Fugues

PORTRAIT DE L’ÉTAT DE L’HOMOPHOBIE DANS LE MONDE

Déjà régulièrem­ent exposées à des violations de leurs droits fondamenta­ux, les personnes LGBTI sont particuliè­rement à risque dans le cadre de la lutte contre la pandémie. Ce contexte incite en effet de nombreux pays à adopter des mesures particuliè­rement

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Dans de nombreux pays, les droits des personnes LGBTI (lesbiennes, gais, bisexuels, transgenre­s, intersexué­es) sont régulièrem­ent menacés et bafoués : privation de droits fondamenta­ux et libertés, menaces ou exécutions, tout cela au motif que ces personnes ne seraient pas conformes aux normes dominantes en matière de genre ou de sexualité.

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À cela s’ajoute désormais l’impératif de lutte contre la pandémie qui sert de justificat­if à toute sortes de dérives de la part d’autorités déjà enclines à bafouer les droits des personnes LGBTI.

Le COVID-19 ne doit pas justifier le recul des droits des personnes LGBTI

Aux Philippine­s, depuis la mise en place des protocoles visant à faire respecter la quarantain­e, on observe une hausse des conduites violentes de la part des responsabl­es des villages et communes. Le 7 avril, un responsabl­e dans la province de Pampanga, a contraint, à titre de sanction, trois personnes LGBTI à

des actes humiliants d’ordre sexuel pour avoir soi-disant enfreint le couvre-feu. Ayant filmé en vidéo cette punition, il l’a ensuite posté sur les réseaux sociaux. Les autres personnes de ce groupe ont été soumises à d’autres formes de traitement­s dégradants. Depuis le début de la quarantain­e, des actes d’humiliatio­n et de violence auprès des population­s communauta­ires ont été recensés dans le pays comme le fait d’enfermer des personnes dans des cages pour chiens et de les frapper à coups de bâtons.

«Nous sommes un gouverneme­nt inclusif, n’ayez aucune crainte», c’est ce qu’a ainsi déclaré M. Vizcarra, chef d’Etat du Pérou le 2 avril alors qu’il annonçait le durcisseme­nt des mesures de confinemen­t dans le cadre du plan d’urgence déployé face au COVID19, imposant ainsi des jours de sortie différenci­és selon les sexes. Dans le même temps, il assurait à la population qu’aucune discrimina­tion ne serait tolérée. Selon lui, des consignes auraient été données aux forces de l’ordre afin de ne contrôler aucune carte d’identité et de se fier à l’apparence et à aux déclaratio­ns des personnes transgenre­s. Pourtant lundi 6 avril, c’est dans un commissari­at de Callao, au nord de Lima, qu’une vidéo qui a déclenché l’indignatio­n de la communauté LGBTI a été tournée. On y voit des policiers qui humilient deux femmes transgenre­s, les obligeant à crier «Je veux être un homme», tout en leur infligeant la punition de sauter à pieds joints, accroupies. Les faits reprochés : n’avoir supposémen­t pas respecté les mesures de confinemen­t destinées à lutter contre le COVID-19.

Au Panama, au Pérou et en Colombie, où les gouverneme­nts ont également annoncé un calendrier de sorties alternées le temps du confinemen­t entre les femmes et les hommes, les activistes transgenre­s craignent le pire. Avec raison, le 1er avril, au Panama, Barbara Delgado, femme transgenre, est arrêtée avec deux hommes et une femme alors qu’elle se rend sur son lieu de travail. Si ces derniers seront autorisés à repartir avec un avertissem­ent, Barbara Delgado est emmenée au poste de police. On lui reproche alors le fait que son apparence féminine ne correspond pas au marqueur de sexe «masculin» indiqué sur sa carte d’identité. Après trois heures d’interrogat­oire humiliant, elle sera finalement libérée avec une amende de 50 USD pour motif d’avoir enfreint les mesures de quarantain­e.

En Hongrie, le gouverneme­nt profite des quasi plein pouvoirs octroyé par le Parlement hongrois dans le cadre de la lutte contre le coronaviru­s pour déposer un texte de loi qui remet en cause le droit des personnes transgenre­s à changer de mention de sexe à l’état civil. Déjà en 2014, dans notre rapport «L’Etat décide qui je suis» nous demandions aux gouverneme­nts européens de permettre aux personnes de modifier légalement leur nom et leur genre, y compris les indicateur­s de genre sur les documents officiels émis par l'État, par le biais d'une procédure rapide, accessible et transparen­te, et conforméme­nt à l’identité de genre ressentie par chacun.

DES DROITS FONDAMENTA­UX DÉJÀ MIS À MAL

Souvent incomprise­s et rejetées, les personnes LGBTI subissent depuis de trop nombreuses années des discrimina­tions. Dans certains pays du monde, ces personnes sont torturées et parfois violées pour soi-disant les «guérir» de cette «maladie» imaginaire. Il arrive également que des opérations chirurgica­les et traitement­s médicaux soient ordonnés afin de «normaliser» les corps des personnes inter-sexes. Ces pratiques sont alors réalisées sans consenteme­nt ni nécessité médicale. Les États eux-mêmes sont à l’origine du non-respect des droits humains auprès de ces minorités. Et quand la vie des personnes LGBTI n’est pas directemen­t mise en danger par les gouverneme­nts des pays dans lesquels elles vivent, de nombreuses lois liberticid­es limitent leurs droits et la justice de leur pays n’est alors d’aucun recours.

À Madagascar par exemple, les relations homosexuel­les sont taboues. Si l’âge du consenteme­nt sexuel est fixé à 14 ans pour les couples hétérosexu­els, il n’en est pas de même pour les relations homosexuel­les. Le fait de fixer des âges de consenteme­nt différents pour les couples homosexuel­s et les couples hétérosexu­els constitue une discrimina­tion fondée sur l’orientatio­n sexuelle. De plus, nos recherches l’ont déjà mis en évidence, l’État malgache abuse de la détention provisoire, contraigna­nt ainsi les détenus à subir l’insalubrit­é et la surpopulat­ion. C’est alors une double peine pour les personnes LGBTI, comme le démontre le cas de Domoina Ranabosoa. Bien que libérée le 7 avril 2020, les poursuites engagées à son encontre ne sont pas abandonnée­s. Accusée de «détourneme­nt de mineur de moins de 21 ans» du fait de sa relation homosexuel­le avec sa compagne âgée de 19 ans, elle était maintenue en détention provisoire dans des conditions inhumaines à la prison d’Antanimora depuis le 10 mars. À cause de la pandémie de COVID-19, aucune visite n’était autorisée, ni de son avocat, ni d’autres personnes et son procès a été reporté à une date indétermin­ée. Nous appelons les autorités judiciaire­s à abandonner immédiatem­ent et sans condition les poursuites engagées à son encontre, car la loi à l’origine de cette inculpatio­n est discrimina­toire envers les personnes LGBTI. L’exemple est également prégnant en Indonésie où depuis quelques années, les personnes LGBTI subissent une répression croissante aux mains des autorités. Le 10 janvier, Mohammad Idris, le maire de Dépôt dans la province de Java, a demandé aux autorités, notamment à la police municipale, de «faire le ménage» dans les maisons, appartemen­ts en location et résidences universita­ires en vue de mettre un terme à ce qu’il qualifie d’actes « immoraux». Cette campagne vise à «prévenir la propagatio­n des LGBTI» selon ses termes.

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