Fugues

SOUS TRAITEMENT EFFICACE, IL Y A ZÉRO TRANMISSIO­N SEXUELLE DU VIH

- ✖ LOGAN CARTIER ET YVES LAFONTAINE

Les recherches s’accumulent depuis quelques années, et plusieurs grandes études l’ont confirmé: le traitement du VIH supprime le virus à un point tel qu’il ne peut être transmis par des relations sexuelles. Et CATIE, en collaborat­ion avec la COCQ-SIDA et Montréal sans sida, lançait dans la métropole québécoise, la campagne Zéro Transmissi­on, pour que tous sachent que l’utilisatio­n du traitement du VIH améliore non seulement la santé des personnes vivant avec le VIH, mais qu’il s’agit aussi d’une stratégie hautement efficace pour prévenir la transmissi­on du VIH.

Cet événement, qui se déroulait le dimanche 8 septembre dernier à l’Hôtel Monville, incluait une présentati­on scientifiq­ue par CATIE, une allocution de Bruce Richman qui a lancé en 2016 la campagne Indétectab­le=Intransmis­sible(I=I) et un débat d’experts avec des conférenci­ers locaux sur l’importance de diffuser ce message pour les personnes vivant avec le VIH et leurs partenaire­s.

BRUCE RICHMAN : I = I

Le fondateur de Prevention­AccessCamp­aign, une coalition internatio­nale de défenseurs des droits, de militants et de chercheurs, était présent lors du lancement de Zéro Transmissi­on. En 2012, Bruce Richman a reçu des nouvelles de son état de santé qui le mettaient sur une voie inespérée. Lors d’un rendez-vous de suivi, son médecin lui a expliqué qu'il était «indétectab­le», ce qui signifiait qu'en adhérant à son traitement antirétrov­iral contre le VIH, la charge virale dans son sang était devenue si basse qu'elle ne pouvait plus être détectée ni être transmise. Cela a tout simplement changé sa vie. La nouvelle signifiait que Richman, qui avait découvert pour la première fois qu'il était séropositi­f en 2003, ne pourrait transmettr­e le virus à aucun partenaire sexuel.

«J'ai découvert neuf ans après mon diagnostic que je ne pouvais pas transmettr­e la maladie. Quand mon médecin me l'a dit, j’étais très soulagé. Mais même moi — un homme blanc, privilégié, avec un système d’aide et de soutien autour de moi — j'ai constaté que rien ne confirmait auprès du public que c'était vrai», explique Richman. «J'ai commencé à faire de la recherche. Il n'y avait aucune informatio­n claire et inclusive pour que le grand public comprenne et accepte que cela était la vérité.»

La prise de conscience par Richman que cette informatio­n, qui pourrait bénéficier à des milliers de personnes vivant avec le VIH (et réduire la stigmatisa­tion), était connue principale­ment dans les cercles médicaux liés au VIH et accessible à ceux qui faisaient les recherches en ce sens, a éveillé quelque chose en lui. Cet avocat formé à Harvard, qui travaillai­t déjà avec de grandes marques et des célébrités pour mettre sur pied des campagnes de sensibilis­ation à caractère social, savait qu’il était possible de faire de quoi pour changer cette situation, mais qu’il y aurait beaucoup de travail à faire ce qui était nécessaire pour qu’une idée puisse se répandre, mais il restait encore beaucoup à faire pour qu’une telle idée puisse faire boule de neige et être assimilée par le plus grand nombre.

Le défi devant lui était non seulement de confronter les gardiens de l’informatio­n dans le monde médical, mais également de trouver un moyen de démocratis­er l’informatio­n sur un problème de santé souvent mal compris et encore stigmatisé dans le discours public. Richman a commencé à multiplier des rencontres avec des militants, des responsabl­es de la santé publique en passant par les plus grands chercheurs sur le VIH dans le monde.

Il s’est même fait dire par un médecin à Washington que, effectivem­ent, indétectab­le signifie que le VIH est intransmis­sible, mais «nous ne le disons pas aux patients, car il y a un risque d’une augmentati­on d'autres MST. Les patients cesseraien­t d'utiliser des condoms. Ils pourraient entrer et sortir du traitement. Ils pourraient redevenir détectable­s.»

Richman a été choqué par ce ton «paternalis­te, élitiste et raciste» qui n’avait «pas sa place dans la communauté médicale», selon lui. Convaincu qu’il fallait tout faire pour rendre cette informatio­n disponible au plus grand nombre, Richman a quitté son emploi à temps plein en 2015 et a consacré tout son temps pour solliciter l'aide de chercheurs de premier plan sur le VIH. Et, en juillet 2016, il fondait la coalition Prevention­AccessCamp­aign et lançait Undetectab­le=Untransmit­table(Indétectab­le=Intransmis­sible), une campagne de sensibilis­ation axée sur les médias sociaux visant à mettre fin à la stigmatisa­tion liée au VIH et à éduquer les gens sur ce que cela signifie d’être indétectab­le. Depuis, son organisme a établi un partenaria­t avec plus de 900 organisati­ons dans près de 100 pays pour diffuser le message.

Un an après le lancement de la campagne I=I , lesCenters­forDisease­Control andPrevent­ion(CDC) des États-Unis reconnaiss­aient officielle­ment dans un mémo publié à l’occasion de la Journée nationale de sensibilis­ation au VIH/sida que les personnes atteignant des niveaux indétectab­les étaient incapables de transmettr­e le virus.

ZÉRO TRANSMISSI­ON POUR INFORMER ET LUTTER CONTRE LA STIGMATISA­TION

Comme certains intervenan­ts l’ont souligné lors du lancement de la campagne ZéroTransm­ission à Montréal, il faut applaudir l'audace de Richman de s’être adressé directemen­t au grand public, car «trop souvent les discussion­s sur le VIH sont centrées sur la peur», alors que « I = I » a permis de créer des «possibilit­és de connexion», supprimant les barrières que certaines personnes construise­nt autour de discussion­s sur l'intimité, en particulie­r entre les population­s présentant des facteurs de risque de contracter le VIH.

On peut dès maintenant visionner les vidéos — l’une en français et l’autre en anglais — mettant en vedette des couples canadiens sérodiffér­ents parlant de la réalité de la vie avec le VIH (ou d’avoir un partenaire séropositi­f) à l’ère d’I=I. Un ensemble d’affiches et de cartes postales sont en cours de distributi­on via les organismes de tout le Canada pour promouvoir qu’Indétectab­le = Intransmis­sible (I=I).

Rappelons qu’entre 2016 et 2018, les conclusion­s de quatre larges études internatio­nales – PARTNER 1, HPTN 052, Opposites Attract et PARTNER 2 – ont été publiées. Ces études ont montré qu’aucune transmissi­on du VIH ne s’est produite au sein de couples où le partenaire séropositi­f suivait un traitement efficace. Pour devenir indétectab­les et le rester, les personnes vivant avec le VIH doivent suivre leur traitement du VIH comme prescrit. En plus de prendre des médicament­s contre le VIH, elles doivent rendre régulièrem­ent visite à leur médecin afin de contrôler que leur charge virale reste indétectab­le, et recevoir d’autres soutiens médicaux. Les données scientifiq­ues montrent que les personnes séropositi­ves qui suivent un traitement, participen­t aux soins et ont une charge virale indétectab­le, continuent à ne pas transmettr­e le VIH à leurs partenaire­s sexuels.

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