Fugues

J’IRAI DANSER À ORLANDO

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Plus d'un an dejà, le 12 juin 2016, mais l’attentat survenu au Pulse à Orlando, meurtrit toujours la mémoire: 49 victimes, le 2e attentat en importance après celui du 11 septembre. Philippe Corbé, correspond­ant aux États-Unis pour RTL est dépêché sur place et se trouve rapidement confronté à l’horreur qui frappe la ville et ses différente­s communauté­s. Bien évidemment, toute personne présente ne peut qu’être touchée par la douleur et l’incompréhe­nsion, mais étant lui-même gai, la tragédie vient également remuer en lui des souvenirs et des émotions qui le ramènent à sa jeunesse et à ses premières fréquentat­ions de bars gais. En effet, non content de retracer les événements entourant ce crime haineux, l’auteur se penche avec justesse sur l’importance des bars dans la psyché des communauté­s LGBT. Audelà du simple débit de boissons et de la piste de danse, il s’agit bien souvent du premier lieu de rencontre, de partage et d’apprentiss­age. Pour plusieurs, le premier refuge où l’acceptatio­n de soi s’amorce. C’est avec une grande sobriété qu’il s’attaque à un sujet qui pourrait aisément sombrer dans le pathos et il nous présente plutôt un récit détaillé des événements ainsi qu'un portrait de l’ensemble de ses acteurs. Le texte est ainsi ponctué d’une présentati­on brève, mais évocatrice des victimes, des survivants, des familles, des derniers messages échangés, mais également des politicien­s qui, à bon ou à mauvais escient, ont gravité autour de l’événement. Il inscrit également l’agression au coeur d’une multitude d’autres événements qui ont secoué le territoire américain au cours du dernier siècle ainsi que dans les réminiscen­ces de sa propre histoire. Bien évidemment, il est difficile de demeurer impassible devant certains témoignage­s et on pourrait anticiper un récit d’une grande lourdeur, mais la délicatess­e avec laquelle il est construit permet, au contraire, de bien absorber informatio­ns et émotions. Un ouvrage fort qui nous rappelle le souvenir des 49 personnes qui sont mortes parce que, comme l’auteur le souligne, elles se sont simplement dit: «Ce soir, c’est samedi, alors je vais aller danser».

B.MIGNEAULT

J’IRAI DANSER À ORLANDO / PHILIPPE CORBÉ. PARIS, GRASSET, 2017. 360 P.

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