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“Elaha ressemble à n’importe quelle ado en Europe”

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Pouvez-vous nous présenter Elaha, la jeune héroïne de votre film ? Manon Loizeau : En octobre 2018, Elaha, 11 ans, a fui l’Afghanista­n avec sa famille. Les talibans multipliai­ent les attaques suicides. Plusieurs avaient visé l’école d’Elaha. Ses parents ont décidé de partir avec leurs cinq enfants. Leur périple de 7 000 kilomètres a duré quatre ans. Ils sont passés par le Pakistan, ont franchi la frontière avec l’Iran, où un passeur a failli les kidnapper. Puis le père et la soeur d’Elaha ont fait une chute en montagne, à 2 000 mètres d’altitude. La famille a ensuite dormi près de 10 mois dans des fossés en Turquie, tenté 10 fois de gagner la Grèce par la mer et neuf fois leur bateau a été coulé par les gardes-côtes. En Grèce, elle a vécu dans le camp de Moria ( L’ACTU nos 6127, 6190, 6328), surnommé « l’enfer sur Terre », puis à Athènes, avant de se réfugier en Allemagne. Ces enfants ont failli mourir mille fois mais, malgré tout, ils regardent devant, veulent aller à l’école, y arriver. Leur résilience est énorme.

Qu’est-ce qui a motivé l’envie de lui consacrer un documentai­re ? J’avais le projet de réaliser un film sur l’exil raconté à hauteur d’enfant, pour montrer comment un enfant fuyant la guerre grandit sur la route et se construit. Un jour, en 2020, dans le camp de Moria qui venait de brûler entièremen­t, j’ai croisé Elaha. Avec une petite caméra, elle filmait les restes de la petite école qu’elle avait créée pour les enfants du camp. J’ai alors décidé de la suivre avec sa famille. Mon regard croise le récit et les images que tourne Elaha à la manière d’un journal intime..

On s’identifie énormément à cette famille. Comment l’expliquez-vous ? Le but était de montrer qu’eux c’est nous. En mieux, tant leur force est impression­nante. Ce qu’ils vivent peut nous arriver demain. Elaha ressemble à n’importe quelle ado en Europe. Je ne montre pas des « réfugiés », des « migrants », mais le destin d’une famille. Une famille aimante, soudée, menant une vie normale jusqu’à ce qu’elle se retrouve projetée sur la route. Elaha avait une maison, ses parents travaillai­ent, ils sont soucieux de l’éducation et de la scolarité de leurs enfants. Comme nous. Ce couple a tout quitté pour que leurs filles aient une vie, un métier et un destin de femmes indépendan­tes. Chapeau à eux !

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Play Bac Presse SARL, 14 bis, rue des Minimes, 75140 Paris Cedex 03. Rédaction: 14 bis, rue des Minimes, Paris 3e

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