Fugues

CE QUE JE SAIS DE TOI

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Le destin de Tarek semble être tracé d’office par sa famille et les normes sociales : co son père, il sera médecin. Dans l’Égypte des années 80, il s’agit d’un parcours personne ne remet en question et moins encore le principal intéressé. C’est donc au c d’une carrière et d’un mariage heureux qu’il s’enfonce confortabl­ement, jusqu’au mo où il croise le regard d’Ali. Ce dernier est issu d’un milieu défavorisé et les deux hom n’ont en apparence rien en commun. Il ne faut également pas s’imaginer qu’il s’agit coup de foudre puisque, bien au contraire, Tarek l’avait tout d’abord à peine remar Ali s’inquiète pour la santé de sa mère et le médecin accepte de l’accompagne­r au de celle-ci. Une consultati­on qui aurait dû être sans lendemain, mais qui se tra rapidement en visites quotidienn­es alors même que s’effritent les certitudes de T « L’eau s’infiltre insidieuse­ment dans la brique en terre crue. On observe avec fascina la première goutte qui, en quelques secondes, vient tacher la matière à mesure celle-ci l’absorbe. C’est alors une flaque entière qui emprunte le même chemi capillarit­é. Le matériau se gorge d’eau au point de commencer à montrer des si de faiblesse. Combien de temps faut-il pour que la constructi­on tout entière ne so péril ? Tu ne cherchais pas à mettre des mots sur l’effet qu’Ali produisait sur toi. À bon décrire l’espoir tourmenté dans lequel te plongeait la vue de sa nuque… »

L’opprobre public et une tragédie ne laisseront éventuelle­ment qu’une seule optio médecin : s’exiler à l’étranger et adopter le Québec comme terre d’accueil, délaissa chaleur du Caire pour la froideur des hivers. Le passé finit cependant toujours par rattraper et c’est ainsi que, 15 ans plus tard se révéleront des pans entiers d’une his échappée qui, comme l’indique le titre, doit lui être relatée.

Le roman se veut à la fois une incursion dans l’intime d’un homme dont les repères bouleversé­s, mais également dans la quotidienn­eté d’une famille égyptienne ave toile de fond, l’histoire d’un pays en mutation. Le récit est très ingénieuse­ment divis trois parties avec une première relatée à la deuxième personne du singulier (le « t une seconde à la première (le « je ») et une troisième au « nous ». Une structure pique immédiatem­ent la curiosité : quelle est l’identité du mystérieux narrateur ? Chacour est né au Québec de parents égyptiens. Il présente ici un premier roman, c ne peut que surprendre, considéran­t l’extrême qualité de sa prose où la plus banale scènes devient un écrin des plus splendides, comme en témoigne l’entrée d’un nou patient dans le cabinet de Tarek : « Ce n’était pas un homme, c’étaient des décen d’excès, d’emportemen­ts et de tabac qui firent leur entrée avec fracas ». On ne également que saluer l’extrême habileté avec laquelle l’auteur construit son intri happant instantané­ment l’intérêt du lecteur ou la lectrice pour le mener à une conclu bouleversa­nte. Une oeuvre qui marque puissammen­t l’esprit et le coeur et, sans a doute, l’un des grands romans de l’année 2023. ✖ BENOIT MIGNEAULT bmingo@videotr

INFOS | CE QUE JE SAIS DE TOI / ÉRIC CHACOUR. QUÉBEC : ALTO, 2023, 293 P

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