SCÈNE : DANSE — EDUARDO RUIZ VERGARA
DU 16 AU 26 JANVIER 2019 - EL SILENCIO DE LAS COSAS PRESENTES
Le titre El silencio de las cosas presentes est un rappel des origines sud-américaines du chorégraphe Eduardo Ruiz Vergara qui est né et a grandi à Bogota. Et il préfère aujourd’hui parler d’une oeuvre choréohaptique, une oeuvre chorale puisqu’elle implique aussi la musique et les éclairages, la scénographie et le public. Il s’agit plus d’une performance, puisque en suivant la trame dessinée par le chorégraphe, chacun devra réagir aussi en fonction des sensations, émotions ressenties sur le moment. Dans l’instant présent en somme. Présenté dans le cadre de Danse-Cité, volet traces-Chorégraphes, ce Silence des choses présentes se retrouvera sur la scène de La Chapelle Scènes contemporaines.
En ce sens on ne peut plus parler de représentation mais de présentation puisque les danseur.ses et les musiciens ne jouent plus pour reproduire des états émotionnels travaillés. Ils doivent au contraire s’abandonner à ce qu’ils ressentiront sur scène au plus profond d’eux mêmes. Et ce à travers le simple mais complexe toucher. D’où le mot haptique qui désigne la science du toucher au sens strict mais aussi la perception du corps dans l’environnement.
Pour Eduardo Ruiz Vergara, le corps a une mémoire qui peut être ravivée par des situations, un environnement, le simple contact avec un autre ou avec des objets. «Mais c’est aussi pour moi important de travailler sur ce qui nous touche sans qu’il y ait un contact réel, explique le chorégraphe au cours de l’entrevue, comme dans les expressions où une personne dit qu’elle est touchée par un mot venant de quelqu’un par exemple».
Lors d’un cours moment de répétition auquel nous avons assisté, Eduardo soutenait d’une main la nuque de la danseuse Sophie Levasseur, qui évoluait lentement sur scène toujours retenus, soutenus ou poussés par cette main laissant les sensations de cette synergie entre deux corps enveloppés par la musique immersive composée par Nathan Giroux et Gabriel Vignola. Une danse lente proche d’un rituel chamanique mais qui ouvre les portes de l’intériorité de chacun des interprètes et de leur contact avec le monde.
Pour Eduardo, l’autre inspiration vient du Reiki, cette méthode japonaise sur la fluidité des énergies qui seraient possible grâce à l’imposition des mains sur des parties du corps. Là encore pour le haptique, il ne s’agit pas d’expérience reproduite sur scène mais de tirer de ces matériaux-là une exploration esthétique et sensorielle globale, qui mêle la danse, le théâtre, la musique, pour celles et ceux qui sont sur scène comme pour le public. «Il y a comme une déconstruction de l’expérience physique. Au lieu de la contrôler, on s’abandonne à elle, on la laisse nous affecter, nous transforme, précise le chorégraphe, et c’est pour cela que le paysage sonore et visuel est aussi important dans cette expérience physique».
Tout un défi pour les danseuses qui seront sur scène avec Eduardo. «C’est périlleux de plonger ainsi dans cet univers des sensations, d’en prendre conscience à l’intérieur de nous sans pour autant s’y perdre», avance la danseuse Marie Mougeolle. Même constat pour le musicien présent, Nathan Giroux, qui a conçu des thèmes pour les différents tableaux mais qui devra en fonction de ce qu’il ressentira chaque soir apporté sa touche personnelle.
En fait, le Silence des choses présentes nous parle plus que nous le pensons, si nous savons l’entendre, le ressentir pleinement.
EL SILENCIO DE LAS COSAS PRESENTES d’Eduardo Ruiz Vergara, dans le cadre de Danse-Cité Traces-Chorégraphes. Les 16, 17, 18, 19, 23, 24 ,25, 26 janvier 2019 à 19h à la Chapelle Scènes Contemporaines www.dansecite.org wwwlachapelle.org