AFTER BLUE (PARADIS SALE)
After Blue (Paradis Sale) est le surprenant deuxième long-métrage de Bertrand Mandico, un western postapocalyptique installé dans un monde fantastique. Tout commence dans un cosmos moite et abimé. La planète bleue n’est plus et les hommes non plus. Sur leur nouvelle planète, des femmes aux poils qui poussent sur les épaules vivent en petits clans. L’héroïne, Toxique, n’est pas franchement aimée du sien. Et lorsque sur la plage, elle et ses camarades trouvent une femme enfoncée dans le sable jusqu’à la tête, l’univers bascule : Toxique la libère, puis cette ange démoniaque tue les autres femmes. Malgré la complexité de l’univers spatiosexuel du film ainsi que de sa narration, After Blue (Paradis Sale) est une exploration du cinéma via ses mythes, celui du voyage initiatique, des figures de la jeune ingénue et de la mentoresse énigmatique. Quant au western, il le cuisine à sa sauce : les pistolets à long canon et fusils à deux coups des cowgirls de l’espace sont des produits de luxe estampillés Gucci ou Prada, les natifs étatsuniens sont remplacés par des «indiams», créatures incomprises dont la mâchoire renferme des illusions ornées de diamants… Les influences de Mandico transpirent par tous les pores de ses plantes extraterrestres suintantes : la galaxie lointaine des trans de Transylvania n’est pas très loin, ni tous les films pseudoérotiques qui ont connu une explosion dans le cinéma sur cassettes vidéo des années 80 (eux-mêmes forcément inspirés des délires à la Barbarella, consécration en 1968 d’une SF influencée par la révolution sexuelle). Et pourtant chaque plan parvient à rendre compte d’une planète qui ne ressemble à rien de connu, où tout est étrange et étrangement cohérent. Même les rares séquences tournées dans des décors naturels pourraient laisser croire que le réalisateur a fait un voyage interstellaire pour ces prises de vues; grâce aux jeux de lumière, à une obsession pour les effets de fumée et à des constructions phalliques qui jaillissent à perte de vue. Vous aurez compris que ce film est une curiosité. Le regard du cinéaste sur les corps et sur le cinéma est réellement unique. Le résultat est parfois incompréhensible, mais ça fait partie du jeu : si l’on se laisse prendre à celui-ci, on ne peut qu’avoir envie de connaitre ce paradis... ✖