VEJAS KRUSZEWSKI
PHÉNOMÈNE DE MODE
ÉTOILE MONTANTE de la relève, le designer torontois retrouve sa griffe, VEJAS, après une coupure fructueuse de deux ans. Zoom sur un JEUNE PRODIGE canadien qui s’impose en maître.
En 2014, à 17 ans, quand d’autres ados traînent, insouciants, sur les bancs de l’école, cet autodidacte né à Montréal lance sa griffe, Vejas, et présente ses créations sur Tumblr. Le choix de la plateforme en ligne est révélateur de sa jeunesse; les vêtements, eux, démontrent une vision mature, pointue et personnelle, et une parfaite maîtrise des techniques de confection, que peu de créateurs peuvent se targuer de posséder à son âge. Une propension d’autant plus impressionnante lorsqu’on sait que le designer a appris sur le tas, grâce à des vidéos YouTube et des magazines de couture japonais. À l’époque, son talent est repéré par la mannequin Hari Nef, qui posera deux ans plus tard pour sa collection automne 2016.
LA RECONNAISSANCE
La même année, Vejas Kruszewski gagne le prix spécial LVMH, qui est remis par un jury composé entre autres de Phoebe Philo et de Karl Lagerfeld, et qui récompense chaque année les jeunes créateurs de mode. Il obtient une bourse de 150 000 € (l’équivalent de 218 000 $) ainsi qu’une année de mentorat avec des professionnels de l’industrie, une occasion en or pour le Canadien de faire connaître son nom et sa marque. Son esthétique avant-gardiste, minimaliste et unisexe séduit les boutiques pointues comme les grands magasins, d’Opening Ceremony à Nordstrom. Sous ses doigts, un simple vêtement – un t-shirt blanc, une veste en cuir, une robe en coton – se transforme et se distord, dévoilant sous le prosaïsme de départ une complexité et une modernité insoupçonnées.
SECONDE PEAU
En produisant sa collection en Italie, Vejas Kruszewski rencontre la famille Morelli, derrière l’entreprise de cuir toscane Pellemoda, qui travaille aussi bien pour Balenciaga que pour la griffe émergente Alyx. Séduite par le talent du Canadien, la manufacture lui propose de donner vie à sa nouvelle marque unisexe, Pihakapi. Le créateur délaisse alors son label pour se consacrer à cet «atelier moderne du cuir» dès l’automne-hiver 2018-2019. Il puise son inspiration du côté de la nature et de ces animaux qui lui donnent matière à travailler. Le cuir se plie à sa vision qui, tout en embrassant une simplicité apparente, joue avec les lignes et les volumes. En octobre 2019, le designer quitte la direction artistique de Pihakapi pour relancer Vejas. Au coeur de sa vision? Une déconstruction maîtrisée du vêtement et un goût prononcé pour les teintes neutres – noir, blanc, beige –, ponctuées çà et là de couleurs franches, comme pour mieux mettre en évidence la forme des pièces, ancrées dans une intemporalité par rapport aux tendances éphémères. Depuis ses débuts, Vejas Kruszewski trace sa voie hors des sentiers battus… et le succès s’ensuit.