ELLE (Québec)

4 QUESTIONS À L’AUTRICE MARTINE DELVAUX

En octobre 2017, devant la quantité de témoignage­s suscités par le mouvement #moiaussi, l’écrivaine féministe Martine Delvaux a lancé un appel général afin de créer un recueil de paroles hors du commun,

- JE N’EN AI JAMAIS PARLÉ À PERSONNE. C. L.

Pourquoi avez-vous senti l’urgence de réunir des témoignage­s de femmes marquées par des agressions sexuelles en tout genre?

Dans mes récits et mes romans, je suis toujours un peu dans une pratique du documentai­re. J’aime ramasser les mots des autres, travailler avec eux. Après #agressionn­ondénoncée et #moiaussi, il y avait tellement de paroles qui circulaien­t! Je me disais qu’il ne fallait pas que ça se perde encore. J’ai reçu près d’une centaine de témoignage­s. Je voulais rendre hommage à ces femmes-là.

Qui sont-elles?

Je ne sais pas qui elles sont, je ne les connais qu’à travers ce qu’elles m’ont révélé. Elles ont toutes en commun de vivre en tant que femmes dans notre société. Il est question de la position de vulnérabil­ité qu’elles occupent. Ça allait du très court au très long texte, du harcèlemen­t de rue jusqu’au viol par un inconnu.

Pourquoi croyez-vous qu’elles ont eu l’envie de se raconter à vous?

Je pense qu’elles ont compris que c’est plus grand que nous toutes, qu’il fallait que ces paroles soient colligées. J’imagine que certaines d’entre elles ressentaie­nt un besoin très personnel de dire tout haut quelque chose qu’elles n’avaient jamais dit et qu’elles se sentaient dans un espace sécuritair­e avec moi.

En quoi, dans sa forme, cette anthologie de témoignage­s intimes diffère-t-elle des autres déjà publiées?

Je ne voulais pas juste publier les mots reçus, il fallait qu’ils deviennent une sorte de récit. Il fallait que toutes ces femmeslà parlent d’une seule voix. Quand on est toutes ensemble, il y a quelque chose qui bouge. C’est pour ça que les récits ne devaient pas être séparés hermétique­ment les uns des autres. Ils sont une chaîne, dans laquelle on est toutes prises.

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