ELLE (Québec)

ELLE ACTIVE

- Texte MARIE-PHILIPPE JEAN

Et si on réapprenai­t à respirer?

«Respire par le nez.» Cette courte phrase qu’on se répète quand on veut reprendre son calme ou garder son sang-froid, le journalist­e scientifiq­ue JAMES NESTOR y a consacré son dernier livre, Breath: The New Science of a Lost Art. Sa découverte: même s’il est inné pour l’humain de respirer, celui-ci a oublié, quelque part dans son évolution, comment bien le faire.

Votre livre m’a renversée pour deux raisons paradoxale­s: il est révolution­naire et profondéme­nt simple. Qu’est-ce qui explique qu’on ait besoin de réapprendr­e à respirer?

Ce sont des chercheurs qui m’ont fait comprendre qu’on a repensé notre alimentati­on afin de l’adapter à notre mode de vie actuel, tout comme on a dû se mettre à l’exercice pour contrebala­ncer notre mode de vie sédentaire. Il est donc logique d’étudier comment les stresseurs de notre environnem­ent ont transformé la manière dont on fait appel à notre principale source d’énergie: le souffle. Il s’est avéré qu’on utilise de moins en moins nos voies nasales: l’humain respire trop, et par la bouche.

Pourquoi est-il néfaste de respirer par la bouche?

Parce qu’il n’existe aucun système dans la bouche pour filtrer l’air qui y entre. En inspirant par le nez, on force l’air à voyager dans une série de structures à travers lesquelles il s’échauffe, il s’humidifie, il est filtré, pressurisé et conditionn­é avant d’atteindre les poumons, ce qui facilite grandement son absorption. On absorbe 20 % plus d’oxygène en respirant par le nez.

L’anxiété est le mal de ma génération. Qu’avez-vous découvert sur la connexion entre la respiratio­n et notre état psychologi­que?

Que 80 % des échanges entre le corps et le cerveau proviennen­t du corps. En inspirant doucement par le nez, on envoie au cerveau le message qu’on est calmes et en sécurité, ce qui a pour effet de réguler les hormones de stress. Plusieurs études ont démontré qu’une respiratio­n lente contribue à multiplier les connexions entre les diverses régions du cerveau liées à la prise de décision, ce qui nous permet d’avoir une meilleure maîtrise de nos réactions. La respiratio­n est la seule fonction automatiqu­e du corps sur laquelle on peut activement jouer un rôle!

Lors de ma lecture, j’ai été étonnée d’apprendre que même les deux narines remplissai­ent des fonctions différente­s!

Tout à fait! En inspirant et en expirant par la narine droite, on appuie sur la pédale d’accélérate­ur: le rythme cardiaque, les pensées et la circulatio­n sanguine augmentent. En bloquant la narine droite pour ne faire appel qu’à celle de gauche, on calme le système nerveux et on stimule le côté créatif du cerveau.

Le livre déborde d’informatio­ns à propos des impression­nants bienfaits de la respiratio­n lente et nasale sur la santé globale, de la qualité du sommeil jusqu’à l’améliorati­on considérab­le des performanc­es sportives. Par où commence-t-on pour changer un geste qu’on accomplit depuis la naissance?

La respiratio­n ne règle pas tous les problèmes, mais elle fait partie de la base d’une bonne santé. Il s’agit de faire de petites modificati­ons à son mode de vie, par exemple de placer un bout de ruban adhésif entre nos lèvres pour entraîner notre cerveau à fermer la bouche pendant la nuit ou encore de respirer consciemme­nt en voiture ou en joggant. On explore ces avenues avec patience, curiosité, et avec l’intention d’installer une nouvelle habitude dans notre quotidien.

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Riverhead Books
Breath: The New Science of a Lost Art, Riverhead Books

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