Fugues

Quelques nouveautés à la programmat­ion de Fierté Montréal cette année

- PHILIPPE GRANGER pg.philippegr­anger@gmail.com INFOS | Fierté Montréal, du 1er au 7 août 2022 www.fiertemtl.com

Chris Ngabonziza est directeur de la programmat­ion de Fierté Montréal depuis peu. L’ancien musicien, chargé de production et agent artistique, a dévoilé cette année une programmat­ion colorée, c’est-à-dire diversifié­e et plurielle, que Fierté Montréal juge à l’image de ses festivalie­r.ère.s. C’est à quelques semaines du Festival, avec un agenda débordant de tous bords, tous côtés, que Chris Ngabonziza a répondu aux questions de Fugues.

Quelle vision aviez-vous, toi et ton équipe, pour la programmat­ion de cette année ? CHRIS NGABONZIZA : Je suis arrivé chez Fierté Montréal l’année passée, juste avant le festival en version hybride. Notre slogan était « Ensemble pour toustes », chose qui reste quand même beaucoup cette année aussi. Ça ne s’est pas démodé du tout et je pense que ça va rester notre slogan pendant longtemps. Même qu’on a un podcast qu’on est en train de monter, qui reprend ce même titre. Cette année, je voulais une programmat­ion qui est vraiment inclusive. Je voulais que, quand on traverse la programmat­ion, on trouve quelque chose pour tout le monde. Qu’on sente que quelqu’un a pensé « à nous ». Donc on a conçu la programmat­ion en mode inclusion totale par rapport à toutes les communauté­s qui se retrouvent sous le parapluie de 2SLGBTQIA+. On veut vraiment que tout le monde s’y retrouve.

Un gros changement pour cette édition sera le lieu des grands spectacles, qui sera désormais l’Esplanade du Parc olympique. C’est un gros changement, comment a-t-il été reçu ?

CHRIS NGABONZIZA : À date, le feedback est très positif [il faut se rappeler que plusieurs spectacles se sont tenus à pleine capacité dans l’ancien lieu et que Fierté Montréal avait dû refuser certains soirs des centaines, voire des milliers de personnes à l’entrée, à la demande des autorités, entre autres pour la soirée Drag Superstar et le T-Dance, NDLR]. Pour nous, c’est excitant cette idée d’avoir un nouveau site qui est immense, où on a un gros terrain de jeu dans lequel on peut jouer, grandir et présenter toutes sortes de trucs. On a fait é normément de consultati­ons avant de décider, parce que c’est quand même un très gros move. Mais le feedback a été très positif au sein des organismes communauta­ires avec lesquels on collabore, au sein des artistes même, et même auprès du public sondé. Alors on se sent vraiment à l’aise et backé par nos communauté­s.

Après, c’est sûr que ça vient avec d’autres enjeux. Après tout, c’est une nouvelle place. En termes d’espace, c’est presque le double de ce qu’on avait ! Alors on y va avec énormément d’optimisme, on a essayé de faire une programmat­ion qui va faire en sorte que les gens vont vraiment vouloir venir voir nos grands spectacles, pas seulement les gens de la communauté, mais aussi nos allié.e.s et tout le monde, parce qu’on veut vraiment introduire les gens à ce nouveau site. On se dit que, après la pandémie, probableme­nt que le flot des touristes ne va pas être exactement le même qu’une année normale. Et on voulait vraiment faire une programmat­ion assez ouverte et assez large pour que le monde vienne nous voir. À date, ça s’annonce très bien niveau logistique, alors on est très contents. Après, on va voir si ça va vraiment se traduire comme on le veut !

Le Festival Metro Metro a eu lieu au même emplacemen­t et a eu des problèmes de sécurité. Avez-vous appris certaines choses de ce Festival ?

CHRIS NGABONZIZA : Pendant Metro Metro, on avait une mini délégation de Fierté Montréal. On est tous allés là-bas pour étudier le lieu, pour voir comment c’est un peu en mode action. Donc on a pris énormément de notes. Nous, ça va être encore plus grand parce qu’on va avoir deux scènes. On a la scène principale, qui sera à la même place où était la scène de Metro Metro, mais on a une autre scène aussi, qui est presque aussi grande, qui sera de l’autre côté. Donc, pour nous, les enjeux vont être un peu plus gros. Surtout que nous c’est du mercredi jusqu’à dimanche ! Bref, la vibe est bonne.

La programmat­ion contient de nombreux.ses allié.e.s. Je pense notamment à Diane Dufresne, Corneille... Y a-t-il une réflexion qui s’effectue au sein de Fierté Montréal sur la sélection des allié.e.s ?

CHRIS NGABONZIZA : Pour Diane Dufresne, c’est quand même une personne qui est chouchou et très aimée de la communauté et c’est complèteme­nt intergénér­ationnel. Donc on s’est dit : « Oh my god, ça serait tellement l’fun de ramener Diane Dufresne ». D’ailleurs elle était bookée pour 2020. Mais bon, on sait tous ce qui s’est passé… en 2020. Diane, c’est comme Céline ! Quand je lui parlais pour le show qu’on va préparer ensemble, je lui disais : « Quand tu vas dans des soirées queer et qu’on entend Oxygène, tout le monde chante ensemble », et ce même si un grand nombre n’était pas encore né quand la chanson est sortie ! Diane, c’est une valeur sûre, un no brainer. Je suis complèteme­nt choyé qu’elle ait accepté.

Pour ce qui est de Corneille, c’est un vrai allié de la communauté. Et le spectacle dans lequel il sera s’appelle ImmiX. Ça sera un show rassembleu­r où il y aura beaucoup d’artistes d’ici qui sont nos allié.e.s. On trouvait que c’était une manière de mettre de l’avant des artistes de la relève — la relève dans le style 500 followers sur Instagram. On voulait que cette relève se retrouve sur la même scène que Coeur de Pirate, Corneille, Hubert Lenoir… C’est un spectacle qui aura lieu le 5 août et où on retrouvera des gens qui autrefois ne se seraient jamais retrouvés sur la même scène. C’est un spectacle très ambitieux, mais vraiment l’fun, il y a environ 12 musiciens là-dessus, tout le monde fera deux chansons chacun. Je suis très fier qu’on puisse monter ce show-là. On veut vraiment montrer l’exemple aux autres. Dans le futur, c’est comme ça que les spectacles devraient être : les allié.e.s et les ami.e.s qui se retrouvent ensemble pour fêter la diversité.

As-tu un spectacle coup de coeur ?

CHRIS NGABONZIZA : J’aimerais qu’ImmiX. devienne une signature au sein de Fierté. C’est un truc qui se veut très rassembleu­r. Et il y a aussi évidemment l’incontourn­able spectacle Drag Superstar, qui regroupe les drags vedettes de la franchise RuPaul, du Canada, des ÉtatsUnis et de l’Europe.

Mais y en a un, en particulie­r, qui me tient vraiment à coeur. Cette année, on a un petit peu thématisé notre programmat­ion avec la Conférence qui va se tenir à Montréal sur le VIH, qui aura lieu du 27 juillet au 2 août. Alors, comme ça chevauchai­t de deux jours notre Festival — nous, c’est du 1er au 7 août — on a dit : « Écoutez, le VIH, c’est quelque chose qui a énormément affecté notre communauté, donc on va thématiser en partie le Festival avec ça ». On a donc monté un spectacle avec la collaborat­ion de Dave St-Pierre, qui s’appelle Rapture (vous pouvez lire notre entrevue en P. 44). C’est un spectacle de danse qui s’inspire librement d’Angels in America, une pièce de théâtre sur la crise du sida, qui a été créée en 1991 et a connu de nombreuses adaptation­s, dont une minisérie et un opéra. Et qui

XXᵉ est considérée par plusieurs comme étant une oeuvre majeure de la fin du siècle. Rapture va être présenté au Monastère, au centre-ville, plusieurs soirs. Ça s’inscrit dans le cadre de la tenue à Montréal de la Conférence internatio­nale, mais c’est aussi un événement important de notre programmat­ion cette année. C’est le premier projet sur lequel j’ai travaillé, quand j’ai pris mes fonctions en tant que directeur de la programmat­ion.

Dave St-Pierre, c’est quelqu’un que je respecte beaucoup, donc j’étais vraiment content qu’il accepte d’entrer dans cette folie-là. J’aimerais que tout le monde aille voir ce spectacle. L’équipe créative qu’il a rassemblée est hallucinan­te et ultra inclusive. Il y aura sur scène des personnes latinx, noires, blanches, trans… et je pense que ça va plaire à beaucoup.

Ça, c’est mon coup de coeur aujourd’hui, mais si tu me demandes encore demain matin, ça sera peut-être autre chose (rires), la programmat­ion a vraiment beaucoup à offrir cette année.

La formule de la fameuse « parade » avait été modifiée l’année dernière. Allez-vous conserver cette formule ?

CHRIS NGABONZIZA : Je ne peux pas dire combien de temps on a dû débattre cela dans des réunions. Il y a eu un vraiment bon feedback de la communauté par rapport à la marche de l’année dernière. C’était vraiment une marche et non une parade. On en a parlé avec la Pride de Toronto, et pour eux aussi c’était exactement la même chose. Il y avait vraiment un questionne­ment intense par rapport à ça. Après, tu sais, on est un OBNL, on travaille avec des commandite­s, donc il faut quand même donner de la visibilité à nos commandita­ires. On a essayé de trouver un juste milieu où on peut trouver un peu des deux et que ce soit une marche-parade. On va vraiment essayer de faire les deux.

Te verra-t-on en spectacle durant le festival ?

CHRIS NGABONZIZA : Je suis content d’avoir l’opportunit­é d’être le directeur de la programmat­ion. Je reste dans le même monde, mais je porte un autre chapeau. Honnêtemen­t, ça m’amuse tellement et ça me nourrit énormément en tant qu’artiste, donc pour le moment je me concentre pour livrer ma première programmat­ion ! Le seul truc un peu plus artistique que je ferai, c’est de signer la direction artistique du spectacle d’ouverture avec Diane Dufresne et Pierre Kwenders, le 3 août. ✖

Ne manquez pas, dès le 27 juillet, l’édition spéciale du Fugues d’août dont une grande portion du contenu sera consacrée à la programmat­ion de Fierté Montréal — avec entrevues, reportages et points de vue. C’est à ne pas manquer.

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HUBERT LENOIR / CRÉDIT PHOTO : NOEMIE LECLERC
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COEUR DEPIRATE / CRÉDIT PHOTO : MAXYMEGDEL­ISLE

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