Fugues

NOMADE URBAIN

- DENIS-DANIEL BOULLÉ

Plusieurs films ont été faits sur la prostituti­on masculine, dont les plus remarqués ont été HUSTLER WHITE de Bruce Labruce en 1996, et L’AMOUR AU TEMPS DE LA GUERRE CIVILE du Québécois Rodrigue Jean, en 2014, à mi-chemin entre la fiction et le documentai­re. SAUVAGE de Camille Vidal-Naquet s’inscrit dans la même lignée. Entre les travailleu­rs du sexe qui vendent leur corps pour différente­s raisons, la drogue, simplement l’argent, et les fantasmes les plus étranges des clients, nous ne sommes pas dépaysés sinon que cela se passe dans la toute proche banlieue de Paris. Là où le film nous surprend agréableme­nt, c’est que tout s’articule autour d’un jeune de la rue, Léo, interprété par Félix Maritaud (120 BATTEMENTS PAR MINUTE et UN COUTEAU DANS LE COEUR) qui déjoue tous les clichés et stéréotype­s liés au travail du sexe. On ne sait rien de Léo. Sinon qu’il vit la plupart du temps dans la rue. Quand il n’a plus d’argent, il cherche un peu de bouffe dans les poubelles, et dort sous des portes cochères si un client ne lui propose pas de passer la nuit chez lui. Il en va de même avec le sexe où il n’a de plaisir que dans le plaisir qu’il donne à l’autre. Il ne semble exister qui ne le que comprennen­t dans le désir pas, de il l’autre. ne semble Électron ni heureux, libre au regard ni malheureux. des autres Bien prostitués sûr Léo aimerait une relation plus stable avec un autre prostitué, Ahd ( Éric Bernard), un gars hétéro qui tapine pour se constituer une cagnotte et partir ouvrir avec sa blonde un commerce en Espagne. Léo ne comprend pas qu’Ahd se refuse à lui mais s’il en éprouve une tristesse, n’en ressent pourtant aucune rancoeur. Et, entre les rencontres avec les clients, les nuits passés à la belle étoile, et son insistance à fréquenter Ahd, Léo échappe à toute lecture psychologi­que. Les seuls dialogues qui pourraient apporter quelques éléments de réponse sont ceux que Léo a avec des docteur.es mais qui ne font que ressortir la distance qu’il existe entre le monde réel et celui de Léo. Tout tient dans le jeu talentueux de Félix Maritaud qui livre un Léo touchant, attendriss­ant, d’une candeur saisissant­e, que l’on aurait envie de protéger contre un monde dans lequel il ne trouve pas sa place, dans lequel il n’a pas sa place. Un peu comme dans la fable de Lafontaine, LeLoupetle­Chien, quand le loup préfère la dure liberté au confort de porter un collier et d’être attaché. Le réalisateu­r de SAUVAGE, Camille Vidal-Naquet, a travaillé comme bénévole plusieurs années avec une associatio­n qui vient en aide aux prostitués masculins dans la région parisienne. Il a, de ce fait, écouté nombre d’histoires différente­s de la part de gars pour qui il a développé une très grande empathie, voire de l’amitié. Il était important pour lui de montrer une facette différente, l’envers du décor de la prostituti­on. Bien sûr certaines scènes sont relativeme­nt explicites dans les actes sexuels. Et les tatouages qu’arborent Félix Maritaud sont vraiment les siens. 6

SAUVAGE sera présenté dans le cadre de la 31e édition du festibal image+NATION qui se tiendra du 22 novembre au 2 décembre. Visitez Fugues.com pour visionner un extrait du film.

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