Fugues

Le pianiste Réjean Tremblay nous a quittés

- ANDRÉ C. PASSIOUR apassiour@gmail.com

Le nom de Réjean Tremblay ne dit pas grand-chose aux jeunes génération­s — à part pour son homonyme, le chroniqueu­r sportif de La Presse. Les plus anciens se souviendro­nt du pianiste qui, dans les années 1970, s’était «marié» à Michel Girouard. Réjean Tremblay est décédé de leucémie le 6 juillet dernier, à l’âge de 73 ans. Il vivait avec cette maladie depuis très longtemps.

Michel Girouard, avec qui il avait été «marié» pendant trois ans, est lui aussi décédé le 9 avril dernier des suites d’une longue maladie. Michel Girouard était âgé de 76 ans.

En 1972, bien avant que des droits aient été octroyés aux personnes LGBTQ+, Michel Girouard et le pianiste Réjean Tremblay s’étaient «unis» en présence des caméras lors d’une cérémonie symbolique. On en avait parlé partout en Amérique du Nord, et même jusqu’en Europe. «[En 1972], on était loin de tous les droits qu’on a aujourd’hui. Michel Girouard et Réjean Tremblay étaient les premiers à se ‘’marier’’ et, par le fait même, à réclamer des droits pour les conjoints de même sexe. Ce n’était pas facile. Ils ont dû faire face à beaucoup de railleries et de discrimina­tion», se souvient Paul Haince, fondateur du Festival Mtl en Arts, qui a été propriétai­re, entre autres, du bar MAX dans les années 1980.

À partir de 1973 et pendant une trentaine d’années, Réjean Tremblay a été le pianiste principal de la chanteuse Alys Robi. Il était de ses nombreux spectacles sur scène, presque jusqu’au décès de Mme Robi en 2011.

«La première fois que je l’ai vu, c’était au Beau Brummel, un piano-bar à l’arrière de l’Hôtel Windsor. Et, à l’époque, je dois avouer que Réjean était aussi un beau Brummel! C’était au début des années 1970. Il allait ainsi de pianos-bars en pianos-bars, c’était quelque chose de très populaire à ce moment-là», se rappelle Yvon Jussaume, qui a été propriétai­re du bar La Boîte en Haut (1975 à 1993) et du Lounge L’Un et L’Autre, parmi tant d’autres établissem­ents. «C’était un très bon musicien et quelqu’un de très gentil. Il a été pianiste à La Boîte en Haut durant dix ans», poursuit Yvon Jussaume. Il aimait accompagne­r des chanteuses telles que Frédérique Fournier, Lucie Vallée et Bruna Sabbaz. » On le retrouvait aussi au piano-bar Hollywood (sur la rue Stanley), entre autres, avec la chanteuse Claudette Morissette. Comme pianiste, il a eu une carrière de plus de 50 ans dans le milieu musical et le monde du spectacle. Au cours de la dernière décennie, il jouait aussi au restaurant allemand Alpenhaus, sur la rue Saint-Marc. «De temps en temps j’allais manger là, et Réjean Tremblay était immanquabl­ement au piano durant la soirée, se remémore Paul Haince. Il agrémentai­t le repas des gens avec sa musique. Lorsqu’il s’est marié avec Michel Girouard, j’y étais, en direct, dans les studios de Télé-Métropole ( TVA aujourd’hui). C’était une grosse affaire médiatique à l’époque. Ç’a fait beaucoup jaser».

«Malgré tout le brouhaha médiatique du mariage, c’était quelqu’un de très gêné, ajoute Yvon Jussaume. Il ne recherchai­t pas à être connu. Il était très discret, même si c’était un artiste accompli.»

Réjean Tremblay a travaillé presque jusqu’à la fin de sa vie. «Il aimait l’ambiance des pianos-bars et des restaurant­s. Surtout vers la fin, il ne participai­t plus à des spectacles sur scène vu tout ce que ça comporte en efforts. Il devait être fatigué, mais restait très discret sur sa maladie», évoque Yvon Jussaume. ✖

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