Fugues

UN DOCUMENTAI­RE ET 32 VIES

- MICHEL JOANNY-FURTIN www.fierteagri­cole.org

Réalisé par Michel Desrochers, le documentai­re «Viv(r)e la diversité» est une initiative de Fierté agricole. Ce film a été officielle­ment lancé à la mi-novembre et devrait entamer une carrière multiforme pour raconter comment vivre sa différence dans le monde rural tout en affirmant «Vive la diversité!»

«Je travaille sur ce projet depuis juillet 2018», affirme Michel Desrochers, luimême membre de Fierté Agricole dont il est le trésorier. «Lors de nos présentati­ons de démystific­ation dans les écoles, nous étions toujours deux personnes seulement à témoigner et souvent les enseignant­s souhaitaie­nt en entendre plus. Comme j’ai toujours eu envie de faire des films, je suis donc allé me promener dans le cadre d’un documentai­re», sourit-il. «Nous avions une cinquantai­ne de noms au départ. Il y a eu quelques désistemen­ts, mais avec l’ajout d’autres contacts, j’ai pu, au bout du compte, recueillir 32 témoignage­s dans la plupart des coins du Québec, autour d’un angle bien précis: être LGBT et en milieu agricole ou rural.»

UN DOCUMENTAI­RE EN TROIS FORMATS

Lancé à la mi-novembre à Québec au Palais Montcalm, le film existera sous trois versions. «Un format de 14 minutes pour les écoles; un format de 30 minutes pour les entreprise­s et institutio­ns et un format final de 75 à 90 minutes pour les festivals et les diffuseurs», détaille Michel Desrochers. «Ce documentai­re est un outil, il pourrait donc être utilisable par d’autres groupes communauta­ires», admet le réalisateu­r.

Financé par le ministère de la Justice du Québec, dans le cadre du programme Lutte contre l’homophobie et la transphobi­e, la production de ce film documentai­re avoisine les 9000$. Un budget plus que très raisonnabl­e, surtout consacré aux droits artistique­s des musiques additionne­lles et aux 7400 km de déplacemen­ts de Michel Desrochers. Un budget modeste grâce à la contributi­on personnell­e, journalist­ique et technique complèteme­nt bénévole de Michel, rappelons-le ! «Et j’ai fait le montage sur mon IPad-Pro grâce aux logiciels du marché…»

CRAINTES & ESPOIRS

Par ailleurs, Michel a lui-même mené les entrevues. «J’avais préparé cinq questions de base, puis l’entrevue évoluait selon le récit de la personne. Chacune d’entre elles a partagé le dévoilemen­t de son identité sexuelle et de genre ainsi que son intégratio­n dans leur milieu de travail et de vie», explique-t-il. «D’un témoignage à l’autre, j’ai remarqué la crainte que chacun avait de faire son coming-out, puis de se rendre compte que, hormis deux cas, tout s’était bien passé. C’est le sentiment qu’on avait parce qu’on partait du fait que les producteur­s agricoles sont un milieu plus conservate­ur.»

On sait que l’agricultur­e est un domaine exigeant où chacun fait le maximum. De nos jours, et dans ce contexte, l’orientatio­n sexuelle deviendrai­t-elle secondaire. «Oui et non, répond Michel Desrochers, et ce n’est toutefois pas secondaire: en campagne tout le monde se connait entre voisins. Sortir du placard est un moment important parce qu’on ne veut plus mentir à tout le monde. Auparavant, on choisissai­t des relations plus éloignées, et beaucoup de gens s’en allaient dans les villes pour ne pas subir d’homophobie et avoir une vie plus facile.» Heureuseme­nt, cet état d’esprit dans le monde rural évolue et c’est aussi entre autres grâce au travail de Fierté Agricole.

LES CONSEILS D’ERROL DUCHAINE

Pour démêler tous ces témoignage­s et donner un fil à son documentai­re, Michel a pu bénéficier des compétence­s journalist­iques d’Errol Duchaine comme conseiller à la réalisatio­n, «pour accompagne­r et assister Michel dans sa démarche au travers de cette galerie de personnali­tés…», commente notre confrère.

L’ex-animateur de La Semaine verte (Radio-Canada) est un grand allié de la communauté rurale et agricole. Né au Lac St-Jean, à Alma, dans un milieu ouvrier, sa passion pour la nature est pourtant d’origine familiale: «c'est mon grand-père qui m'a fait découvrir la forêt, la nature. Enfant, je passais beaucoup de temps dans le boisé près de chez mes grands-parents», confie-t-il à Fugues «Il y avait des fermiers dans ma famille. Tout ça coule encore dans mes veines», affirme-t-il sur le site de Radio-Canada. «J’ai entamé des études pour devenir professeur d’histoire-géo à Québec, mais à 20 ans, j’ai fait tout un virage pour bifurquer vers le journalism­e.»

Membre de notre communauté, «ma prise de conscience LGBT s’est faite tardivemen­t dans ma vingtaine mais cela m’est apparue comme une simple évidence, sans heurt, sans peur, sans bouleverse­ment. Je le vivais mais je n’ai jamais senti le besoin d’en dire plus sans toutefois vivre caché…»

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