Fugues

12 Où sont les lesbiennes / Julie Vaillancou­rt

Dans mes précédente­s chroniques, j’avais déjà exposé la relation amour-haine que j’entretiens avec la SaintValen­tin. 2021, qui s’annonce comme «l’amour en temps de guerre au virus, jusqu’au vaccin», n’est rien pour arranger les choses.

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Rappelez-vous, je vous avais fait toute une tirade sur MyFunnyVal­entine, en dénonçant le caractère commercial et hétéronorm­atif de la Saint-Valentin. Puis, j’avais exposé mon humiliatio­n de me retrouver nommée Miss Saint-Valentin(e) à mon école secondaire (un psychologu­e dirait probableme­nt que mon «traumatism­e» vient de là, c’est certain). J’avais aussi off ert une chronique sur la per - ception de l’amour saphique et ainsi clamé le dr oit de dire et r edire que la S aint-Valentin est surfait e et que Cupidon peut bien aller se rhabiller . Justement. En c e mois de février 20 21, Cupidon doit non seulement se rhabiller, car on gèle en février dans la Belle Pr ovince, mais il doit également suivre plusieurs règles en temps de COVID-19, dont les mesures sanitaires imposées par la santé publique. Ainsi, pour tous celles et ceux qui veulent «rencontrer» en cette période de Saint-Valentin, j’ai imaginé (au moment d’écrire ces lignes, donc il se peut que le scénario change) quelques conseils de Cupidone (oui, au féminin) en t emps de COVID-19. J’aurais bien nommé cette chronique «l’amour au temps de la COVID19», mais ça év oquait beauc oup tr op l’ excellente chronique de juin de mon collègue Denis-Daniel, le perturbant film de Rodrigue Jean, ou encore un certain roman du prix Nobel Gabriel García Márquez (où il faut remplacer, dans la locution, le C OVID-19 par choléra… Une autre maladie infectieus­e, qui tue du monde, mais pour laquelle on a tr ouvé un v accin qui a fait ses preuves). Privilégie­r le virtuel, éviter le présentiel Je sais. Plus capable d’ avoir une énième réunion sur zoom. La technologi­e aide, mais devient lassante. Après avoir fait le réveillon sur zoom avec toute la famille pis grand-maman qui avait toutes les misères du monde à allumer sa caméra et à éteindre son micro au bon moment, l’idée d’avoir une date sur zoom peut rebuter. Néanmoins, la t echnologie peut également a voir de bons côtés: une caméra qui «fonctionne mal», une connexion «Wi-Fi» instable sont autant d’excuses bidon qui vous permettent de «quitter» rapidement une situation indésirabl­e. Privilégie­r le Purel, si en présentiel Une chose est c ertaine, si jamais v ous avez l’occasion d’assister à une date en présentiel en 2021, soyez assuré qu’il y aura enfin des essuie-mains pis du pur el dans l’établissem­ent. Si la pandémie nous a appris quelque chose, c’est bien ça: quand on va sortir dans un bar, un café, on va enfin pouvoir se la ver les mains a vec du savon pis du papier, des denrées en voie de disparitio­n dans plusieurs toilettes du 21e siècle. Pourtant… Le masque: gens qui rient, gens qui pleurent Si nous continuons à porter le masque, nos dates ne seront plus jamais pareilles. Imaginez une seconde que vous donnez rendez-vous à une fille dans un bar . Elle ne dira plus «je port erai un manteau jaune (d’ailleurs, qui en porte?), mais plutôt «je v ais porter un masque bleu avec des petits chats jaunes ( d’ailleurs, qui en porte?). En fait, t out cela pour dire que le masque de - viendra un objet usuel de la cruise. De plus, a vec le masque, chaque r endez-vous deviendra un c oup de théâtre: non seulement, il vous dissimuler­a l’apparence physique de la per sonne, mais vous ne saurez jamais vraiment à quoi elle pense: «Gens qui rient? Gens qui pleurent?» Euh, je sais pas tr op… Mais, whocares? On peut même pu se toucher!...

Bref, comme dirait Cupidone, je crois qu’après la COVID19 nos rapports à l’autre ne seront plus jamais par eils. Aujourd’hui, lorsque je regarde un film et que je v ois des gens se r encontrer pour la pr emière fois dans un café, mon inconscien­t leur dit: «Vous avez oublié votre masque?!» Quand je vois deux femmes d’affaires se serrer la main, je crie: « Vous n’avez pas mis de pur el?» Quand je v ois des films où des gens assist ent à un concert de r ock, collés les uns sur les autr es, je meur s d’envie d’effectuer un retour dans le passé. Quand je vois deux personnes qui ne sont pas de la même bulle se réconforte­r dans les bras l’un de l’autre, j’ai une envie incommensu­rable de leur fair e un câlin, pis de crier: «Aimons-nous les uns les autres!»

Enfin, quand je passe dans la rangée des chocolats – à moitié vide – chez Jean-Coutu, j’ angoisse. Puis, je pousse un soupir de soulagemen­t au tr avers de mon masque, quand je v ois qu’il reste encore une boîte de Lowney.

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