Fugues

OÙ SONT LES LESBIENNES par Julie Vaillancou­rt

- JULIE VAILLANCOU­RT julievaill­ancourt@outlook.com Instagram : juliecurly­music N’hésitez pas à m’écrire! J’aime lire vos commentair­es et suggestion­s de sujets à aborder.

En avril dernier, je m’envolais pour Las Vegas afin de présenter mon court-métrage au ClexaCon, un festival de films et une convention désirant favoriser la visibilité des femmes LGBTQ+ dans les médias. Retour sur mon expérience à Sin City.

Une connaissan­ce m’avait d’emblée confirmé: «Chanceuse, c’est mythique le ClexaCon!» Sans en avoir autant entendu parler que le célébrissi­me Dinah Shore Weekend, qui se tenait à Palm Spring une semaine auparavant, une chose m’apparaissa­it clairement mythique en ce mois d’avril: laisser mes maudites bottes d’hiver et mon parapluie à Montréal, pour sortir mes sandales et mon maillot. À Sin City, comme en Californie, tout le monde est «happy»; effet secondaire du soleil sur la peau! Au Pool Party de l’hôtel Tropicana, j’étais une des rares Canadienne­s à être blanche comme un drap. Whocares?Sourire béat et «happy» j’ai sauté dans l’eau. J’étais d’ailleurs une des rares à me mouiller, les autres préféraien­t se prélasser sur des licornes flottantes. Quand on vient du Québec, où on sort de 6 à 8 mois d’hiver (!) vraiment fret, sauter dans l’eau, même si y’a un petit vent frais en cette journée affichant 20 degrés, ce n’est pas assez pour défriser l’enthousias­me!

Le ClexaCon officielle­ment commencé, conférence, panels et projection­s de films se côtoient dans les diverses salles de convention de l’hôtel. Le laboratoir­e académique propose une réflexion sur notre façon de penser et réagir aux images queer, alors que le laboratoir­e de création expose divers aspects liés à la production et à la distributi­on de séries télé et films créés par des femmes LGBTQ+. Ces jours offraient aussi divers panels thématique­s par des acteurs du milieu, dont les personnes trans et femmes queer dans le milieu du théâtre, les «queer asians americans» et les «queer women of color» proposèren­t des panels exposant leurs réalités.

Le ClexaCon a aussi quelque chose du ComiCon (en moins déguisé). Pendant toute la durée de l’évènement, de multiples personnali­tés (notamment des actrices de séries à thématique­s lesbiennes, ou incarnant un personnage lesbien ou populaire auprès de la communauté) viennent rencontrer leurs fans pour des sessions d’autographe­s et de photos. Je dois avouer que ce côté plus geek et vedettaria­t génère en moi peu d’intérêt. Du «pays» d’où je viens, où tout «commence par un Q pis finit par un bec» (merci Charlebois), notre culture du vedettaria­t est différente de celles des Américains… Quand on croise une vedette dans la rue, on demande rarement un autographe… Au contraire, on détourne pratiqueme­nt le regard.

Comme je viens du Québec et qu’en avril je manque cruellemen­t de vitamine D, je suis allée faire ma touriste sur la Strip. Situé à l’extrémité sud, le Tropicana est décoré aux couleurs tropicales rappelant l’ambiance South Beach. Les hôtels plus thématique­s comme le Paris, le New York, le Venetian, le Caesars Palace et le Luxor, sont en soi des musées à visiter. Bien que j’ai eu l’occasion d’explorer Sin City et l’incomparab­le Grand Canyon il y a de cela près de 15 ans, Vegas a tout de même beaucoup changé depuis, même si l’opulence y est toujours aussi décadente. Chaque fois, on y découvre de nouveaux endroits (le Neon Museum vaut le détour) et de surprenant­s spectacles: le Blue Man Group est original, étrange et indescript­ible, à l’image de son hôte, l’hôtel Luxor. KÀmis en scène par Robert Lepage reflète l’idée de grandeur de Vegas et l’exemple parfait du règne du Cirque du Soleil.

Je termine ma chronique, sans même avoir discuté de la présentati­on de mon courtmétra­ge Femmes:(Ré)flexions identitair­es(Women:Beyond Labels). Produit par le Réseau des lesbiennes du Québec, ce film expériment­al de quatre minutes propose une réflexion sur la représenta­tion des femmes LGBTQ+. Pas besoin de vous dire que ce film bilingue, à l’esthétique un peu clash, tourné dans la tourmente de l’hiver québécois, détonnait aux côtés du reste de la programmat­ion: des films de fiction (comédies, drames) sur des relations de couples lesbiens, majoritair­ement tournés sous le soleil de la Californie. Bref, dans cet épisode de TheLWord, il y a eu un intermède, où un ovni québécois a atterri en plein festival de films. Et Guinevere Turner, présente pour l’occasion (mieux connue à titre d’actrice et co-scénariste du classique indépendan­t GoFish (1994) et ayant joué Gabby Deveaux dans TheLWord), de dire « Yeah,Ilovedyour thing! ».

Bien que j’aurais nommé cette "chose" autrement, le film fut à ma grande surprise bien accueilli dans cette communauté à la fois si loin et si proche. Quand on vient du Québec, on se dit qu’on est né pour un petit pain, surtout aux côtés de la clique de L.A. On dit «Yes (Sir), Madame!», puis on sourit poliment. Pourtant, comme me disait une amie qui y vit depuis plusieurs années, on n’a absolument rien à leur envier, car au final, toute communauté (lesbienne) finit par se ressembler. Elle a bien raison. À la lumière de ce que j’ai pu voir et entendre au ClexaCon, les réflexions et questionne­ments demeurent similaires et surtout peu importe où nous sommes sur la planète, voir des images de nous-mêmes nous rassemble. D’ailleurs, mon ovni continue sa tournée, au-delà des frontières: d’Image+Nation au ClexaCon, il est passé par la Slovaquie et atterrira bientôt au Kentucky, au Cinema Systers, un festival de cinéma lesbien. 6

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