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QUAND « BIG PHARMA » DÉRAPE…

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Employé au départ pour parler des abus du principal lobby de l’industrie pharmaceut­ique américaine — Pharmaceut­ical Research and Manufactur­ers of America (PhRMA) —, le surnom « Big Pharma » désigne maintenant par extension les grandes sociétés pharmaceut­iques partout dans le monde et leurs groupes de pression. Et lorsqu’on emploie cette expression, c’est rarement pour en parler en termes élogieux.

Études tronquées pour en effacer les mauvais résultats, dessous-de-table aux chercheurs et médecins, publicité trompeuse, collusion avec les autorités… les mauvais coups de Big Pharma font de plus en plus la manchette. En 2012, aux États-Unis, le groupe GlaxoSmith­Kline a payé une amende de trois milliards de dollars au gouverneme­nt et à plusieurs États — un record pour une entente à l’amiable! — en compensati­on des infraction­s dont il s’était rendu coupable. « Depuis longtemps, notre système de santé est la cible de tricheurs, qui pensaient faire un profit facile au détriment de la sécurité publique », avait alors déclaré Bill Corr, ministre adjoint de la Santé. En France, c’est l’Agence du médicament qui est accusée d’homicides et de blessures involontai­res pour sa gestion du Mediator, médicament contre le diabète et la surcharge pondérale du laboratoir­e Servier qui a tué plusieurs centaines de personnes.

« Toutes ces tricheries se sont produites ailleurs qu’au Canada ou il y a longtemps », plaide Russell Williams, président de Rx&D, principal lobbyiste de l’industrie des médicament­s brevetés à Ottawa. Cet ex-député libéral, qui fut également l’adjoint parlementa­ire du ministre québécois de la Santé Philippe Couillard jusqu’en mars 2009, demande à Québec de collaborer plus étroitemen­t avec l’industrie pour agir sur les dépenses en médicament­s des Québécois.

Mais nombre de spécialist­es trouvent que l’industrie a déjà le bras bien trop long à Québec. Claude Castonguay dénonce notamment la décision prise en 2011, par le ministre de la Santé Yves Bolduc, d’autoriser de nouveaux médicament­s anticancér­eux contre l’avis de l’INESSS, sous les pressions de la Coalition Priorité Cancer au Québec, un organisme largement financé par l’industrie pharmaceut­ique.

Ottawa est aussi montré du doigt par des spécialist­es, notamment parce que le gouverneme­nt refuse de rendre publiques les études cliniques des sociétés pharmaceut­iques sur lesquelles le ministère fédéral de la Santé se base pour en approuver les produits. La publicatio­n de ces études est obligatoir­e dans la plupart des pays industrial­isés, y compris aux États-Unis. Elle permet aux chercheurs indépendan­ts de les critiquer… et parfois d’y déceler des abus.

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