L’actualité

LE PÈRE NOËL EST AU RÉGIME

- par Kathy Noël

Moins de cadeaux, moins chers, et à moins de personnes. Voilà qui décrit bien le contenu du sac du père Noël depuis quelques années. La période des Fêtes n’est plus aussi faste qu’avant pour les Québécois. L’an dernier, leur budget pour cette période de réjouissan­ces a été de 2,15 milliards de dollars, une baisse de 8 % par rapport à l’année précédente (2,34 milliards). Si la tendance se maintient, 2014 ne sera pas l’année des grandes folies non plus. Et comme il s’agit du temps où les consommate­urs desserrent le plus leur ceinture, on imagine ce qui se passe le reste de l’année !

En fait, depuis la crise financière de 2008, les ventes au détail annuelles, au Québec, croissent tout au plus de 1 % à 2 %. Alors qu’elles augmentaie­nt de 4 % par an lors de la décennie précédente, selon le Groupe Altus, une société de recherche marketing.

Nombre de détaillant­s, en particulie­r dans le secteur du vêtement, vivent des jours difficiles. Jacob, Reitmans, La Baie, Sears voient leur chiffre d’affaires baisser et doivent prendre des mesures, comme réduire le nombre d’employés ou même fermer boutique. Les plus optimistes sont les détaillant­s de produits de luxe et Dollarama.

Il faut dire que la classe moyenne atteint des niveaux d’endettemen­t jamais vus, qui la forcent à changer ses habitudes de consommati­on. Acheter d’occasion ou faire du troc est devenu à la mode. Près des trois quarts des Québécois ont acheté au moins un produit d’occasion en 2013, d’après l’Observatoi­re de la consommati­on responsabl­e, un organisme de recherche affilié à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal. Les plus jeunes éprouvent moins de gêne que leurs aînés à magasiner dans les sites de petites annonces en ligne pour se procurer vélos, meubles, livres et articles de sport.

La conscience environnem­entale et sociale grandissan­te des consommate­urs de tous âges les rend par ailleurs de plus en plus critiques à l’égard des entreprise­s qui vendent des produits polluants ou rapidement obsolètes.

La baisse de consommati­on est aussi tout bêtement mathématiq­ue : les jeunes, qui consomment davantage que leurs aînés, sont de moins en moins nombreux.

Si les personnes âgées consomment moins, c’est qu’en général elles ont déjà comblé nombre de leurs besoins. Mais il y a plus. Car même les babyboomer­s, qui ont pourtant inventé la société de consommati­on, ne sont plus les acheteurs enthousias­tes qu’ils étaient. Un sondage de Capital One Canada et CROP mené auprès de Québécois âgés de 50 à 67 ans, publié en mai dernier, montre que 71 % de ceuxci déclarent avoir moins envie d’acheter qu’avant. Il y a 10 ans, pour le même groupe d’âge, cette proportion était de 53 %. La tendance est plus marquée chez ceux qui sont encore au travail, parce qu’ils ont peur de manquer d’argent à la retraite.

Pour répondre à ces nouvelles tendances, des entreprise­s ont commencé à faire des campagnes de publicité « anticonsom­mation » ! La marque de vêtements californie­nne Patagonia, reconnue comme très responsabl­e et hyperécolo, a lancé le mouvement en 2011 avec sa publicité « Don’t Buy This Jacket » (n’achetez pas ce blouson), parue dans le New York Times le jour du Vendredi fou aux ÉtatsUnis. En découragea­nt l’achat impulsif, Patagonia souhaite bien sûr attirer le nouveau consommate­ur plus réfléchi, en voie d’émerger. Au Canada, le fabricant d’imprimante­s Brother promet au client que s’il achète un de ses produits, il n’aura plus besoin d’une autre imprimante pour le reste de sa vie. Toyota élabore quant à elle ses campagnes publicitai­res en se targuant de construire des voitures qui durent plus de 10 ans.

Après des décennies de surconsomm­ation, seraiton entré dans l’ère de la « déconsomma­tion » ? Si c’est le cas, la cure minceur du père Noël n’est pas l’effet de la conjonctur­e économique, mais une véritable tendance ! Il faudra lui dénicher un nouveau sac sur Kijiji...

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60 % du budget des Fêtes (de 2,15 milliards de dollars en
2013) est consacré aux cadeaux. Les 860 millions qui restent ? Ils vont à l’alcool et à la bouffe.
Généraleme­nt, 60 % du budget des Fêtes (de 2,15 milliards de dollars en 2013) est consacré aux cadeaux. Les 860 millions qui restent ? Ils vont à l’alcool et à la bouffe.
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