COMMISSIONS SCOLAIRESLES ÉLECTIONS DE LA…
Mouvement pour une école moderne et ouverte (MEMO) règne sans opposition depuis sa fondation, il y a 16 ans.
L’idée d’éliminer les commissions scolaires n’est pas nouvelle. En 2007, Mario Dumont, chef de l’Action démocratique, avait proposé de transférer la responsabilité des écoles aux municipalités, comme c’est le cas à New York. Aux élections provinciales de 2012, le chef de la Coalition Avenir Québec, François Legault, avait promis que s’il était élu, il éliminerait les commissions scolaires et partagerait leurs pouvoirs entre le gouvernement provincial et… les parents. Cet ancien ministre de l’Éducation sous le gouvernement de Lucien Bouchard affirmait que le Québec pourrait ainsi réaliser des économies de 300 millions de dollars.
Le plan Legault se résumait à une décentralisation radicale. Le ministère de l’Éducation serait l’employeur du personnel et resterait propriétaire des bâtiments, dont il assurerait l’entretien. À chaque élève correspondrait une part de subvention du budget de l’Éducation — 10 000 dollars par enfant —, et il appartiendrait à l’établissement de décider comment l’utiliser, d’embaucher les professeurs, etc. Les commissions scolaires seraient remplacées par des « centres de services » — des sortes de coops qui mettraient en commun le transport ou le déneigement, par exemple, selon la volonté de chaque école.
Candidat à la présidence de la commission scolaire des Patriotes (CSP), André Besner, gestionnaire retraité, a fait une maîtrise en gestion publique avant de se lancer dans la course. Actuellement conseiller municipal de l’opposition à Saint-Bruno- deMontarville, il propose d’augmenter la coopération entre la municipalité et ses écoles, qui s’ignorent presque complètement. « Les commissions doivent revenir à leur mission de gestion, dit-il. Je m’attaquerai à la coordination des services municipaux et scolaires. Imaginez : nous avons une seule piscine intérieure à Saint-Bruno. Elle est la propriété de la commission scolaire, qui refuse de la louer à la ville ! Ça n’a aucun sens ! »
Mais toute tentative d’abolir les commissions scolaires se heurtera au noyau dur de la communauté anglo-québécoise, dont le taux de participation aux élections scolaires s’élève à 17 %. « Si on les abolit, ça va être le tollé ! » prévient David Daoust, président de l’Association des commissions scolaires anglophones du Québec. Car la gouvernance scolaire est le dernier bastion politique de la communauté anglophone, qui y tient au même titre et pour les mêmes raisons que les francophones minoritaires des autres provinces.
Selon David Daoust, les anglophones contesteront l’abolition des commissions scolaires sur la base de l’article 23 de la Charte des droits et libertés, qui garantit à la minorité le droit de faire instruire ses enfants en anglais. C’est l’argument qu’ont fait valoir les francophones du Nouveau-Brunswick après l’abolition des commissions scolaires, en 1996. Et ils ont eu gain de cause.
Selon Henri Brun, professeur de droit constitutionnel à l’Université Laval, c’est un faux débat. « La Cour suprême a reconnu le droit des anglophones à l’enseignement en anglais, mais n’a pas mentionné les commissions scolaires en tant que telles. » À l’inverse, on peut faire valoir que c’est le gouvernement du Québec qui, en 1998, a fait rouvrir la Constitution pour abolir les commissions scolaires religieuses et créer des commissions scolaires linguistiques.
Ce qui ramène la question : les électeurs québécois sentiront-ils la nécessité de se jeter dans une bataille constitutionnelle pour des économies incertaines ? Ils peuvent se prononcer le 2 novembre, si jamais l’envie leur prend de voter aux élections scolaires…