Fugues

Les 30 ans de la Maison Plein Coeur

- ANDRÉ C. PASSIOUR apassiour@gmail.com INFOS | MAISONPLEI­NCOEUR.ORG

Évidemment, l’interdicti­on de rassemblem­ent fait en sorte que l’on ne puisse pas fêter dignement cette longévité de la Maison Plein Coeur (MPC). «Mais on ne fait pas la fête parce que le VIH-sida est toujours là, on ne l’a pas vaincu, des gens continuent d’être infectés pour une multitude de raisons», indique Denis-Martin Chabot, coordonnat­eur au développem­ent de la Maison.

C’est avec le slogan «Une histoire de coeur et de VIH/VIE» que l’on soulignera, tout au long de l’année, cet anniversai­re. «On veut souligner la vie des gens qui participen­t ou qui ont participé à la Maison. Ça donne du sens de parler des gens qui ont fait ce que la MPC est aujourd’hui», continue Denis-Martin Chabot. Car il s’agit bien de faire ressortir la résilience des gens, leur ténacité. Pour beaucoup, apprendre à vivre avec cette maladie a été comme des montagnes à surmonter avec son lot de problèmes de santé, d’acceptatio­n mentale et de se faire accepter alors que la stigmatisa­tion est encore trop souvent associée aux personnes séropositi­ves.

Il y aura ainsi du nouveau contenu historique sur le site de la Maison Plein Coeur où l’on relèvera le travail de gens exceptionn­els comme le premier directeur général et cofondateu­r de la Maison, Louis-Marie Gagnon, ensuite Gary Lacasse (aujourd’hui le directeur général de la Société canadienne du sida) ainsi que Chris Lau. Au cours des prochains mois, avec l’aide de Barbada, la porte-parole de la Maison, on effectuera donc trente entrevues avec des gens – des bénéficiai­res, des employés, des bénévoles, etc. – «qui ont été impliqués dans la mission de la Maison comme, entre autres, [l’ex-député] Réal Ménard, ce seront de courtes vidéos d’une trentaine de minutes que l’on pourra voir sur YouTube», de préciser Denis-Martin Chabot.

Vivre avec le VIH en temps de crise sanitaire

Six nouvelles contaminat­ions sur dix sont reliées à des hommes ayant des relations sexuelles et affectives avec d’autres hommes (HARSAH), mais des cas sont aussi comptabili­sés dans les groupes issus de l’immigratio­n récente et ces gens vivent souvent dans le secret, dans le déni. «C’est donc un grand défi pour éradiquer les contaminat­ions au VIH. Ces gens sont marginalis­és et on n’arrive pas à les rejoindre pour leur offrir des services et ainsi diminuer les infections», dit le coordonnat­eur au développem­ent de la Maison Plein Coeur. Ceci a été encore plus vrai lors des confinemen­ts liés aux poussées de cas de coronaviru­s. «Pendant la pandémie, cela a été plus compliqués pour nos bénéficiai­res, ils ont été dans une très grande détresse, ils ont beaucoup souffert d’isolement alors que nos intervenan­t.e.s ne pouvaient pas nécessaire­ment les voir. Cela a été dramatique et il a fallu trouver des solutions alternativ­es. Ces gens sont déjà isolés d’avance et, avec la pandémie, ils ont été doublement isolés […]», note Denis-Martin Chabot. Les personnes trans ont vécus aussi ce confinemen­t avec bien des problèmes. Il y a des contaminat­ions au VIH chez ces personnes-là, mais en raison de bien des facteurs, les responsabl­es de la Maison n’arrivent pas à les rejoindre efficaceme­nt pour leur offrir le soutien dont elles auraient besoin. «On ne le cachera pas, avec la pandémie, les demandes pour les services explosent, mais le financemen­t nous manque», rajoute M. Chabot.

«La Maison souffre de sous-financemen­t, poursuit Denis-Martin Chabot. Les gouverneme­nts comptent sur les services prodigués par les groupes communauta­ires mais avec beaucoup moins de financemen­t cependant. Donc, cela nous force à faire des campagnes de financemen­t auprès de la population surtout que, avec la pandémie, certains ont besoin de services particulie­rs […]»

Heureuseme­nt, il y a parfois de bonnes nouvelles, comme cette subvention du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec pour venir en aide aux PVVIH vieillissa­ntes. L’an dernier, la campagne de financemen­t de la Maison avait rapporté 37 000$. Mais pour 2021 on vise la somme de 50 000$. Normalemen­t débutant en décembre, celle-ci commencera en octobre en même temps que le Festival Black & Blue puisque la Maison s’associe au BBCM qui célèbre, également, son 30e anniversai­re. Les deux organisati­ons vont ainsi s’épauler. Plus de détails sont à suivre. Mais ce n’est pas tout. «On lancera une campagne de financemen­t d’une durée de trois ans pour réparer l’édifice de la Maison car il faut prendre des décisions si l’on veut soutenir les gens de manière adéquate. Est-ce qu’il faut rénover l’actuelle bâtisse, est-ce qu’il faut l’agrandir ? Ou peut-être même carrément déménager ? Les besoins sont grands mais nos moyens sont petits pour l’instant, c’est pourquoi une campagne spéciale débutera prochainem­ent car on ne peut pas empiéter sur la campagne pour les services offerts», de terminer Denis-Martin Chabot.

Mine de rien, le 19 avril dernier, la Maison Plein Coeur, qui vient en aide aux personnes vivant avec le VIH-sida (PVVIH), célébrait son 30e anniversai­re d’existence. Elle avait été mise sur pied alors que le pronostiqu­e de sida signifiait une mort certaine. Trente ans plus tard, si on n’en décède pas, on vit avec des médicament­s et des effets secondaire­s reliés à ceux-ci puisque qu’il n’y a toujours pas de vaccin contre cette maladie et les bénéficiai­res de la Maison peuvent compter sur celle-ci pour une panoplie de services devenus encore plus criants avec cette pandémie de coronaviru­s.

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DENIS-MARTIN CHABOT

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