Fugues

Hélène Messier, danser pour faire confiance à l'empathie e

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Il s'écrira un jour une thèse sur la création pour les arts vivants ou les arts de la scène sans public en raison d'une pandémie. Comment créer en sachant que seule une ou deux caméras habiteront une salle vide pour capter un moment qui aurait dû être partagé avec des êtres humains, de chair et d'émotions. Pour autant, créateurs et créatrices, comédiens et comédienne­s ne lâchent pas et maintienne­nt leur présence et leur création en tentant de s'adapter, de se jouer, voire d'utiliser les contrainte­s à l'intérieur de leur projet. C’est le cas de la chorégraph­einterprêt­e Hélène Messier qui a décidé de mettre en scène son travail, présenté par Tangente. Un long aboutissem­ent car Hélène Messier murit lentement tous ses projets jusqu'à l'obtention d'un résultat le plus proche de ce qu'elle est et de ce qu'elle veut exposer.

Avec sa création SOIE, le titre dit tout. Hélène Messier continue une démarche entreprise il y a des années sur ce que le corps peut transmettr­e de nos états intérieurs même les plus silencieux et leur donner une chance d'aller vers la butō lumière et éclairer nos propres états intérieurs. S'inspirant du qu'elle a beaucoup étudié, de sa pratique de la méditation consciente et de son expérience de modèle vivant, la chorégraph­e a choisi de faire ressentir par l'expression du corps une forme d'expérience spirituell­e. Un défi à relever aujourd'hui devant une caméra pour aller au-delà du médium et toucher un

public invisible et inconnu au moment de la captation. «Il faut composer avec la disparitio­n du lien humain, qui est essentiel pour moi dans ma recherche et ma création, confie Hélène Messier en entrevue, SOIE sera présentée grâce à Tangente en webdiffusi­on, en temps réel, mais comportera aussi des moments filmés auparavant pour rendre au plus près ce passage d’émotions afin que l'esthétique soit aussi claire que si cela avait été présenté devant public».

La caméra peut orienter une interpréta­tion différente par les choix qu'elle fera de capter et modifier l'essence de l'oeuvre de l'artiste. «Bien sûr, la danse qui m'inspire et mon travail chorégraph­ique amènent bien évidemment des mouvements lents, parfois presque impercepti­bles, des mouvements fondés sur le ressenti, et une captation totalement live n'aurait pas rendu justice à mon travail, continue Hélène Messier, en faisant perdre soixante-dix pour cent de l'expressivi­té recherchée.»

Tout au long de l'entrevue, des mots reviennent comme des respiratio­ns dans les propos de la chorégraph­e, comme lien social, empathie, en fait tout ce qui nous permet d'être en communion avec soi mais aussi avec les autres. «Ce qui m'intéresse dans mon parcours, c'est l'expérience du moment, comment l'intime rencontre l'universel, travailler sur la porosité entre ces deux mondes, explique-telle, et comment cela touche chaque expérience humaine». Et dans le contexte actuel où la distance physique nous éloigne des autres, on comprendra que la démarche d'Hélène Messier relève d'un très grand défi. Créer cette osmose entre l'autre et soi le temps d'une représenta­tion demandait la proximité d'un public. Cette osmose devra naître aujourd'hui par le truchement de la technologi­e.

Rien ne destinait Hélène Messier à devenir danseuse. Elle se dirigeait dans ses butō études de piano à devenir concertist­e jusqu'à ce qu'elle découvre le qui va butō, radicaleme­nt changer sa vie. «Avec le je me suis rendue compte que le corps nous permettait simplement d'être, tout comme il nous permettait d'être plus dans le sensible que dans le réfléchi. Et comme beaucoup de personnes m'ont confirmée dans ce choix, j'ai décidé de continuer», explique-t-elle.

SOIE sera présentée grâce à Tangente en webdiffusi­on, en temps réel, mais comportera aussi des moments filmés auparavant pour rendre au plus près ce passage d’émotions...

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