a conquis le monde dans Pretty Woman, il y a déjà 27 ans –, Julia Roberts est comme au grand écran: le même rire, la même voix, les mêmes gestes... Dès son arrivée, elle embrasse son coiffeur de toujours, la maquilleus­e, son attachée de presse et sa styliste personnell­e, avant de serrer la main au reste de l’équipe. Dans la « loge » aménagée pour elle dans le luxueux garage de la maison, elle déambule entre une coiffeuse au miroir illuminé, un fauteuil de réalisateu­r et un buffet bien garni. Puis elle scrute un à un les vêtements qui lui sont proposés pour la séance photo, pendant que nous retenons notre souffle. Bonne nouvelle: tout lui plaît! «Elle est plus svelte que jamais», nous chuchote sa styliste personnell­e. On ne peut que supposer que Roberts suit un régime strict, dont elle ne dévoile toutefois pas les détails. Julia Roberts mange (très sainement, donc), prie ( depuis sa conversion à l’hindouisme) et aime (toujours aussi passionném­ent) son mari. L’heureux élu est Daniel Moder, caméraman qu’elle a rencontré pendant le tournage du film The Mexican et avec lequel elle a eu trois enfants: Phinnaeus et Hazel, des jumeaux âgés de 12 ans, et Henry, 10 ans.

ICÔNE INTEMPOREL­LE

Comblée en amour, l’éternelle pretty woman l’est tout autant sur le plan profession­nel. En 30 ans de carrière, l’actrice, qui tourne une fois par an en moyenne, s’est investie à fond dans une foule de personnage­s. Qu’on pense à ses interpréta­tions de BFF aux abois dans My Best Friend’s Wedding (1997); de célébrité hollywoodi­enne dans Notting Hill (1999); d’adjointe juridique déterminée dans Erin Brockovich (2000) – rôle pour lequel elle a remporté l’Oscar et le Golden Globe de la meilleure actrice; de journalist­e divorcée à la recherche d’elle-même dans Eat, Pray, Love (2010) ou encore de productric­e surpuissan­te dans Money Monster (2016).

Celle pour qui le rôle de mère passe avant tout est aussi une femme engagée. Depuis quelques années, elle sensibilis­e notamment le grand public aux enjeux de la communauté étudiante LGBTQ, des changement­s climatique­s et du syndrome de Rett (une maladie génétique rare).

Pas étonnant qu’elle se soit identifiée spontanéme­nt à la mère d’un enfant différent dans le best-seller jeunesse Wonder, de R.J. Palacio, au point de vouloir l’incarner au grand écran. En salle le 17 novembre, Wonder raconte l’histoire d’August, un garçon atteint d’une malformati­on faciale à la naissance. À 10 ans et après 27 interventi­ons chirurgica­les, il fait son entrée à l’école, dans une classe de cinquième année. Comment sa difformité sera-t-elle perçue par son entourage? Comment réussira-t-il à se tailler une place dans le monde? Plus qu’un plaidoyer pour l’empathie et la tolérance, le film réalisé par Stephen Chbosky se veut une ode à la différence. Des valeurs humaines que Julia Roberts tient à transmettr­e à ses enfants.

JAMAIS SANS LES SIENS

L’icône hollywoodi­enne aime s’entourer de ses proches, même lorsqu’elle travaille. Résultat: ses copines, toutes de belles blondes californie­nnes dans la quarantain­e, vont et viennent dans le studio de photo improvisé. Elles bavardent, rigolent et admirent les tenues choisies pour leur célèbre amie, pendant qu’elle joue les top-modèles. Jusqu’à ce qu’une jolie fillette blonde lui saute dans les bras. C’est Hazel, sa fille. «Si tu étais passée plus tôt, lui lancet-elle en riant, tu aurais vu maman dans une tenue pas possible!» C’est-à-dire en microshort, bas résille et cuissardes – qui rappellent drôlement son allure dans Pretty Woman, son film fétiche où elle se désole auprès du bel Edward Lewis (Richard Gere) d’avoir fait une maille à son collant. Par chance, celui qu’elle porte aujourd’hui est intact. Ce qui tombe drôlement bien pour l’ambassadri­ce de Calzedonia, marque italienne de collants et de maillots, pour laquelle elle a déjà tourné trois spots publicitai­res en ligne, légers et élégants, sous l’oeil du réalisateu­r Grant Heslov, l’un des producteur­s du film oscarisé Argo.

Déjà midi. Chevelure savamment négligée, visage sublimé et jambes de rêve jaillissan­t d’un long pull, elle s’allonge dans une chaise, près de la piscine, prête à prendre la pose. À l’aise devant l’objectif, elle s’assure que toute l’équipe est satisfaite du résultat. Concentrée, elle alterne les expression­s suaves, sereines, joyeuses. Pendant que son équipe s’interroge à haute voix sur l’arrière-plan d’une des photos, sa voix rieuse émerge d’un rideau. «J’espère que vous aimez l’avant-plan, au moins!» Absolument, chère Julia. Comment pourrait-il en être autrement?

Pour la cinquième fois cette année, vous avez été élue « plus belle femme du monde» par le magazine People. Votre première nomination à ce palmarès remonte au début des années 1980. Qu’est- ce qui a changé dans votre vie depuis? Oh là là! Tout! Avec les années, j’ai une meilleure compréhens­ion de ma place dans le monde. Je me suis aussi mariée et j’ai eu trois enfants. (rires) En 2014, vous avez confié au ELLE américain que vos enfants ne savaient pas que vous étiez célèbre. Que savent- ils aujourd’hui de votre carrière et de votre statut de star? Quand ils viennent sur un plateau de tournage, j’ai l’air d’avoir le travail le plus relax et le plus fabuleux du monde! Mes amis sont près de moi, il y a plein de trucs à manger, j’enfile de beaux vêtements et je passe mon temps dans des endroits superbes. Ils me trouvent très chanceuse. Parfois, je me dis qu’ils ont une compréhens­ion juste des choses... et parfois non. Mais tout ce qui compte, c’est qu’ils sachent qui je suis vraiment, loin des caméras. Selon les critères d’Hollywood, votre mariage bat des records de longévité... Je n’ai pas de mérite, car selon moi, mon mari est un être extraordin­aire! Il est drôle et tellement facile à aimer. Je suis toujours heureuse de le retrouver. On est si bien ensemble... Le fait d’élever les enfants dans la bonne humeur et l’harmonie ajoute au plaisir. Nos 15 années de mariage ont filé comme l’éclair! Vous êtes très sélective quant au choix de vos films. Qu’est- ce qui vous a fait vibrer dans le script tiré du roman Wonder? J’avais déjà lu le livre avec mes enfants. On l’a adoré! Un jour, j’ai dit à mon agent: « Wonder est paru depuis un moment; il y a sûrement quelqu’un qui veut l’adapter au cinéma. Si on cherche une actrice pour jouer la mère, je suis partante.» Il se trouve que celui qui l’a fait est l’un des producteur­s de Pretty Woman, que je n’avais pas vu depuis 25 ans. On a lunché ensemble et tout a décollé! Qu’est- ce qui vous touche le plus dans cette histoire? C’est le fait qu’elle parle de compassion et du temps qu’il faut prendre pour connaître l’autre, un art qui se perd... Ça nous émeut, mes enfants et moi. Cette envie de s’investir dans l’autre, c’est un message d’amour. Aujourd’hui, il y a beaucoup de frustratio­n dans le monde, beaucoup s’y sentent agressés, incompris. Le moment est bien choisi pour évoquer ces belles valeurs humaines. Comment décririez-vous Isabel, la mère du jeune garçon? Elle a fixé ses propres règles pour protéger ses enfants, tout particuliè­rement son fils August, qui a passé la majeure partie de sa vie à l’hôpital, ce qui lui a demandé une somme folle de temps et d’énergie. Une page se tourne pour elle, le jour où après avoir accompagné son fils à l’école pour la première fois, elle se retrouve seule à la maison. Tous les parents connaissen­t un jour le syndrome du nid vide, même si ce n’est que pour quelques heures, pendant que les enfants sont en classe. Comment remplissen­t-ils ce vide? C’est une question fascinante... Isabel est désarmée. Et c’est touchant de la voir trouver de nouveaux repères. Vous êtes constammen­t entourée des gens que vous aimez et de vos fidèles collaborat­eurs: coiffeur, maquilleus­e, styliste. Comment cela facilite- t- il votre travail? Quand vous vous pointez au studio à cinq heures du matin, vous souhaitez bavarder avec des personnes que vous connaissez bien. J’ai eu la chance de me faire des amis dans le métier. La première fois que j’ai travaillé avec Serge, mon coiffeur, c’était il y a 28 ans. C’est réconforta­nt d’entretenir de bonnes relations. Le réconfort entraîne un sentiment de confiance, qui à son tour crée un environnem­ent dans lequel vous pouvez prendre des risques et repousser les limites de votre jeu... Aujourd’hui, par exemple, je préférerai­s être en jean plutôt que d’enfiler un short minuscule et des bas résille... Mais la présence de mes amis m’aide à me sentir plus à l’aise. C’est votre troisième collaborat­ion avec Calzedonia. Pourquoi avoir accepté de représente­r cette maison de mode italienne? C’est une entreprise familiale épatante, et j’ai été impression­née par la façon dont ils m’ont approchée. Comme j’aimais déjà leurs collants, je n’ai pas eu à faire semblant. Je suis ravie qu’on travaille de nouveau ensemble. Parlons collants. Les préférez-vous noirs ou transparen­ts? Avec ou sans couture? Avec ou sans motifs? À pois ou en résille? Je les préfère noirs et sans couture. Et avec des motifs, c’est plus joyeux. Euh, j’aurais dit à pois il y a 20 minutes, mais j’aime beaucoup la résille que je porte pour les photos aujourd’hui. On vous voit souvent en tailleur- pantalon, votre tenue signature... Tout a commencé le jour où je suis allée aux Golden Globes pour le film Steel Magnolias. Je portais un tailleur-pantalon d’Armani et une cravate. Je ne savais pas trop quoi porter, mais j’avais envie de me sentir à l’aise. Contrairem­ent à une robe de gala, le tailleur-pantalon me donnait l’impression de pouvoir faire face à tout. J’aime les vêtements pour hommes, ils sont confortabl­es. Et ils ont la cote, aujourd’hui! Êtes-vous une femme sensible? Oui, je crois. Comme mon métier consiste à faire ressentir des émotions, cela exige une certaine sensibilit­é et de l’empathie. Certains jeux d’acteurs reposent sur la technique. Moi, je préfère m’identifier à mon personnage et tenter de comprendre profondéme­nt ce qu’il vit. Que pensez-vous de cette manie des médias de toujours demander aux femmes — et jamais aux hommes — comment elles abordent le vieillisse­ment? Ce n’est pas équitable! Ça perpétue les stéréotype­s voulant que, contrairem­ent aux femmes, les hommes gagnent à vieillir. Ce avec quoi je suis en total désaccord! Il y a autant de femmes que d’hommes dans la cinquantai­ne qui vieillisse­nt bien. Ç’a plus à voir avec la personnali­té de chacun qu’avec l’âge. Entre nous, les généralisa­tions du genre «les femmes luttent sans relâche contre le vieillisse­ment» sont risibles. Mais que voulez-vous? En entrevue, on me demande toujours quelle crème j’utilise. Pourtant, je doute fort qu’on demande à George Clooney de nous révéler son rituel de beauté...

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