«Je regrette ce périple, j’ai joué à la vie ou la mort»
Le rédacteur en chef de L’ACTU a rencontré Sihan, une Somalienne de 17 ans réfugiée sur l’île de Lampedusa, en Méditerranée. Elle raconte son périple.
SON VOYAGE
« J’ai voyagé de Somalie en Libye via l’Éthiopie et le Soudan (voir carte p. 3). En bus et à pied, avec un passeur différent entre chaque pays. Après deux heures de marche, le 15 février vers minuit, je suis montée sur un bateau en bois avec 300 personnes. Nous n’avions pas de capitaine, juste la direction de Lampedusa inscrite sur un papier. Le lendemain, vers minuit, on a été récupérés par les gardes-côtes italiens. Pendant ces 24 heures en mer, j’ai vomi tout le temps, j’avais très froid dans mes vêtements trempés. Autour de moi, des enfants pleuraient, des femmes enceintes s’évanouissaient, des hommes se pissaient dessus de peur. Tout le monde priait, les musulmans de Somalie comme l e s c hréti e ns or t hodoxes d’Érythrée. J’ai prié Allah. »
SA FUITE
« J’avais quitté les miens en secret le 11 décembre, avec une amie de 25 ans [rattrapée ensuite par ses parents]. Ils étaient mécontents. D’autant que j’avais volé 300 dollars à ma mère. En Libye, on a attendu un mois à Ajdabiya, puis deux mois à Tripoli. 150 hommes et femmes dans une pièce avec interdiction de parler. Un seul W.-C. Et un plat de spaghettis par jour. Les indisciplinés étaient frappés avec un bâton. Nos passeurs ont abusé de plusieurs femmes [je n’ai pas osé lui demander si elle avait été violée]. Dehors, c’était la guerre. On entendait les boum, boum, boum ! J’ai téléphoné en pleurs à ma mère : “J’ai envie de mou-